Au mois de juin, à l’occasion de la publication du rapport annuel, le consultant néerlandais Dynamar s’est montré prudent. Il qualifiait l’année de verre à moitié remplit ou à moitié vide, selon que vous soyez optimiste ou pessimiste. « Depuis 2010, les pertes totales des plus grands armements conteneurisés ont atteint 22 Md$ (un chiffre qui approche les 28 Md$ si nous excluons Maersk Line) », souligne le rapport de Dynamar. Dans le même temps, le volume transporté augmente de 2 % en moyenne.
Dans ce contexte, l’entrée dans l’année 2017 s’est montrée encore sous un jour difficile.
Les événements ont cependant laissé un peu d’espoir. Dès les premiers mois de l’année 2017, le nombre de navires envoyés à la casse a augmenté. Au cours du premier trimestre, 78 navires représentant 248 500 EVP de capacité ont été détruits, soit 9,6 % de plus. Le marché aurait-il enfin compris que la surcapacité endémique du secteur doit trouver une solution au travers d’une autorégulation? Les analystes ont rapidement déchanté. Dès le deuxième trimestre de l’année, les commandes de navire de plus de 14 000 EVP ont repris. Ce sont quelque 54 navires pour une capacité de 920 000 EVP qui ont été commandés. Dans le même temps, il est prévu que les volumes traités devraient continuer de croître dans les prochaines années. Alors si les armateurs acceptent de restreindre l’augmentation de capacité à son minimum, le verre pourrait se remplir.
Dans une note publiée le 5 décembre, Fitch Rating indique que la meilleure forme du transport maritime conteneurisé reste fragile. Depuis le début de l’année, les taux de fret ont augmenté, constate Fitch Rating, mais la surcapacité demeure dans ce secteur. L’agence de notation estime que la capacité de transport devrait augmenter de 5,5 % en 2018 contre une croissance de 4,5 % des volumes.
Il reste que, sur la fin de l’année, les résultats financiers des armements conteneurisés sont plutôt optimistes. Sur les neuf premiers mois de l’année 2017, Hapag-Lloyd annonce un résultat en hausse. L’Ebitda a augmenté de 89 % à 721,9 M€ et le résultat net est revenu dans le positif à 8,2 M€, contre une perte de 133,9 M€ en 2016. Yang Ming Marine s’inscrit dans la même veine avec une augmentation de son chiffre d’affaires sur le troisième trimestre qui a augmenté de 23,4 % à NTD 35,7 md (1,01 Md€). L’armement reste en déficit sur les neuf premiers mois à NTD 82 M (2,3 M€) mais réduit considérablement ses pertes de 99 % par rapport à la même période de 2016. Quant au premier de la classe, Mærsk Line, les revenus de sa division transport et logistique, comprenant outre les lignes mais aussi les opérations logistiques avec Damco et les terminaux, ont augmenté de 14 % à 8 Md$, « notamment grâce à notre activité de lignes régulières », a indiqué Soren Skou, président d’AP Moller-Mærsk. Et pourtant, l’armement danois a dû faire face en juillet 2017 à une cyberattaque qui a largement aggravé ses résultats financiers. Selon la direction générale du groupe, cette cyberattaque devrait avoir coûté entre 200 et 300 M$. Quant à Cosco Shipping, sur les six premiers mois de l’année, les résultats sont aussi revenus dans le positif.
Chaque opérateur fait la même analyse de la situation qui a vu une croissance des volumes à transporter et une hausse des taux de fret. Ainsi, pour Hapag-Lloyd, le revenu par conteneur s’est élevé à 1 060 $/EVP contre 23 $/EVP un an plus tôt.
L’année 2017 a aussi été marquée par une nouvelle vague de consolidation dans le secteur. Après la faillite en septembre 2016 de Hanjin, les armateurs conteneurisés ont continué de faire leur marché pour assainir le secteur. Ainsi, Hapag-Lloyd a acquis UASC au cours des premiers mois de l’année. « Nous avons réussi à tirer les premières synergies de notre rapprochement avec UASC qui devrait nous permettre de consolider notre position dans cette filière », a déclaré Rolf Habben Jansen, directeur général de Hapag-Lloyd. Mærsk Line pour sa part a reçu dans les derniers jours de 2017 l’approbation par les autorités de la concurrence de reprendre Hamburg Süd, un spécialiste de l’Amérique du Sud.
Quant à CMA CGM, il a repris, depuis le 18 décembre, Mercosul Line, une filiale de Hamburg Süd. Pour sa part, Cosco Shipping a fait une offre dès le début du mois de juillet pour la reprise de OOCL afin de créer un groupe chinois de premier rang et consolider sa position de quatrième acteur mondial. Quant à MSC, si l’armement italo-suisse ne s’est pas lancé dans cette campagne de consolidation, il a de son côté entamé une augmentation de sa flotte en jumboïsant plusieurs navires.
Ce qui restera de cette année 2017 pour le conteneur est qu’avant tout « les fondamentaux sont positifs », a déclaré Soren Skou, président d’AP Moller-Mærsk. L’année 2018 pourrait continuer sur la lancée des derniers mois de 2017 à condition que les armateurs prennent en main leur avenir. Il reste que, l’année prochaine, le réseau ONE (regroupant les trois armateurs nippons, NYK Line, Mol et NYK Line) entrera en vigueur ainsi que les nouvelles alliances dès le mois d’avril. Le deuxième trimestre sera décisif pour éviter de retomber dans les travers que le monde de la conteneurisation vit depuis 2009.