Dans un contexte difficile, marqué par des perturbations sans précédent dans les chaînes d'approvisionnement, une congestion portuaire généralisée à l’échelle mondiale, une pénurie de matières premières, des arrêts de production… le canal de Panama, un des principaux points de passage des navires, a vu son trafic et son tonnage augmenter par rapport à l'exercice précédent de 8,7 % entre le 1er octobre 2020 et le 30 septembre 2021. « La crise que traverse le commerce mondial en raison des défaillances de la chaîne d'approvisionnement et de la congestion des ports, n'a pas eu d'incidence sur le canal », fait observer Ricaurte Vásquez Morales, le président de Panama Canal Authority, l’Autorité du canal de Panama (ACP).
Les 80 km du canal, par où transitent 3,5 % du commerce maritime mondial, ont enregistré 13 342 passages et un tonnage de 516,7 Mt, soit 10 % de plus que le tonnage enregistré en 2019, le dernier exercice avant la pandémie.
Activité plus intense dans les terminaux de GNL du golfe du Mexique
Les porte-conteneurs (184,3 Mt, + 2 %) et les vraquiers (90 Mt) dominent en termes de tonnages mais ce sont les méthaniers (61 Mt) et les transporteurs de GPL (52,8 Mt, + 18,4 %) et de produits chimiques (65 Mt) qui ont stimulé la croissance de l’ensemble.
Les méthaniers ont notamment enregistré une augmentation de 31,4 % en volume, la plus forte croissance, tous segments confondus. Le GNL accapare également le record annuel pour le nombre de transits ainsi que certains performances mensuelles. Les températures hivernales en Asie n’y sont pas étrangères. L’accélération des passages de méthaniers reflète aussi une activité plus intense dans les terminaux de GNL situés sur la côte du golfe du Mexique et la côte Est des États-Unis, se soldant par une augmentation des exportations vers l'Asie.
Modification du système de réservation
« Nous avons démontré notre capacité à nous adapter et à répondre aux besoins fluctuants du marché, comme nous l'avons montré lorsque nous avons modifié le système de réservation pour offrir à nos clients des options de réservation supplémentaires et une plus grande flexibilité », se félicite Ilya Espino de Marotta, administrateur adjoint de l’infrastructure centraméricaine.
Bien que les Pure Car and Truck Carriers (PTCT) soient toujours en convalescence à l’issue de la pandémie qui a rudoyé le segment, le canal en a enregistré 15,6 % en plus par rapport à l’exercice antérieur.
Les vraquiers ont été stimulés par un transport accru de céréales entre la Chine et les États-Unis, notamment alimenté par la fin des restrictions sanitaires sur le secteur porcin en Chine, le cheptel décimé par la fièvre ayant été reconstitué.
Deux tiers des volumes générés par les États-Unis
La route entre la côte Est américaine et l’Asie reste la « première cliente ». « La Corée du Sud est devenue le quatrième utilisateur de la voie navigable cette année, précédée par les États-Unis, la Chine et le Japon, le Chili arrivant en cinquième position », indique l’administrateur.
Dans l'ensemble, les tonnages ont été principalement gonflés par les néo-panamax, bien que le nombre de passages ait diminué mais les compagnies maritimes ont massifié leurs navires afin de réduire les passagers. Panama capitalise à cet égard sur l’augmentation de la longueur maximale autorisée (LOA) pour les unités franchissant les écluses élargies. « Nous avons commencé à offrir un tirant d'eau de 15,24 m, le niveau le plus élevé autorisé aux écluses néo-panamax, grâce à une gestion efficace de l'eau et à l'augmentation des précipitations. Il a permis d'accroître la capacité à manœuvrer des navires plus grands et plus lourds. »
Neutralité carbone en 2030
La direction du Canal de Panama s’est engagée en avril dernier à la neutralité carbone (égalisation entre les émissions brutes de gaz à effet de serre et les absorptions par les puits) d'ici 2030, moyennant des investissements (en cours) de l’ordre de 2,4 Md$ pour moderniser les équipements et migrer progressivement vers des véhicules électriques et des remorqueurs hybrides. Une tarification préférentielle à l’égard des navires à faibles émissions de carbone est à l’étude. Des représentants du Canal de Panama participent actuellement à la Conférence des Nations unies sur le changement climatique (COP26).
Adeline Descamps