Un grand projet de production d'ammoniac vert a été annoncé ce 23 février par le Danemark. L’ambition, portée par plusieurs poids lourds de l'agroalimentaire danois, est aussi soutenu par les deux compagnies maritimes du pays, Maersk et DFDS. L’installation pourrait être prête dans cinq ans. L'investissement s'élève à environ 1 Md€.
Le projet, qui devrait prendre forme à Esbjerg sur la côte ouest danoise, est porté par le fonds d'infrastructure Copenhagen Infrastructure Partners (CIP), un consortium composé de plusieurs poids lourds de l'agroalimentaire danois, tels Arla (produits laitiers), Danish Crown (charcuterie) ou encore le fournisseur agricole DLG. Mais il intéresse aussi grandement les deux principaux armateurs du pays, le leader mondial du transport maritime de conteneurs Maersk et l’opérateur de ferries DFDS.
À l’origine, il s’agit de cibler les émissions CO2 générées par le secteur des engrais, principalement produit avec des énergies fossiles, et qui serait responsable de 1,4 % des émissions mondiales de carbone. « Le site convertira [par la technologie de l’électrolyse, NDLR] de l'électricité d’origine éolienne en ammoniac vert, utilisé alors comme engrais verts dans le secteur agricole et carburant neutre en CO2 dans le transport maritime, indique dans un communiqué CIP. Au final, cela doit permettre de réduire les émissions de CO2 de 1,5 Mt par an », est-il assuré.
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Power to X
En fait, la technologie dont il est question ici est le Power to X (ou P2X), soit la transformation d’électricité en un autre vecteur énergétique. Ce vecteur X peut être de la chaleur qui satisfait par exemple des besoins industriels ou alimente des réseaux de chaleur, explique l’Ademe. Il peut également être un gaz de synthèse : de l’hydrogène pour des usages de mobilité, ou du méthane (après méthanisation) qui peut lui-même être injecté dans le réseau gazier pour des besoins industriels, de chauffage ou de mobilité. Ce procédé est permis par la technologie Power to Gas, par lequel on transforme de l’électricité en hydrogène par électrolyse de l’eau afin de la stocker à un moment où elle est excédentaire sur le réseau.
Les réflexions autour de cette technologie, qui permet de décarboner les réseaux de gaz et de chaleur, visent aujourd’hui principalement à valoriser les surplus d’électricité intermittente (photovoltaïque, éolien) lors des périodes de faible demande. L’intérêt de ces technologies dépendra en grande partie du prix de la tonne de CO2 en 2050, l’électricité décarbonée entrant en compétition avec des combustibles émetteurs de gaz à effet de serre.
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Décision finale avant 2023
Copenhagen Infrastructure Partners prévoit de construire une installation de production qui, à partir de 2026, sera capable de produire 800 à 900 000 t d'ammoniac vert par an grâce à un électrolyseur de 1 GW. L'investissement total est estimé environ 1 Md$ et l’installation pourrait être prête dans cinq ans.
Maersk, qui considère l’ammoniac vert comme un des quatre carburants crédibles pour parvenir à une propulsion décarbonée, et DFDS ont d’ores et déjà manifesté leur soutien au projet par une déclaration d’intention.
Copenhagen Infrastructure Partners devrait prendre une décision finale sur l'investissement en 2022/23. Pour rappel, le norvégien Yara, un des principaux producteurs d'engrais minéraux dans le monde, avait également annoncé vouloir développer sa production d'ammoniac vert, en utilisant de l'hydroélectricité abondante en Norvège.
A.D.