Lyon-Turin vu par les Italiens…

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Le gouvernement italien, ou plus exactement l’actionnaire principal en termes de poids électoral, le Mouvement 5 Étoiles (M5S), a été clair: on ne parle plus de la LGV qui doit relier Lyon à Turin avant le 27 mai. Soit le lendemain des élections européennes, un rendez-vous crucial pour l’Union européenne et les deux partis au pouvoir depuis près d’un an, le M5S et la Ligue. Cette dernière, favorable à l’infrastructure, veut mettre le pied sur l’accélérateur et boucler au plus tôt le chantier pour répondre aux vœux des PME implantées au nord du pays et qui forment le socle de son électorat. Pour sa part, le M5S voudrait bien enfouir le dossier au fond d’un tiroir et le laisser prendre la poussière pour satisfaire ses électeurs écologistes. Attendre l’issue du scrutin européen pour trancher sur l’avenir du Lyon-Turin et reprendre langue avec Paris qui s’impatiente relève bien du calcul politique, les deux alliés au pouvoir attendant de voir à quelle sauce ils seront mangés par leurs électeurs.

Pour l’heure, la messe n’est donc pas encore dite mais une chose au moins est certaine: l’interruption des travaux coûtera très cher à la péninsule qui devra alors signer des chèques à l’UE et à la France pour rembourser les fonds débloqués. Une somme de plus ou moins 2 Md€ avec les intérêts est évoquée. Sachant que l’UE a avancé 700 M€ puis 813 M€ dans le cadre du programme Ten-T 2014-2019 (Mobilité et Transport) tandis que la France a engagé quelque 350 M€ pour les études préliminaires, selon les estimations de Paolo Foietta, commissaire délégué à l’axe ferroviaire Lyon-Turin. Il faudra y ajouter les frais et indemnités à verser aux entreprises au titre de l’arrêt des travaux.

Doper les ports italiens

Du côté économique, les PME italiennes plébiscitent largement l’ouvrage et en sont à ce jour à espérer que l’ardoise à régler poussera le M5S, qui brandit sans cesse l’étude mandatée par le ministère des Infrastructures et des Transports sur la rentabilité du Lyon-Turin, à revoir ses positions. Ces derniers mois, les opérateurs du secteur maritime se sont insérés dans le débat, relayant peu ou prou les mêmes arguments: alléger le trafic routier, accroître le transit de conteneurs, doper les ports italiens, notamment dans la région de la Ligurie. « La question ne se pose pas en ces termes. Il ne s’agit pas de dire oui ou non au Lyon-Turin, estime Stefano Messina, président d’Assarmatori, l’association des armateurs italiens. Sans une bonne connexion ferroviaire, les ports risquent d’être rapidement à court d’oxygène. Ce dont on a besoin, c’est construire, et rapidement, un réseau ferré de lignes à grande vitesse ».

« Il est certain que toute infrastructure produit des effets mais on ne peut pas estimer d’emblée les répercussions immédiates sur le trafic maritime, il faudra attendre un peu », avance prudemment Maurizio Longo, secrétaire général de Trasportounito, l’association nationale des transporteurs. Pragmatique, il ajoute qu’au vu des dépenses importantes déjà engagées, la péninsule ne peut plus faire marche arrière et devra terminer les travaux sur le versant italien. La ligne Lyon-Turin peut compter sur le soutien inconditionnel de Mino Giachino. Cet ancien sous-secrétaire aux Transports du gouvernement Berlusconi dans les années 2000, aujourd’hui président de Saimare, l’une des plus importantes sociétés de transport international du pays, a participé à l’organisation des grandes manifestations dans le Piémont pour défendre la « TAV », l’appellation italienne du Lyon-Turin. Il milite aussi en faveur de la remise en état des infrastructures obsolètes, notamment dans la partie Nord du pays. « La construction du troisième corridor à Gênes peut garantir des liaisons importantes avec Lyon mais seulement grâce à celle du réseau à grande vitesse qui reliera Lyon à Turin. L’analyse des coûts et bénéfices commandée par le gouvernement aurait dû tenir compte de cet aspect car une partie des marchandises transitera par ce corridor et desservira la Lombardie et les ports de la Ligurie », assure Mino Giachino. Il ajoute: « réfléchissons bien aux retombées logistiques du Lyon-Turin notamment pour les ports de Gênes et de Savone. Ils bénéficieront de l’augmentation du volume de conteneurs et plus globalement de celle du trafic ferroviaire, qu’on estime de l’ordre de 30 % ».

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