Il y a quarante ans, le 7 mars 1980, une nouvelle catastrophe frappait les côtes nord de la Bretagne. À peine deux années après le naufrage de l’Amoco Cadiz devant Portsall, le Tanio coulait à une centaine de kilomètres de là, au nord de l’île de Batz, une fois encore dans le Finistère. Le pétrolier, qui battait pavillon malgache, avait été construit en 1958 aux Pays-Bas et s’appelait alors le Lorraine.
Le navire était parti de Wilhelmshafen en Allemagne, affrété par la SFTP, Société française des transports pétroliers, pour rejoindre l’Italie. Dans ses cuves, 900 t de fioul de propulsion et 26 000 t de fioul lourd n° 2, un produit visqueux et collant qui doit être réchauffé en permanence par des serpentins afin de lui garder sa fluidité. À bord, 39 marins, état-major français, personnel d’exécution malgache.
Alors qu’il s’apprête à sortir de la Manche, le navire est pris dans une violente tempête et se casse en deux. La partie avant coule, emportant avec elle huit membres de l’équipage, dont quatre officiers. La partie arrière se maintient à flot. Les 31 marins qui s’y trouvent sont sauvés par un hélicoptère Super Frelon de la marine nationale.
L’Abeille Languedoc, qui assure la station à Cherbourg et se trouve à ce moment dans le nord de Guernesey sous les ordres de Jean Bulot, est dépêchée sur place. Dans des conditions très difficiles, un vent de noroît force 10 à 11, une mer grosse, le remorqueur parvient, grâce au courage de l’équipage, à prendre en remorque la partie arrière du navire scindé et la conduit au Havre avec les 7 500 t de pétrole restant dans ses cuves. Mais les 10 000 t encore contenues dans la partie avant du navire se répandent le long des côtes de Bretagne sur près de 200 km, causant un désastre écologique et économique. Des milliers d’oiseaux seront les victimes de cette nouvelle marée noire. D’importantes opérations sont entreprises durant quinze mois et permettent de récupérer environ 5 000 autres tonnes.
Cependant, malgré le colmatage des brèches, le Tanio vient encore de faire parler de lui quarante ans après. Des traces d’hydrocarbures relevées récemment sur des oiseaux marins et sur des plages présentaient, selon le Centre de recherches sur les pollutions à Brest (CEDRE), d’étranges similitudes avec le produit transporté par le Tanio. Des plongées d’investigation ont été réalisées. Deux orifices percés en 1980 pour pomper ce qui restait de la cargaison après le naufrage et alors équipés de vannes laissent encore échapper du pétrole.