CAP vers le navire sans pétrole

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Les propriétaires et exploitants de navires devront finaliser dès cette année des décisions d’investissement qui auront un impact sur les émissions de gaz à effet de serre pour les 25 à 30 prochaines années, soit la durée de vie d’un navire. À en juger par le bilan des commandes passées l’an dernier, des arbitrages commencent à s’opérer.

« 2023 devrait résoudre la grande énigme du transport maritime: le choix du carburant pour la prochaine génération de navires », avait avancé, dès les premiers jours de l’année, Carl Schou, président de Wilhelmsen Ship Management, convaincu de la montée en puissance du méthanol dans les arbitrages à venir.

Biométhane liquéfié ou Bio-GNL, biocarburants, e-fuels, méthanol, ammoniac, etc., quel que soit le carburant de rupture conforme à l’OMI 2050, les principaux obstacles à son adoption restent la disponibilité, la compétitivité et la maîtrise de la technologie. L’intensité carbone du transport maritime à réduire de 40 % d’ici 2030 par rapport aux niveaux de 2008 – dont la mesure diffère de celle d’une simple réglementation sur les émissions – fait tousser. D’où la ruée pour des valeurs éprouvées tel que le GNL et/ou la conviction de plus en plus partagée que la solution réside dans un savant mix.

« Nous aurons besoin de tous les carburants, ammoniac, méthanol, ou tout autre moyen de produire des carburants à base d’hydrogène », avance Margaux Moore, responsable du groupe de recherche sur la transition énergétique chez le grand négociant de matières premières Trafigura, qui se refuse à voir la situation comme une « course de chevaux » entre les carburants. Même si certains partent avec des prédispositions plus favorables. Le méthanol est de ceux qui attirent l’attention car il peut être transposé assez facilement dans l’environnement marin et l’investissement en capital est « relativement faible ». Compatible avec l’infrastructure actuellement disponible, il ne nécessitera pas, contrairement au GNL, de réservoirs cryogéniques. « Pour rester conforme aux limites de plus en plus strictes des émissions de carbone, un navire fonctionnant au méthanol pourra mélanger des quantités appropriées de méthanol bleu ou vert en cas de besoin, sans nécessiter de modifications techniques », ajoute Christos Chryssakis, directeur du développement commercial chez DNV, tout en se gardant de faire mention de la disponibilité future du méthanol bleu et vert. « Le coût de construction d’un navire est moins élevé, la conception est plus simple et le carburant est plus facile à manipuler que le GNL, l’ammoniac ou l’hydrogène, par exemple. »

Un besoin de financement de 2 400 Md$

Selon Clarksons, l’augmentation des investissements dans les carburants alternatifs était déjà manifeste en 2022. Plus de la moitié du tonnage commandé l’an dernier était constituée de navires à double motorisation avec le GNL (397 commandes, 36,7 millions de jauge brute), un peu moins de 11 % avec l’ammoniac (90 commandes, 7,7 millions de GT), 7 % avec le méthanol (43 commandes, 5 millions de GT), 1,1 % avec le GPL (17 commandes, 0,8 million de GT) et 1,2 % avec les batteries hybrides. De façon plus marginale, 0,1 % du total à l’hydrogène.

Le financement reste un sujet. Le verdissement de la flotte de commerce nécessiterait la somme vertigineuse de 2 400 Md$. Or la capacité financière annuelle allouée au shipping par les organismes financiers s’établit en moyenne à 500 Md$ selon Petrofin, qui établit un baromètre annuel sur le financement du shipping. En mars, le Crédit suisse s’est effacé derrière USB. La banque figure parmi les dix premiers bailleurs du transport maritime. Une incertitude de plus alors que les banques européennes ont largement déserté le terrain, le laissant aux banques asiatiques. Les armateurs français peuvent néanmoins encore compter sur les banques tricolores. BNP Paribas (19,8 Md$ en 2021 vs 21,5 Md$ en 2020) et le Crédit agricole CIB (13,5 Md$, niveau stable) figurent parmi les six premiers financeurs mondiaux.

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