Le rôle des ports et notamment celui de Gênes qui souhaite occuper le devant de la scène, les impacts économiques et les investissements incontournables pour profiter des retombées de la nouvelle route de la soie. Tous ces thèmes ont été débattus durant un congrès sur la route de la soie et ses enjeux qui s’est tenu à Gênes à la fin mars 2018. Officiellement, l’objectif de cette rencontre était d’analyser le niveau d’implication des ports italiens dans cette opération importante montée par les Chinois. En réalité, il s’agissait surtout de parler de Gênes. « Le port de Gênes intercepte aujourd’hui 30 % des échanges commerciaux entre l’Italie et la Chine et le volume de trafic devrait augmenter grâce aux travaux de remise en ordre et aux investissements publics et privés en partie dégagés par des opérateurs chinois », a déclaré Marco Sanguineri, secrétaire général de l’autorité portuaire en guise d’introduction. Pour Cosco, quatrième compagnie de navigation au niveau mondial et actionnaire à hauteur de 40 % de la plateforme de Vado Ligure, le méga-terminal de conteneurs qui sera opérationnel à partir de fin 2018, « la route de la soie sera là où il sera plus simple et plus rentable de faire arriver les marchandises compte tenu de leur destination ».
Sur la partie méditerranéenne, le port du Pirée en Grèce serait bien placé en raison de la présence forte des opérateurs chinois qui ont multiplié les investissements. « Il suffirait de renforcer les investissements à Gênes pour permettre au port de bénéficier des trafics importants qui seront générés par la route de la soie », estime pour sa part le ministre des Infrastructures et des Transports, Graziano Delrio. Cela veut dire être capable de gérer quelques 10 MEVP de marchandises – soit le double du volume annuel actuel – et d’accueillir des navires d’une capacité de 20 000 conteneurs. Le port devrait aussi être équipé d’un réseau ferroviaire longue distance. Le nombre de terminaux devrait être renforcé, ce qui veut dire construire et élargir les terminaux.
Remodeler les infrastructures
Reste que le sujet du réseau ferroviaire fait partie des questions épineuses. Le nouveau tronçon à grande vitesse inscrit dans le projet du corridor Rhin-Alpes qui devrait relier Gênes aux ports de la mer du Nord de Rotterdam et d’Anvers ne pourra pas être raccordé aux tunnels de base pratiquement déjà achevés en Suisse et à leurs voies d’accès en Allemagne avant 2022. Autre problème important: l’accueil des porte-conteneurs de plus de 20 000 EVP, difficile en l’état actuel car il faut remodeler les infrastructures.
« Gênes sera le terminus ou le point de départ de la route de la soie, cela dépend des points de vue », affirme l’autorité portuaire. Elle ajoute que « la Ligure représente la voie d’accès la plus naturelle pour les flux de marchandises qui transitent entre l’Europe et la Chine » en égrenant comme un chapelet les points de force du site portuaire. En reliant les deux terminaux de Vado Ligure et Pra au rail, la capacité d’accueil du port de Gênes en termes d’EVP serait identique à celle de Rotterdam, c’est-à-dire de l’ordre de quelque 12 MEVP par an. Autre point important: les travaux d’élargissement en cours permettront aux ports de Gênes et Savone, regroupés en une seule autorité portuaire depuis l’introduction de la réforme portuaire, d’accueillir les cargos d’une capacité de 20 000 EVP d’ici deux à trois ans. Ils seront les seuls en Italie. « Nous pourrons ainsi dévier vers l’Italie les routes maritimes traditionnelles notamment utilisées en l’état actuel par les ports hollandais, belges et allemands pour desservir le marché de l’Europe centrale », affirment les experts chargés de promouvoir la candidature génoise.
Pour concrétiser l’espoir des Génois, l’apport du gouvernement italien en matière de contribution à la remise en ordre des infrastructures et à la promotion du port ligure sera essentiel. Mais le temps presse et l’instabilité politique, après les élections générales avec l’impossibilité de former un gouvernement, aucun parti et aucune coalition n’ayant obtenu la majorité nécessaire dans les deux chambres pour prendre le timon du paquebot Italie, risque d’entraver la marche triomphale de Gênes.
Parole d’experts
« Nous pourrons ainsi dévier vers l’Italie les routes maritimes traditionnelles notamment utilisées en l’état actuel par les ports hollandais, belges et allemands pour desservir le marché de l’Europe centrale », affirment les experts chargés de promouvoir la candidature génoise.