« Nous savons depuis un moment que le secteur va être fortement touché, en particulier le segment des conteneurs », rappelle Christian Schadow, responsable de l’économie portuaire à la direction fédérale du grand syndicat des services Verdi: « Eurogate, qui mène actuellement divers projets pilote avec des grues et des chariots autonomes, a calculé que ces évolutions pouvaient toucher près de la moitié des emplois, soit 2 500 personnes. Nous avons donc vite compris qu’il allait falloir prendre les choses en main et se serrer les coudes pour éviter la casse sociale ». À l’instar de la Confédération des syndicats allemands (DGB), le syndicat Verdi est favorable à l’arrivée de ces nouvelles technologies dans l’entreprise. Mais il estime que la meilleure approche est d’investir une partie des bénéfices générés par l’automatisation dans la requalification des salariés. Pour sa part, la direction du manutentionnaire, qui craint une pénurie de main-d’œuvre, partage la même analyse. L’opérateur et ses partenaires sociaux ont décidé de réagir ensemble et de manière proactive en négociant un accord collectif, entré en vigueur le 1er janvier 2019 et valable pour une durée de 10 ans.
Droit de veto complet
Au cœur du dispositif, une commission paritaire pour l’automatisation qui est dotée, et c’est l’une des principales nouveautés, d’un droit de veto complet pour tous les projets d’automatisation affectant plus de 10 % des salariés concernés par le périmètre du projet. « Elle est composée de huit membres, sur proposition à parts égales par la direction et les représentants des salariés. Toute décision doit être prise à la majorité des trois quarts. Et tout projet doit comprendre une évaluation des conséquences sur l’emploi et d’un principe de maintien/replacement des salariés dans l’entreprise. Et aucun projet ne peut être accepté sans l’accord de la commission et du CE », détaille Christian Schadow. « L’accord pour le Futur » contient des conditions plutôt généreuses. Selon les besoins, le temps de travail hebdomadaire pourra être réduit de 5 heures/semaine, sans diminution de salaire. L’introduction de temps partiel mais aussi de départ en retraite anticipée sont également possibles. Par ailleurs, au cas où un salarié ne pourrait conserver son emploi dans l’entreprise qu’à un poste moins bien rémunéré, Eurogate s’engage à lui verser son salaire antérieur pendant 5 ans. Aussi, toute mobilité, qui serait contrainte, sera accompagnée d’une prime de 12 000 €. Enfin, tout salarié, dont le poste sera touché par des mesures d’automatisation, a droit à des formations aptes à le maintenir dans l’entreprise.