Le 16 octobre, l’application Ci5 a succédé à AP+ à Marseille-Fos. Comment MGI a-t-elle géré cette migration?
Dominique Lebreton: La bascule a eu lieu le 16 octobre à minuit. Nous avons opté pour une migration totale plutôt que par module. Le déploiement a été ainsi plus rapide et moins complexe pour les utilisateurs, leur épargnant de jongler entre l’ancien et le nouveau système. Dès septembre, nous avions engagé des actions auprès des transitaires et agents maritimes pour recevoir les manifestes et les booking. Il s’agissait également de préparer les interfaces pour permettre aux systèmes de communiquer entre eux (Delta pour la douane ou les TOS des manutentionnaires). Ci5 gère les flux extracommunautaires import/ export, en transit et en transbordement sur les bassins Est et Ouest. Les utilisateurs du port de Marseille-Fos ont accès à Ci5, quelle que soit leur localisation en France. Ainsi, nous avons formé 1 200 personnes à Marseille, Le Havre, Brest, Lyon et Paris.
Durant un mois, les professionnels disent avoir rencontré de nombreuses difficultés, notamment l’absence d’affichage ECS de sortie sur Ci5 empêchant le chargement des marchandises sur les navires. Comment avez-vous géré les requêtes?
D.L.: Comme tout démarrage d’un système de cette ampleur, nous avons rencontré des dysfonctionnements, des problèmes d’interface d’accès durant les deux premières semaines. Le système douanier n’était pas reconnu dans Ci5. La douane a accordé aux utilisateurs une période de souplesse entre les déclarations sous Delta et celles de Ci5. Depuis mi-novembre, la partie ECS export fonctionne. La technologie « open source » offre une grande réactivité et nous avons corrigé les anomalies rencontrées. Le mode « Dev Ops » permet aux développeurs de MGI de corriger le code directement de Ci5 sans qu’il y ait un arrêt de l’application. Nous n’avons pas connu de blackout et aucune perte de données.
Sur les 3 000 utilisateurs de Ci5, 1 800 n’ont pas été formés. Même si le système est convivial et d’un accès simple, des questions se posent. Nous avons augmenté nos effectifs d’un tiers pour assurer la maintenance du système. Nous bénéficions d’un support de Thales Services, qui restera en vigueur jusqu’au 16 décembre, fin de la période de stabilisation.
Aujourd’hui, le transport roulier rencontre encore des difficultés. À quand la reconnaissance unitaire permettant de sortir les remorques une à une?
D.L.: Pour le trafic roll, des évolutions du système sont en cours. Fin novembre, les professionnels pourront traiter la sortie des remorques de façon unitaire. Le roll répond à des attentes particulières avec des rotations courtes. Les marchandises doivent être évacuées le plus rapidement possible. TLF Méditerranée nous a demandé de porter une attention spécifique sur le trafic de remorques. Nous avons doublé les effectifs de la hotline et mis en œuvre un accompagnement. Dix personnes de MGI se déplacent en entreprise. Nous avons ciblé celles qui sollicitent le plus la hotline et les plus grandes entreprises dont l’ensemble du personnel n’a pu être formé.
Quels sont les apports du nouveau système?
D.L.: Le « Dashboard » permet à l’agent, au transitaire d’avoir de la visibilité sur les opérations sur un seul écran: nombre de déclarations en douane à effectuer, déclarations de dangereux, free time, contrôles sur la marchandise… Nous avons intégré des outils facilitant le pilotage de l’activité. Les utilisateurs nous disent gagner du temps. Nous avons également mis en place des systèmes d’alertes par exemple pour les marchandises dangereuses, dont la déclaration n’a toujours pas été intégrée dans le système 72 heures avant le départ du navire ou pour un VGM non intégré. Notre système est ouvert et offre la possibilité d’ajouter des systèmes tiers. Nous avons travaillé l’ergonomie, la navigation est plus facile. Nous sommes passés à des entités métiers.
Quels seront les prochains ports concernés par le passage d’AP+ à Ci5?
D.L.: AP+ est aujourd’hui en service dans 12 ports
En tant qu’entreprise marseillaise, comment vous inscrivez-vous dans le projet de « smart port » porté par le port de Marseille-Fos?
D.L.: MGI est l’une des briques numériques du « smart port ». Notre système a été plusieurs fois distingué pour son caractère innovant (Golden IT Award de l’International Association of Ports and Harbors, Med’Innovant d’Euroméditerranée…). Nous travaillons avec le CEA Tech et le laboratoire List de Saclay sur le projet Channel 5 visant à intégrer l’intelligence artificielle au cœur des processus portuaires. Ces travaux doivent permettre d’anticiper les aléas (météo, trafic routier, systèmes en maintenance, etc.). Avec les données historiques de Protis et AP+, nous serons en capacité d’avoir des prévisions sur les flux de marchandises, ce qui permettra par exemple aux opérateurs de terminaux de mieux dimensionner les moyens humains.
*Marseille-Fos, Lyon-Terminal, Sète, Bordeaux, Brest, Lorient, Saint-Malo, Dunkerque, Martinique, Guyane, Mayotte et Nouvelle-Calédonie.