Depuis la généralisation du conteneur sur les principales routes maritimes de la planète, l’on chronique régulièrement la disparition du conventionnel. Ni vrac, ni conteneurs, échappant même à une définition communément admise, cet entre-deux modes, qui correspond à des marchandises voyageant « dans leur jus », en sortie d’usine ou de production, chargées dans des sacs ou cartons arrimés dans les navires, devait partir avec l’eau du bain de la conteneurisation.
Autrefois hégémonique, le conventionnel a incontestablement reflué, amputé d’une partie de ses marchés qui l’ont condamné à se contenter de niches de marchés. Mais en tirant parti de cette spécialisation contrainte, et en se polarisant sur la notion de service, il a gagné son droit à continuer de jouer et trouvé sa place en « agissant plus comme un taxi que comme un autobus ».
Taux de fret plus élevés
Les navires « à tout faire » n’ont jamais autant mérité leur appellation. Ils répondent de plus à plus à des demandes particulières – composants de projets industriels pour la construction d’une usine, des colis trop volumineux ou lourds – pour lesquelles ils offrent des solutions bien plus souples et adaptées que le conteneur et auxquelles aucun autre type de navire ne saurait répondre.
Plus lucratif que le conteneur selon les professionnels, car réservant des marges bénéficiaires grâce à des taux de fret plus élevés et la possibilité (encore) de facturer le savoir-faire requis par ce marché, le conventionnel continue d’attirer.
Signes de cet intérêt, certains armateurs maintiennent des lignes régulières pour des trafics pourtant adaptés au tramping. Des transitaires se sont spécialisés ou créé des départements ad hoc. Quant aux manutentionnaires et aux ports équipés, le levage spécifique de ce type de marchandises leur garantit une certaine fidélité des armements. Enfin, certains opérateurs fluviaux voient dans le « hors gabarit » une manière de se différencier et aussi, d’être rémunérés à plus juste valeur. Pour autant, la flotte de ces navires spécialisés tend à s’amenuiser. Reste le revers de la médaille à toute spécialisation: tous les segments de trafics composant le conventionnel restent extrêmement sensibles à leur environnement (conjoncture économique et industrielle, géopolitique, politiques publiques), donc aléatoires et cycliques. Ainsi l’éolien en mer devrait mettre un peu de vent dans les voiles si les politiques publiques sont conformes à leurs engagements…