« L’intermodalité et la massification sont l’alpha et l’oméga de ce marché »

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Vous êtes le manutentionnaire d’AcelorMittal à Fos et vous avez développé depuis quelques années un département breakbulk. Pourquoi?

Jean-Claude SARREMEJEANNE: Arcelor Mittal représente une part importante de notre activité, avec en entrée, environ 9 Mt par an et 130 escales de vracs sec, charbon ou minerai à destination de l’usine ArcelorMittal, et en sortie, 2,4 Mt en conventionnel, bobines d’aciers et brames. Pour ne pas dépendre d’un seul client, on s’est lancé sur le marché du conventionnel/colis lourd dès 2012. Ce segment était peu couvert. Il représentait, compte tenu de notre profil de manutentionnaire, une opportunité suffisamment technique pour nous intéresser tout en offrant une activité d’ajustement. Nous avons ainsi porté notre capacité de levage à 300 t en combinant deux grues, dont une de 250 t. Nous avons investi dans la formation et des profils qualifiés car, dans la logistique portuaire de colis lourds, le savoir-faire et la technicité font la différence. Nous sommes également partie prenante du financement d’une rampe ro-ro d’une capacité de 800 t inaugurée fin 2017 en darse Sud (le projet expérimental de fusion nucléaire Iter est prioritaire sur cet ouvrage, Ndlr). Aujourd’hui, nos activités – vracs sec, conventionnel acier et project cargo – génèrent 750 escales de navires sur nos trois terminaux.

Quels sont vos indicateurs pour apprécier ce marché?

J-C. S.: Le conventionnel/colis lourds représente autour de 10 % de l’activité globale. Mais il faut raisonner différemment. Chaque opération est du cousu-main. Le nombre et la durée des escales ainsi que la typicité des produits sont nos baromètres. Néanmoins, nous considérons qu’avec une cinquantaine d’escales par an, nous sommes au point bas de nos potentialités. L’année 2016-2017 fut un bon exercice (un trafic de conduites de gaz en provenance de Turquie avait offert à l’entreprise 10 000 t cette année-là, Ndlr). Depuis, nous sommes sur une petite croissance et il en sera de même en 2019, notamment du fait de la faiblesse du marché « oil & gaz ». Mais notre partenariat avec Daher Technologie sur le projet Iter (Sosersid est le seul manutentionnaire, Ndlr), l’éolien offshore, les mutations industrielles des bassins Ouest de Marseille-Fos ou encore la réparation navale à Marseille offrent de belles perspectives.

Vous animez un groupe de travail sur le conventionnel au sein de l’UMF. Pourquoi vous être investi dans cette dynamique?

J-C. S.: L’UMF et Via Marseille-Fos (association de promotion commerciale de l’axe rhodanien) ont initié un travail de réflexion par filières, en y associant des professionnels. J’ai pris la présidence d’une commission pour y travailler dans un esprit de « place portuaire Marseille-Fos ». Notre zone de chalandise est bien l’hinterland de Fos-sur-Mer, de Lyon jusqu’à Chalons. L’outil majeur est le fleuve. Cependant, il faut que les clients connaissent notre offre. On y a d’abord fait un gros travail d’explication entre manutentionnaires et on va vanter les atouts du port dans tous les salons spécialisés dont les Breakbulk conférences. C’est une démarche qui paie.

Pour autant, le port de Marseille doit construire son offre sur le conventionnel. Vous avez des concurrents de taille à l’étranger, Anvers notamment, et en France, Nantes semble davantage profiter de son voisinage industriel tandis que Sète tire bien son épingle du jeu de l’éolien.

J-C. S.: Sur ce marché, le type de produit et la géographie portuaire sont les maîtres du jeu. Si vous avez un réacteur de 500 t, construit dans la vallée du Rhône, je ne vois pas d’autres solutions que de le descendre par le fleuve et Marseille Fos s’imposera. Pour des colis de 130 t, c’est différent. La route, le fleuve, le porte-conteneur, la ligne régulière sont tous potentiellement des concurrents.

Il nous manque ici des terre-pleins pour aménager des quais. Il y a un problème de tirant d’eau, qui doit être porté au moins à 12 m (10,5 m aujourd’hui). Une ou deux lignes « colis lourds » dédiées ne serait pas du luxe. Quant à Sète, doit-il son positionnement sur ce marché à son infrastructure portuaire ou au pré et post-acheminement?

L’intermodalité est votre cheval de Troie?

J-C. S.: On ne peut pas parler de colis lourds ou de project cargo sans évoquer ce sujet, même de façon exotique. L’activité breakbulk est multimodale par essence, y compris le maritime. Le fleuve est prépondérant, 50 à 60 % des trajets d’avant et d’après, mais le ferroviaire balbutie encore (son terminal en darse 3 est embranché fer, Ndlr). La massification et la récurrence sont l’alpha et l’oméga. Anvers a très bien réussi cela.

On annonce chroniquement la mort du conventionnel. Qu’en pensez-vous?

J-C. S.: Une chose est certaine. La volonté d’accueillir du colis lourd sur les porte-conteneurs a été décuplée ces dernières années, c’est une réalité. Mais il reste des limites techniques: la résistance des plafonds de ballast ou les capacités de levage… Je suis partagé sur la question car c’est à double tranchant. D’une part, plus on met du colis lourd ou du gros conventionnel sur des navires qui passent par Marseille, mieux la place portuaire se porte car on a une effet de massification qui rassure nos clients. Mais plus on en met sur du porte-conteneur, moins on en met chez Sosersid…

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