Nouvelle plateforme intermodale, lancement d’une autoroute ferroviaire, trafic de clinker par le rail… Le port de Sète s’affirme comme un outil intermodal autour du canal de Rhône à Sète et son embranchement fer. L’intermodalité figure parmi les orientations majeures de son plan stratégique 2021-2025. « L’offre multimodale est l’un de nos arguments commerciaux, indique Olivier Carmès, le directeur général. Les chargeurs réfléchissent de plus en plus à transporter les remorques et conteneurs par voie ferroviaire. » En 2019, sur les 4,3 Mt traitées, 10 % ont été acheminées par voie ferroviaire (407 000 t) et 5 % par le fluvial (220 000 t). « L’objectif est de passer de 15 % de report modal aujourd’hui à 25 % en 2025 », déclare Jean-Claude Gayssot, président de l’EPR Port Sud de France.
Parmi les nouveaux trafics, certains passent uniquement par le rail, comme ce clinker arrivant de Turquie. RegioRail, filiale du belge Eurorail et de l’américain Railroad Development Corp., a ainsi ouvert en septembre une ligne qui transporte des conteneurs de clinker et relie le port de Sète et la nouvelle usine Aliénor Ciments de Cem’In’Eu, à Tonneins, dans le Lot-et-Garonne. « En 2019, nous avons traité 17 trains de 1 600 t chacun », détaille Arnaud Rieutort, directeur commercial du port. Mais ce trafic a été percuté, peu après son lancement, par la grève SNCF. « Depuis plusieurs semaines, le clinker est transporté par camions, indique un dirigeant de Cem’In’Eu, qui espère que la fin de la grève est proche. Nous restons convaincus de la pertinence du mode ferroviaire. Tout notre concept est basé sur cette conviction. 120 000 t de clinker devraient être transportées cette année sur des trains. »
Gain de 16 heures
Après les 38 826 remorques réceptionnées en 2019, le port table sur 80 000 en 2020. Aujourd’hui, un peu moins d’un tiers d’entre elles quittent le port par le train. L’objectif est d’atteindre 50 % d’ici deux ans, soit 40 000 remorques. Pour ce faire, l’EPR Port Sud de France et la Région Occitanie, propriétaire du port, vont investir 10 M€ dans le transfert-extension de l’actuelle plateforme ferroviaire (cf. ci-contre). Des trains de plus de 750 m de long circulent déjà, d’une capacité de 48 unités de transport intermodales (UTI), soit 36 remorques et 12 conteneurs. Le nouveau quai H est en outre « adapté au trafic ro-ro. Les marchandises peuvent être évacuées rapidement grâce à cet équipement », observe Arnaud Rieutort.
À la demande de l’armateur danois DFDS et du transporteur turc Ekol, Viia, filiale de SNCF Logistics, a lancé fin 2019 une liaison ferroviaire de Sète vers Calais, à raison de quatre trains par semaine, soit huit allers-retours, pour transporter des semi-remorques de Turquie vers la Grande-Bretagne, ainsi que des caisses mobiles. La liaison est effectuée en 20 heures, au lieu de 36 heures par la route. Elle offre aussi aux clients routiers une nouvelle connexion entre services maritimes du nord et du sud de la France. Les grèves SNCF ont cependant interrompu le projet. Sollicité, Thierry Le Guilloux n’a pas donné suite à nos demandes
Multi-lots et multi-clients
Pour développer l’intermodalité, un expert du transport juge indispensable l’intégration de nouveaux services ferroviaires. « L’acteur historique, Modalhor, va d’un point A à un point B, ne s’arrête pas et génère des immobilisations de camions pendant une demi-journée. Il faut des solutions qui rendent le transporteur routier autonome. Le camion doit pouvoir poser la remorque sur des palettes, puis aller faire autre chose, sans devoir attendre l’arrivée du train. » Sète veut également « migrer vers du multi-lots et du multi-clients. » Michel Colombié, président de l’observatoire régional des transports Occitanie, suggère quant à lui la création de bases arrière mutualisées entre ports. Elles pourraient être spécialisées, par exemple dans le traitement des conteneurs.