Consciente que la performance de ses exportations maritimes dépend de celle de sa logistique terrestre, la filière céréalière, fédérée au sein de l’organisme Intercéréales, a mis sur pied le programme Coesio, acronyme de « Construire et organiser ensemble un schéma inter-filière optimisé. » La nécessité de cartographier l’ensemble des flux de céréales a émergé lorsque les délégations interministérielles installées sur les hinterlands portuaires ont sollicité un certain nombre d’informations sur les axes logistiques. « Nous avons alors réalisé que la filière n’avait pas de vision agrégée de l’ensemble des flux », indique Samuel Carpentier, responsable logistique d’Intercéréales. Mieux connaître les flux de céréales permet aussi d’optimiser l’utilisation des moyens de transport massifiés, dans un contexte où la cale fluviale comme les sillons ferroviaires sont denrée rare. Initié à partir de juillet 2021, le programme Coesio vise à accroître la prévisibilité de ces flux, en commençant par l’axe Seine et le port de Rouen, haut lieu de l’exportation des céréales exploitant les trois modes d’acheminement (fleuve, route, fer). Le groupe de travail est constitué d’une douzaine d’acteurs qui représentent environ 85 % des flux de céréales de l’axe Seine: organismes stockeurs, négociants et industriels, dont Soufflet et Sénalia par exemple.
Première opération: la constitution d’une carte des flux qui permet désormais à chaque chargeur d’identifier quand ses flux croisent ceux des autres acteurs.
« Ces données sont tellement stratégiques qu’il a fallu convaincre », souffle Samuel Carpentier. Un partenaire technique a joué le rôle de tiers de confiance, garant de l’anonymisation des données pour préserver le caractère confidentiel des flux de chaque entreprise. « Nous avons aussi accès aux données de VNF et SNCF Réseau, pour connaître la disponibilité des infrastructures. Nous travaillons avec les transporteurs ferroviaires pour situer leurs matériels. Pour le fluvial, VNF localise déjà les barges et, grâce à son travail sur les retours à vide, a une connaissance de la nature des marchandises transportées, ce qui n’est pas toujours le cas de SNCF Réseau. Le plus compliqué, c’est le transport routier où les flux sont très dispersés. »
Le travail de Coesio se base d’une part sur la prévision des flux, en fonction des contrats à exécuter dans les semaines à venir, d’autre part sur les moyens logistiques disponibles, et enfin sur le pilotage des stocks. Cela évite les temps d’attente au chargement ou au déchargement et permet d’optimiser les moyens. Cette bonne connaissance des flux pourrait aussi aider à réduire les retours à vide, ou encore permettre de mieux flécher les investissements nécessaires.
Une fois l’outil rendu opérationnel sur l’axe Seine, le déploiement à l’échelle nationale est prévu dans le courant de l’année 2024. L’ouverture à d’autres filières est aussi envisagée. Ce qui n’est pas accessoire dans l’optique de trouver du fret retour en chargeant par exemple des engrais ou des granulats.