Après la publication des résultats électoraux des législatives du 4 mars dernier indiquant une absence de majorité dans les deux chambres, les marchés, les institutions et toute l’Italie sont aux aguets. La percée importante des partis populistes, le Mouvement 5 étoiles (M5s) qui a recueilli 32 % des suffrages et la Ligue du Nord qui remporte plus de 17 %, inquiète en raison des positions anti-européennes, anti-euro et antisystème en général de ces formations. À commencer par Assoporti, l’association des autorités portuaires italiennes, qui observe la situation. Le Journal de la Marine Marchande a rencontré Zeno D’Agostino, président du port de Trieste et d’Assoporti.
JMM: Quel est votre sentiment après cette tournée électorale à l’issue globalement incertaine?
Zeno d’Agostino: Le gouvernement sortant de centre-gauche a bien travaillé. Il y a eu la réforme portuaire qui a remodelé le système et modifié le panorama. Cela dit, nous attendons de voir ce qu’il va se passer. Nous sommes toutefois déçus par le fait que la question des transports, et plus notamment maritime, n’entre pas dans le débat politique électoral alors que nous jouons un rôle important dans l’économie du pays. Ce thème ne passionne pas les électeurs. Pourtant, les infrastructures sont essentielles dans la vie au quotidien. Il faudrait que nous arrivions à intégrer cet argument, à mobiliser l’opinion publique. Nous avons d’ailleurs l’intention d’organiser des rencontres, d’aller à l’encontre des citoyens pour inscrire la question des infrastructures dans les discussions politiques et électorales.
JMM:Les positions anti-européennes des vainqueurs à savoir le M5s et la Ligue du Nord peuvent-elles remodifier la donne en ce qui concerne notamment les transports maritimes
ZDA: À partir du moment où la campagne électorale est terminée, il est quasiment certain que ces partis vont revoir leurs positions. Ils vont devoir devenir plus politiques et plus concrets. Je pense personnellement qu’ils vont rentrer dans les rangs. Il faut maintenant, en revanche, modifier notre perception de l’Europe et comprendre que le fait d’appartenir au cercle d’une monnaie forte est un facteur essentiel en termes de développement et de possibilités d’avenir. L’Italie a toujours eu du mal à se sentir partie en cause ou partie prenante d’un contexte international. Notre système industriel est basé sur un tissu de PME, Fincantieri est l’un des rares groupes à avoir les épaules larges et à pouvoir jouer un rôle important. Le réseau d’exportations italiennes est basé sur une multitude d’entreprises. Il faut rassembler, renforcer. Nous devons réfléchir autrement et avoir une finance qui soutient la réalité industrielle. Dans les pays voisins, les institutions accompagnent toujours le processus d’élargissement de l’industrie. Pas en Italie. Le prochain gouvernement et nos institutions vont devoir comprendre qu’ils doivent s’intégrer dans un nouveau système basé sur des rapports de force économiques.
JMM: La Ligue du Nord veut favoriser l’économie du Sud pour élargir son bassin potentiel d’électeurs en promettant des mesures importantes pour dynamiser cette partie du pays. Quel est votre sentiment à ce propos?
ZDA: La route de la Soie n’est pas le seul et unique enjeu pour les ports italiens. Il y a la Méditerranée où la situation politique est en train de se normaliser et qui peut, si elle est bien exploitée, relancer l’économie du Sud de l’Italie à travers ses ports. Le monde africain est essentiel, alors ne perdons pas cette occasion. Je le répète, il faut changer notre perception et devenir plus « internationaux ».