Le port demeure un écosystème complexe, vivant et versatile. Sa gouvernance est au cœur de revendications légitimes pour exprimer des intérêts et défendre des propositions. Et dans bien des cas, à travers le monde, la tutelle régalienne et le centralisme politique continuent de chercher la « bonne formule » qui permettrait cette hypothétique synthèse, synonyme d’une gouvernance équilibrée et efficace. Plusieurs formules de mixité publique-privée ont été testées depuis les années 1980 avec notamment les Anglo-Saxons qui ont choisi différentes formules de privatisation des autorités portuaires (Grande-Bretagne, Australie, Nouvelle-Zélande, etc.). Cela n’a pas rendu lesdits ports supérieurement efficaces, attractifs et productifs. D’Anvers à Hambourg, huit siècles d’expériences hanséatiques semblent produire aujourd’hui la gouvernance la plus en phase avec les réalités concurrentielles maritimes et logistiques puisque l’autorité portuaire constitue une synthèse « glocale » avec municipalité et région qui travaillent de concert avec les tissus industriels et logistiques privés, sans oublier l’inclusion de la société civile et de la recherche universitaire. Mais ce « modèle » demeure difficilement duplicable comme le montre notamment l’ambition de la région Normandie de peser davantage dans la gestion des GPM du Havre et de Rouen alors même que le Premier ministre les considère comme des entités stratégiques indissociables de la tutelle étatique.
Autres dispositions mentales
À Barcelone, la municipalité revendique plus de représentativité dans la gouvernance d’un port qui attire près de 3 millions de croisiéristes! Le professeur canadien Brian Slack annonçait en 1993 que les ports ne devaient pas devenir des pions dans le grand jeu logistique et maritime international. Il convient pour cela de repenser la gouvernance avec d’autres dispositions mentales et idéologiques que celles qui animent aujourd’hui les débats.
Une gouvernance se doit d’être inclusive et visionnaire, prospective et stratégique, durable et performante. Pour cela, audace, prises de risque et innovation doivent se conjuguer dans les motivations de celles et ceux qui ont la décision portuaire. La gouvernance doit être le reflet le plus abouti du fonctionnement symbiotique d’un écosystème où les intérêts des uns fertilisent ceux des autres. Bien belle utopie pour sûr… Cela pourrait déjà commencer par vouloir vraiment construire des projets communs et collaboratifs, avec le sens de l’anticipation sur les besoins de demain. Gouverner ensemble et pas les uns comme les autres. Gouverner pour ne pas seulement administrer mais bien assumer l’ambition de coproduire les solutions de la transition énergétique, de l’économie circulaire, de l’écologie industrielle, de la chimie verte, de l’inclusion sociétale, de la performance logistique 4.0, du smart port, etc.