Lorsqu’il s’agit d’évoquer la concurrence sur le marché du conteneur, Baptiste Maurand, directeur général d’Haropa Port du Havre, file la métaphore footballistique. Le Havre, avec un trafic de 2,9 MEVP en 2018, maintient sa 5e position dans le classement des ports nord-européens, avec une part de marché de 6,5 %. « Il est important de figurer dans la Champions League. Je ne pense pas qu’il y ait un risque de décrochage car nous sommes durablement positionnés. Sur le conteneur, Haropa enregistre la marge de progression la plus intéressante en Europe depuis quelques années. Nous gagnons des parts de marché. Et il n’y a jamais eu de baisse de régime en termes d’offre maritime. Les clients nous font confiance. Nous avons donc de la visibilité. Les ports nord-européens dans leur globalité se distinguent surtout par leur offre maritime plus que par leurs volumes. Et elle repose principalement sur la présence des trois plus grandes alliances armatoriales. Ils s’en servent pour rayonner à l’international ».
Le dirigeant regarde peu les classements des ports à l’échelle mondiale – « on compare souvent des choux et des carottes » – et préfère observer ce qui se passe sur le range nord-européen, là où les armateurs font des choix d’escales et développent des services à l’import comme à l’export.
Dans son observation, il note qu’il n’y a pas eu le tsunami attendu dans les ports européens, découlant de la montée en puissance des alliances maritimes, du reste présentes au Havre
Haro sur les services
Pour maintenir sa place sur le marché du conteneur, bien positionné à l’export notamment vers l’Amérique, Haropa fait face à la concurrence en se positionnant en tant que port d’axe, un élément qui fait mouche selon le responsable. « En Asie par exemple, l’argument commercial fort est de dire que la barge fluviale peut toucher Rouen et aussi le cœur du bassin parisien avec Gennevilliers. Avec l’axe Seine, nous disposons d’un corridor. Le fait d’avoir un seul interlocuteur pour trois ports, ce qui sera le cas demain avec une direction intégrée, est impactant ».
Autres arguments que fait valoir « l’acteur majeur dans notre politique portuaire et maritime », selon les mots du Premier ministre Édouard Philippe, est l’intermodalité à l’échelle de l’axe Seine et sa politique d’investissements dans les infrastructures, sur Port 2000, haut lieu des conteneurs au Havre. « Les clients ont besoin d’une visibilité à moyen et long terme. Nos échanges avec eux permettent d’assurer la durabilité de la relation ». Haro sur la notion de services. Baptiste Maurand va visiblement loin dans cette logique, estimant que les ports ont un rôle à jouer dans l’équilibre du modèle économique des armateurs.
Avec les nouvelles échéances réglementaires, le coût du bunker devient prégnant. Il rappelle à ce propos que l’accélération et décélération en entrée et sortie de port n’est pas neutre. « Les ports peuvent contribuer à réduire leurs coûts en étant pourvoyeurs d’informations. Il peut s’agir par exemple de leur donner l’horaire auxquels ils pourront entrer sur le chenal ou dans le port. Les ports européens construisent des systèmes communs pour pouvoir échanger des informations sur les flux ».
Sisterports
Certains sujets permettent aussi d’avoir un temps d’avance par rapport aux autres ports. Des collaborations, autres que commerciales, peuvent naître avec ce que l’autorité portuaire havraise appelle des « sisterports ». « Avec le port sud-coréen d’Incheon, nous avons un partenariat technique sur le GNL, la digitalisation portuaire ou la croisière. On peut apprendre des choses mutuellement ».
Enfin, Le Havre entend soigner son offre fluviale, « les performances en la matière doivent être améliorées ». 25 % des conteneurs entre Le Havre, Rouen et Paris empruntent aujourd’hui le fleuve. La Seine et le Rhin sont deux corridors qui offrent des systèmes logistiques concurrents, l’un sur un axe nord-sud et l’autre ouest-est. Baptiste Maurand note que ces axes ne desservent pas les mêmes bassins et que le Rhin est confronté à des phénomènes récurrents de basses eaux. « Cette situation a des conséquences importantes sur les systèmes logistiques du centre de l’Europe, qui se reportent sur d’autres modes de transports. La Seine n’est pas soumise à ce type de phénomène et doit pouvoir tirer son épingle du jeu. Les plateformes multimodales sont des atouts pour des logisticiens qui souhaitent s’implanter. Dans moins d’une décennie, le passage fluvial sera incontournable y compris du point de vue des coûts »
Terminal de France
Opérateurs: Général de Manutention portuaire (avec CMA CGM)
Longueur de quai: 1 200 m + 200 m pour les barges
Tirant d’eau à marée basse: 15,30 m
Équipements: Dix portiques overpanamax
Terminal Porte Océane
Opérateur: Perrigault
Longueur de quai: 700 m
Tirant d’eau à marée basse: 14,5 m
Équipements: 4 portiques superpanamax; 2 portiques overpanamax
Terminal de Normandie
Opérateurs: Terminaux de Normandie (avec MSC)
Longueur de quai: 1 400 m de linéaire de quai
Tirant d’eau à marée basse: 16 à 17 m
Équipements: 5 portiques superpanamax; 2 portiques overpanamax
* Ocean Alliance (2 services Asie/Europe + 1 service transatlantique), THE Alliance (3 services Asie-Europe), 2M (2 services Asie-Europe + 2 services transatlantiques).