« Notre notoriété n’est pas au niveau de nos ambitions »

Article réservé aux abonnés

Vous avez annoncé une croissance des passagers transportés de 10 % en 2018 et avoir franchi le cap des 34 000 clients. Était-ce conforme à vos objectifs?

Hervé Bellaïche: Début 2013, nous avions 3 navires. Nous en avions 7 fin 2018, dont les deux premiers yachts de notre gamme Explorers, Le Lapérouse et Le Champlain. Leur commercialisation et leurs résultats ont été parfaitement en ligne avec nos attentes. Le taux de remplissage est conforme à nos plans, entre 90 et 100 %. Présenter un taux de remplissage élevé alors que nous avons apporté de la capacité additionnelle est un vrai motif de satisfaction. En 2019, nous nous attendons encore à une croissance de l’ordre de 30 % par rapport à 2018, en lien l’arrivée de deux autres Explorers, Le Bougainville et Le Dumont d’Urville. Deux autres suivront en 2020., ce qui portera alors notre flotte à 12 navires d’ici 2021. Au total, nous visons 60 000 passagers à cette échéance pour 370 M€ de chiffre d’affaires.

La diversification des clients ne semble pas un sujet pour Ponant. Pourquoi?

H.B.: LaFrance est notre marché historique source mais qui reste très dynamique et fournit la clientèle de nos croisières en marque propre (un tiers de l’activité de Ponant est généré par l’affrètement, NDLR). Notre public est essentiellement francophone car nous cultivons cette image. Nous sommesla seule compagnie au monde avec un drapeau français qui flotte. Nos équipages parlent français. L’expérience à bord est inspirée par l’art de recevoir à la française, dans le raffinement du service, l’esprit, ou la gastronomie respectueuses de notre tradition culinaire.

Ponant articule toute sa communication sur l’image d’une compagnie atypique, sans équivalent, qui va là où aucune autre compagnie ne va, avec un modèle à contre-courant des autres acteurs du marché. Les majors se mettent aussi à « vendre » un créneau similaire.

H.B.: Le marché de la croisière ne représente que 6 % du secteur touristique et dans ces 6 %, 97 % sont assurés par des paquebots de plus de 1 000 clients à bord. Nous sommes dans les 3 % restants mais avec notre capacité très en-deçà, nous sommes une niche dans la niche. Nous avons un modèle de développement unique, tant en termes de navigation que d’expérience client, structuré autour de trois valeurs: des navires de très petite capacité, très ancrés sur la destination et particulièrement innovants. Quand la société a été créée, tout le secteur ne prêchait que la démesure. Nous avons pris un chemin diamétralement opposé. Et c’est un aphorisme très fort pour nous car la petite capacité permet des escales dans des lieux moins accessibles, l’Antarctique, l’Arctique, l’Alaska, les îles Éparses, la Géorgie du Sud, Kimberley, la Nouvelle-Guinée…

Quand les croisiéristes faisaient du navire la destination, nous l’avons toujours considéré comme un moyen, la destination restant la destination, ce qui n’a d’ailleurs pas été sans incidences sur la conception de nos bateaux pour pouvoir voir la mer où que l’on soit et aller au plus près des côtes. Cesvoyages sont opérés en outre d’une façon très particulière.Je rappelle quePonant est l’unique compagnie de croisière créée par des marins. Ils ont inventé l’expédition de luxe avec des expériences au plus près des civilisations et dans un profond respect de l’environnement grâce à des technologies embarquées qui offrent les meilleurs arbitrages pour moins consommer.

Vous avez revu votre politique commerciale en 2018 en plaçant notamment l’agent de voyage au cœur de la stratégie. Vous aviez un déficit de notoriété?

H.B.: Avec une croissance prévisionnelle de 30 % par an durant les trois prochaines années, il nous faut capter des relais. Nous avons un déficit de notoriété certain par rapport à nos ambitions. Aujourd’hui, les deux tiers des ventes sont générées par les agences, qui sont nos principaux canaux de vente et des leviers de développement forts. Avec une commission moyenne de 1 000 à 1 300 € par dossier, soit 20 fois plus qu’un billet aérien, la revente de nos produits est attractive. Pour autant, sur les 4 000 agences de voyage en France, 700 nous commercialisent mais 80 % de notre business reposent sur une centaine d’entre elles. Ce n’est pas assez. Nos croisières sont difficiles à expliquer, c’est pourquoi nous avons étoffé notre politique marketing en déclinant un panel d’outils à leur attention: site web dédié, séminaires, e-learning, éductours, formation…

Quels sont, selon vous, les enjeux de demain pour la croisière?

H.B.: Valoriser la croisière en France où le taux de pénétration est l’un des plus faibles au monde avec 0,5 % quand en Australie ou aux États-Unis, il est près de 8 fois supérieur. En Europe, nous sommes loin derrière l’Allemagne et le Royaume-Uni et l’Espagne et l’Italie sont même passés devant nous. Il y a un enjeu fort à faire rayonner la croisière, dont l’image en France ne colle pas à la réalité.

Cela nécessitera de développer l’expérience client avec une offre à l’opposé du tourisme de masse, respectueuse de l’environnement et pensée pour un public francophone.

Vous êtes très discret sur votre principal actionnaire Artémis, la holding familiale de la famille Pinault. Vous lui avez offert une incursion dans le monde très fermé des armateurs, mais que vous apporte-t-il, hormis le fait de vous avoir permis sans doute de financer le renouvellement de la flotte?

H.B.: C’est un des leaders mondiaux de l’industrie du luxe avec des engagements dans divers segments. Il peut donc nous aider à trouver des synergies dans ce monde-là et c’est assez cohérent avec notre stratégie. On est à cet égard aussi les seuls à avoir un actionnaire d’un tel renom présent dans le service haut de gamme auprès du client final.

Dossier

Archives

Boutique
Div qui contient le message d'alerte
Se connecter

Identifiez-vous

Champ obligatoire Mot de passe obligatoire
Mot de passe oublié

Vous êtes abonné, mais vous n'avez pas vos identifiants pour le site ?

Contactez le service client abonnements@info6tm.com - 01.40.05.23.15