« Toutes les bonnes choses viennent par trois », s’amuse Sebastian Wenzel, l’ingénieur-projet chez l’armement combi-lift en charge de la spectaculaire livraison à Rouen de trois portiques de chargement pour le terminal céréalier Senalia de Grand-Couronne à Rouen.
« Comme toujours dans le secteur du colis lourd, chaque expédition est un défi et est assortie d’exigences inédites », explique-t-il. Et en l’occurrence, le client voulait une solution qui « permette de livrer trois portiques de 216 t, aux dimensions de 39,9 × 15,5 × 33 m chacun, à leur destination finale en un seul voyage », poursuit-il. C’est le MV Palmerton, navire spécialisé dans les colis lourds de la compagnie allemande, qui parut le plus adapté. « Cette solution exigeait des mouvements spécifiques, et parfois difficiles, à cause des flèches des portiques à mettre dans leur position finale. Des analyses 3D ont été effectuées au préalable pour trouver la meilleure position ». Il aura fallu 189 m de rails sur le pont pour garantir un arrimage sûr. Le centre de gravité des trois portiques était un autre des points critiques pour la stabilité du navire, explique l’ingénieur de l’entreprise.
Installés depuis le 17 décembre dernier sur le site de Grand-Couronne, mis en service le 4 février dernier, les portiques construits par l’entreprise allemande Neuero « sont des portiques de chargement de dernière génération que nous sommes les premiers à acquérir », fait valoir pour sa part Senalia, qui va ainsi pouvoir recevoir des navires de 260 m de long et de 46 m de large, avec un tirant d’eau jusqu’à 12 m.
Une histoire ancienne
La société basée à Hambourg s’est progressivement imposée comme un spécialiste dans l’acheminement maritime des colis lourds et hors gabarit. L’origine de cet armement remonte à 1865 lorsque des marins, les frères Heinrich, entreprirent de développer à Hambourg une activité de transport maritime. Mais ce n’est qu’en 1980, avec la création par leurs descendants de la Schiffahrtskontor Altes Land, que l’entreprise se lancera avec un flair indéniable dans le transport maritime des colis lourds industriels. S’y consacrant exclusivement, elle en tirera une notoriété mondiale sur un créneau particulièrement spectaculaire, et très rentable, de l’industrie du shipping.
En 1984, SAL Heavy Lift prendra possession de son premier navire autonome équipé d’une grue de 60 t de capacité de levage. En 2007, l’armement entrera dans le giron du groupe japonais K-Line. Puis en 2017, il sera acquis par Harren &Partner basé à Brême qui, avec l’apport de SAL, possède et exploite à présent une flotte de 21 navires multi-purpose.
La flotte aux couleurs de SAL compte désormais 18 navires spécifiquement conçus pour la manutention et le transport des charges lourdes, des « heavy lift vessels ».
Ces unités construites entre 1998 et 2011 affichent des caractéristiques pouvant atteindre 20 nœuds de vitesse, 3 500 m2 de surface homogène sur le pont principal, 2 000 t de capacité combinée de levage… En avril 2018, SAL Heavy Lift et le néerlandais RollDock ont fusionné leurs moyens au sein d’un pool comptant 6 unités de type « geared dock vessels ».