« Avec cette acquisition, MSC adopte une approche plus agressive en Europe. En France, il marche sur les plates-bandes de l’acteur local [Ceva logistics/CMA CGM, NDLR], tout comme il l’a fait sur le port de Hambourg avec Hapag-Lloyd », explique Peter Sand, ex-Bimco, l’une des plus grandes associations d’exploitants de navires, aujourd’hui chez Xeneta, société dont l’indice suit les taux de fret.
Peter Sand fait référence à une prise de participation polémique de l’Italien. Son entrée (49,9 %) au capital du plus grand opérateur portuaire de Hambourg, Hamburger Hafen und Logistik (HHLA), dont Hapag-Lloyd est le principal client, a fait des vagues outre-Rhin, avec en chef de file de la meute, Klaus-Michael Kuehne, l’actionnaire principal de l’armateur allemand et du commissionnaire suisse Kuehne+Nagel, un des leaders mondiaux dans la commission de transport.
« Ces petites acquisitions dans le secteur de la logistique peuvent être un moyen de renforcer sa présence stratégique sans lancer une grosse opération lourde, estime-t-il. Mais pour le spécialiste, si les grandes entreprises de transport maritime veulent vraiment jouer un rôle plus important dans la logistique et s’approprier une plus grande part du marché, elles doivent mettre la main à la poche et acheter un grand transitaire bien établi. »
Début décembre, le président du conseil d’administration, Yves Revol, et sa holding Olymp, contrôlant Clasquin, sont entrés en négociations exclusives avec Shipping Agencies Services (SAS), le véhicule financier du groupe MSC, en vue de la cession de l’intégralité de leur participation (42 %). En fonction de l’audit en cours, SAS pourrait faire une promesse d’achat dans le courant du premier trimestre 2024. Le prix des actions serait déterminé sur la base d’une valeur d’entreprise de 325 M€.
Après l’acquisition du bloc de contrôle, MSC exercera une OPA portant sur le solde des actions, les 44,5 % en flottant. Si l’opération allait à son terme, le commissionnaire serait alors retiré de la cote où il a été introduit en 2006.
MSC mettrait la main sur l’une des rares ETI française dans le secteur du freight forwarding. Elle lui offrirait une mise à l’échelle rapide et à coûts limités.
En 2022, Clasquin a enregistré un chiffre d’affaires de 877,10 M€, dont 12 % réalisés sur le continent africain, où le groupe lyonnais monte en force depuis deux ans, notamment dans le transport routier et roulier sur l’axe Europe-Afrique grâce à quelques opérations de croissance externe. La dernière concerne la société marocaine Timar, spécialisée dans le transport international et la logistique, dont il a pris le contrôle (63,52 %).
Avec cette transaction, Clasquin a renforcé son implantation en Afrique (neuf pays). Cet ancrage africain est un point d’accroche supplémentaire pour MSC qui peut ainsi étoffer l’empire de l’ex-BAL. Connu pour sa diligence à préserver ses intérêts commerciaux avec sa clientèle de transitaires et commissionnaires, l’armateur MSC ne semble plus avoir les mêmes pudeurs.
Adeline Descamps