Sentiment obsidional

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Pas une rencontre, manifestation, colloque inter-portuaires sans qu’il ne soit question de lui, le report modal, estampillé « véritable outil de pénétration de l’hinterland ».

En dépit des ambitions affichées depuis une décennie (sans remonter au-delà de la réforme portuaire) dans plusieurs plans, lois et autres Grenelle de l’environnement, dont les engagements devaient se traduire dans les grands projets stratégiques, les ports français cherchent toujours le trousseau de clés pour déverrouiller leur part modale. La volatilité des promesses (« initiales ») politiques n’aide certes pas. Au lieu d’être des traits d’union entre terre et mer, les ports maritimes restent des culs-de-sac. Et ce n’est pourtant pas faute d’entendre les litanies, factuelles, didactiques ou volontaristes. « Quand on développe un port, il faut s’occuper de ce qui se passe sur les quais mais aussi à terre ». « Le port n’est pas la destination finale de la marchandise. Il n’est que l’infrastructure permettant le changement du transport de la mer vers la terre ». « La bataille des parts de marché avec les ports du Nord de l’Europe se gagnera à terre par la massification des flux ».

La radiographie de l’existant est crue: le mode routier se taille la part du lion. Le chantier est herculéen au regard des travaux qui seraient nécessaires pour être « des ports qui comptent dans l’organisation de transports massifiés en Europe » et plus encore pour que « la marchandise puisse continuer son chemin sans être bloquée par des contraintes techniques ou de coûts ».

Force est de reconnaître qu’à cet égard, l’attractivité « coût, délai, qualité » des ports, celle de la chaîne logistique complète « door to door » (porte-à-porte), ne joue pas vraiment en faveur d’une articulation sans couture avec le fer ou le fleuve. Là résidenet cruellement la recette et force des ports nord-européens, qui creusent chaque année un peu plus l’écart.

Redevenus « fréquentables » après des années « d’incertitudes sociales », de l’avis des grands armateurs internationaux, « les ports français doivent désormais répondre au défi de l’intermodalité pour qu’un conteneur destiné à Lyon passe par un des leurs », encouragent-ils. La décision d’un armateur d’escaler n’a rien d’un coup de poker, rappellent-ils. C’est bien la profondeur de son hinterland qui déterminera l’ouverture d’un service et la taille du navire. Encore faut-il que cet arrière-pays portuaire soit desservi par des dessertes massifiées, de longue distance, de qualité et à coûts compétitifs. Tout l’enjeu réside donc bien là, dans les prolongements terrestres, qui, si le territoire « se débrouille bien », peuvent en outre apporter de la valeur ajoutée par la transformation industrielle des marchandises (selon une formule que les militants résument par « plus de marchandises traitées in situ, plus d’emplois pour le territoire »).

Le combat que mènent certains ports pour inscrire leur infrastructure sur les corridors multimodaux de transport européens – garantie pour avoir des sillons ferroviaires ouverts – est une réaction pour biaiser les angles morts du système. On ne peut qu’avoir une certaine fraternité avec cette façon d’avancer à la hussarde…

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