GNL, voie d’avenir ou de transition sur les lignes corses?

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Chaque jour, un ballet de ferries et ro-pax relient les ports continentaux de Marseille, Nice, Toulon à ceux de Corse. Depuis bientôt dix ans, les armateurs recherchent des solutions, testent des prototypes pour décarbonner les navires. Pas de miracle mais un florilège de technologies.

Cinq ans après l’IMO 2020, qui a plafonné la teneur en soufre des carburants à 0,5 %, une nouvelle échéance se profile à l’horizon pour les armateurs voguant en Méditerranée. Le 1er mai 2025 entrera en vigueur la zone de contrôle des émissions (ECA, acronyme de Emission Control Area) ciblant les oxydes de soufres et les particules, à l’instar de ce qui existe déjà en Manche et en mer du Nord. La teneur en soufre des carburants devrait être cette fois limitée à 0,1 %. Sur les traversées maritimes corses, la route de la décarbonation s’apparente à un long parcours sinueux sachant que la plupart des navires jaune, bleu et rouge tournent encore au fuel. Les choix technologiques diffèrent selon les navires en présence. « Il n’y a pas une solution unique mais un mix, dépendant de l’évolution de la technologie, de la mise à disposition auprès des armateurs, de la disponibilité des carburants alternatifs ou des infrastructures », résume Pierre Mattei, président de Corsica Ferries.

En 2023, Corsica Linea a ouvert la voie au GNL en prenant livraison du A Galeotta, son tout premier navire au gaz sur les lignes maritimes de Corse. Une deuxième construction neuve, également alimentée au GNL, est à l’étude. Ce nouveau ro-pax qui a coûté plus de 150 M€, élimine 99 % des oxydes de soufre, 85 % des oxydes d’azote et particules fines et diminue de 20 à 25 % les émissions de CO2. La compagnie qui exploite dix navires n’a pas, à ce stade, une stratégie homogène mais a recours à un éventail de technologies parmi lesquelles le controversé scrubber. La France, qui a interdit en janvier 2022 le fonctionnement des dispositifs d’épuration des gaz de cheminée à boucle ouverte, a accordé une dérogation à Corsica Linea pour les six prochaines années lui permettant ainsi de brûler du fuel lourd (HFO) en deversant à la mer les effluents souillés.

Alimentation électrique pour la Méridionale

Contrainte par ses difficultés financières depuis deux ans, La Méridionale, délégataire sur Ajaccio et Porto-Vecchio, était limitée dans ses choix énergétiques pour ce qui est du carburant. Le rachat en mai 2023 par CMA CGM a renversé la vapeur. « En mai 2026, la compagnie prendra livraison de deux ro-pax de 250 cabines d’une capacité de 800 passagers et de 2500 mètres linéaires. Ils seront équipés chacun de deux moteurs électriques avec un pack de batteries de 10 à 12 MW et quatre groupes électrogènes alimentés soit par du GNL ou du méthanol. Cela permettra de décarboner les traversées maritimes et de passer sur batteries une fois à quai en Corse », a précisé Jean-Emmanuel Sauvée, le nouveau président du conseil d’administration de la Méridionale et de la division Transports maritimes spéciaux. Durant la période transitoire, les navires seront alimentés par du carburant à 0,1 % de soufre. Le refit des Girolata et Kallisté est à l’étude, les choix technologiques devraient être affirmées en septembre.

Dans la course à la décarbonation, la Méridionale a un statut de pionnier. Dès 2016, la compagnie a annoncé vouloir brancher un navire au courant électrique. Huit ans plus tard, le courant de quai se généralise dans le port de Marseille permettant aux ferries en escale de couper les moteurs. Impossible en Corse faute de réseau électrique suffisant, la société marseillaise a présenté en 2018 à Ajaccio un système de fourniture d’électricité mobile produite à partir du GNL. Faute du feu vert de l’administration pour transporter le conteneur GNL, le projet a dû être abandonné. Mais son grand fait d’arme reste le filtre à particules installé sur le Piana. Revendiquée comme une première mondiale, le système permettrait d’abattre 75 % des oxydes d’azote et de piéger tous les autres polluants y compris les particules fines et ultra fines à 99,9 %. Un deuxième navire de la flotte pourrait être équipé.

Corsica Ferries aux carburants alternatifs

Corsica Ferries est pragmatique et n’exclue aucune piste: « Cela va de solutions immédiates telles que la réduction de la vitesse ou l’optimisation des traversées au branchement à quai qui sera opérationnel à Toulon très rapidement. Nous étudions aussi la possibilité d’intervenir sur les coques, les hélices… La gestion des systèmes consommateurs d’énergie à bord et des mesures relevant de la sobriété énergétique sont aussi des gisements d’économie. Nous prêtons en outre une attention particulière aux carburants alternatifs en partenariat avec les fournisseurs d’énergies et les motoristes », confie Pierre Mattei. Au regard des investissements à engager, le verdissement de la flotte est un réel challenge sur le marché de prix qu’est la Corse. La vraie bataille entre les trois armateurs ne se joue plus seulement sur les traversées Corse-continent, la Méditerranée est leur nouveau terrain de jeu.

La France en transition

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