Avec le Brexit, le marché britannique risque de se fermer aux producteurs français de sucre et avec lui les 15 % qu'il représente dans leurs exportations. Le salut pourrait cependant venir, au moins pour 2021, du marché mondial qui atteint un déficit record de 3,5 Mt de sucre.
2020 a été particulièrement rude pour la filière sucrière française. Les champs de betteraves ont été touchés par une maladie virale qui a provoqué une chute des rendements et, en conséquence, de la production de sucre et d'éthanol. La crise de la filière est rendue plus aigüe encore par le Brexit. En effet, 300 000 à 400 000 t de sucre et 2 millions d'hectolitres d'éthanol, l'équivalent de 15 % de la production betteravière française et de 4,5 Mt de betteraves, trouvent leur débouché au Royaume-Uni.
Or ce dernier détient la moitié des capacités de raffinage de sucre en Europe. Sans ses fournisseurs français, il ira certainement chercher ailleurs sa matière première, et notamment du côté du Brésil, au premier rang mondial des producteurs. Le risque est alors de voir ce sucre brésilien être réexporté vers l'Europe à des prix moindres que ceux du sucre français et de déstabiliser le marché intérieur. Les planteurs de betteraves ont appelé l'Union européenne à la vigilance.
Le Brésil omniprésent
Pourtant, à l'échelle mondiale, le marché, même s'il connaît une embellie, reste plutôt morose. En novembre, l'Association internationale du sucre (Iso) a revu à la baisse ses estimations pour 2020-2021. Alors que le déficit de la production était annoncé à 0,72 Mt en août dernier, c'est-à-dire à un quasi-équilibre au regard du - 9,3 Mt de l'exercice précédent, il est depuis passé à - 3,5 Mt, avec une production mondiale désormais évaluée à 171,12 Mt.
Grâce à la réduction de l'écart entre production et consommation, les échanges mondiaux devraient progresser de 10 % pour atteindre 65,55 Mt. Avec ce bémol cependant que cette hausse devrait bénéficier en tout premier lieu au Brésil, omniprésent sur les marchés.
L'Asie en forte demande
Le confinement et les mesures sanitaires en vigueur chez le géant latino-américain ont donné un coup de frein aux déplacements et provoqué une chute de la consommation d'éthanol produit à partir de la canne à sucre. Les industriels de la filière ont donc basculé leurs outils de transformation sur un sucre qui, dopé par un réal brésilien faible au regard du dollar et une logistique en pleine amélioration, a déferlé sur la planète.
Selon l'Iso, le Brésil a enregistré des records successifs de production et d'exportation pour parvenir à des volumes supplémentaires de 10,8 Mt et 8,8 Mt respectivement. Chine, Inde et Indonésie ont répondu à cette offre en important des quantités plus élevées que prévu de sucre brut. Ces flux en provenance du Brésil sur le marché mondial pourraient se poursuivre en 2021.
Myriam Guillemaud Silenko
