Frénésie dans les commandes. Surenchère dans les concepts. Déluge de technologies et d’innovations embarquées. Bataille de la géographie. Les années 2017 et 2018 ont été particulièrement denses pour l’industrie de la croisière. La flotte internationale de paquebots – composée de quelque 330 unités – aurait gagné 25 unités en 2018 selon l’association internationale des compagnies de croisière, Clia et 24 autres seront mis en service en 2019, selon les projections du rapport annuel 2019 de Cruise Industry News. Au total, entre 2018 et 2021, 66 nouveaux navires devraient sortir des cales sèches européennes qui tournent à plein régime. En 2017, elles ont facturé pour 5,6 Md€ (+ 22,4 % par rapport à une étude similaire de 2015), tant et si bien que les commandes effectuées auprès des chantiers ont représenté 22 % des 19,7 Md€ dépensés par l’industrie de la croisière en Europe. Les installations françaises en ont profité, engrangeant pour 945 M€ de travaux (+ 81 % sur deux ans), hissant l’Hexagone, toujours derrière l’Italie et l’Allemagne, mais devant la Finlande.
C’est le Mein Schiff 2 de TUI Cruises qui a ouvert le bal des livraisons de 2019 fin janvier. Le plus grand en taille à entrer en service cette année sera sans doute le Costa Smeralda, bien que challengé par le Grandiosa de MSC, attendu pour novembre. À l’autre extrémité de la flotte, avec ses 28 m de long et ses 71 convives, le Magellan Explorer de Polar Cruisessera probablement l’un des plus petits. Unique armateur battant pavillon français, Ponant accueillera une nouvelle « paire » de ses yachts d’expédition Explorer. Hapag-Lloyd Cruises prendra livraison de deux navires d’expédition, les Hanseatic Nature et Inspiration.
Abus de confiance?
Entre 2006 et 2017, le nombre de croisiéristes est passé de 15,9 à 26,75 millions de passagers, une goutte d’eau par rapport au 1,32 milliard de touristes mais au trend de croissance épousant celui du tourisme mondial (autour de 6 %).
Si les Caraïbes fournissent toujours 50 % de la clientèle mondiale, la part relative de la région est passée de 52 à 48 entre 2014 et 2017. Au cours de la même période, l’Europe a connu une croissance de 8,9 % du nombre de passagers (6,9 millions) mais sa part est passée de 27 à 26. Car avec un grand bond en avant de 140 % depuis 2014, l’Asie s’est arrogée 15 % du marché.
Symptomatiques, de nouvelles marques y émergent, à l’instar de l’indienne Jalesh Cruises, qui devrait opérer dès avril à partir de Mumbai, ou de la chinoise China Travel Service, au troisième trimestre. Quant aux grandes majors, le leader européen Costa a conçu à cet effet le Costa Venezia, actuellement en fin de construction chez Fincantieri à Monfalcone. Carnival et China State Shipbuilding (CSSC) sont allés plus loin en créant ensemble une compagnie de croisière. Basée en Chine, CSSC Carnival Cruise Shipping Ltd démarrera ses activités avec les ex-Costa Atlantica et Mediterranea, respectivement livrés fin 2019 et 2020, tandis que Shanghai Waigaoqiao Shipbuilding a reçu une commande pour deux unités à livrer en 2023.
Premier pays émetteur de touristes au monde, la Chine goûte encore peu à la croisière. « Elle devait devenir le plus grand marché de croisières au monde, indique le rapport de Cruise Industry News, mais une offre trop rapide, un modèle de distribution inadapté, un manque de différenciation des produits ont stoppé net la croissance. 2019 sera encore une année de réajustement ». Avant d’y arriver, à être le plus grand marché de croisières au monde?
Flotte européenne
40 compagnies domiciliées en Europe
137 paquebots de croisière
2 577 croisières proposées
Commandes
+ 122 navires entre 2018 et 2027
71 Md$ investis
66 navires en cales entre 2018 et 2021, dont 45 en Italie, Allemagne, France et Finlande.