La taxe carbone à l’agenda international

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Le timing est juste parfait pour que le transport maritime accueille le marché carbone. La planète est en état d’urgence climatique dont témoignent, selon les scientifiques, les phénomènes météorologiques d’une extrême violence, incendies XXL, tempêtes meurtrières, crues éruptives, sécheresses prolongées, pluies diluviennes.

En 2022, l’augmentation moyenne de la température par rapport aux niveaux préindustriels était d’environ 1,2°C. Au rythme actuel, le monde atteindra probablement une hausse de température de 1,5°C au début des années 2030, et très probablement avant, selon le rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat des Nations unies (Giec).

Le transport maritime a une responsabilité à plusieurs niveaux. D’une façon directe et indirecte. Il contribue chaque année à plus ou moins 3 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre (GES). Et à en croire la quatrième étude de l’Organisation maritime internationale (OMI) sur ses émissions de CO2, elles devraient bondir de 50 % d’ici à 2050, en fonction des différentes hypothèses de croissance des échanges maritimes mondiaux. Le secteur est aussi comptable de 11 % du charbon acheminé par la mer chaque année, de 16 % du brut et de 5 % du gaz. Quant au transport maritime de conteneurs, il a « permis aux économies développées d’externaliser la fabrication, poussant ainsi une part importante de leurs émissions vers les pays en développement », indique une étude de l’ITF de l’OCDE.

L’agenda est opportun. La tarification du carbone a fait du chemin. Le principe, qui fixe le prix des coûts sociaux du carbone (le préjudice économique), a longtemps été controversé. Certains pays craignent que la tarification du carbone n’affecte les perspectives de leurs industries des combustibles fossiles. D’autres redoutent l’impact potentiel des prix sur les biens importés et exportés. « Les systèmes de tarification du carbone sont notoirement difficiles à mettre en place », convient Olaf Merk, spécialiste du maritime à l’OCDE, évoquant les âpres combats politiques en Australie, au Canada et aux États-Unis.

Aujourd’hui, les circonstances semblent plus favorables à « l’ouverture d’une discussion mondiale ». Aux termes d’un long cheminement parlementaire, l’Union européenne a validé l’intégration du secteur dans le système communautaire d’échange de quotas d’émission (SCEQE). Les émissions de GES des navires faisant escale dans les ports de l’UE vont ainsi commencer à être tarifées. Ce faisant, elle rend plus probable la conclusion d’un accord mondial sur le sujet.

Plusieurs propositions ont d’ailleurs été soumises à l’OMI par les plus activistes des États-membres (prélèvement, « feebate », échange de droits d’émission, récompense/pénalité, norme sur le carburant). « Malgré les différences d’approche, les propositions peuvent se compléter », assure Olaf Merk à condition qu’elles permettent d’opérer « une trajectoire immédiate vers des carburants à émissions nulles plutôt que d’inclure une phase intermédiaire avec des carburants à faibles émissions ».

Encore faut-il que ces combustibles soient disponibles à grande échelle, ce qu’ils ne sont pas, et compétitifs quand ils le seront. La tarification du carbone pourrait y rémédier, notamment en rendant plus vite hors-jeu les combustibles fossiles. Selon les calculs de l’ITF, un prix du carbone compris entre 100 et 500 $ par tonne de CO2 sera nécessaire pour atteindre l’objectif de la stratégie initiale de l’OMI. Il pourrait être inférieur à cette fourchette si les recettes tirées de la tarification du carbone étaient utilisées pour compenser le coût des carburants alternatifs. Si elles étaient entièrement réinvesties dans les carburants et les technologies sans carbone, l’effort nécessaire pour atteindre les objectifs tomberait entre 50 et 250 $ par tonne de CO2.

Si les conditions sont réunies pour un débat plus constructif sur l’un des sujets les plus rugueux du shipping, il s’agit désormais de ne pas louper la première marche, celle de l’ingénierie du système, pour ne pas hériter d’un mécanisme qui ne soit ni équitable, ni efficace, ni transparent. Pis, sans aucun effet sur la réduction des émissions de gaz à effet de serre.

Tarification du carbone, le remède universel?

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