La famille Arkas est originaire de Marseille. Elle a émigré en Turquie au cours du xviie siècle. Au cours des précédentes décennies, le groupe a travaillé sur le transport terrestre en Turquie. En 1978, avec l’apparition de la conteneurisation en Méditerranée, la famille Arkas a tout de suite effectué un virage pour s’adapter aux nouvelles conditions de transport. « Nous avons commencé avec une agence maritime. Aujourd’hui, nous avons 7 500 employés en Turquie et sommes présents dans 25 pays à travers le monde », explique Lucien Arkas, président d’Arkas Holding. Dans le courant des années 90, avec l’ouverture du hub à Gioia Tauro, en Italie, Arkas Line effectue un nouveau virage. La société décide de disposer de ses propres navires. En juillet 1996, Emes Shipping and Transport est créé pour gérer cette flotte. Emes Shipping, basé à Gênes, va voir son rôle changer. Le 1er janvier 2010, l’ensemble de la flotte prend le nom d’Arkas Container Transport et commercialise ses services sous Arkas Line. « Contrairement à nos concurrents, nous avons commencé par des opérations à terre avant de venir à la mer. Les groupes maritimes se sont d’abord déployés en mer avant de prendre part au marché terrestre », continue Lucien Arkas.
L’armateur turc est aujourd’hui en charge d’une flotte d’une cinquantaine de navires qui pèse environ 93 269 EVP. « La force de notre groupe est de nous être diversifié. Notre chiffre d’affaires des lignes entre pour 40 % dans nos revenus annuels », continue le président de la holding d’Arkas. Et malgré la tourmente qui sévit actuellement dans le monde de la conteneurisation, Arkas Line continue de croître. « Arkas Line est le dénominateur commun de notre groupe. Nous avons besoin de nos propres navires et nous continuons à grandir malgré les conditions parfois difficiles du marché », souligne Lucien Arkas. Aujourd’hui Arkas Line travaille principalement sur le marché méditerranéen et celui de la mer Noire. Les Turcs qui se sont implantés sur le marché Nord-Africain s’intéressent aussi de plus en plus à l ’Afrique de l’Ouest. Arkas dessert le marché Ouest-Africain par deux VSA. Le premier depuis la Méditerranée avec Hapag-Lloyd et CMA CGM via Tanger et le second du Nord-Europe avec Hapag-Lloyd avec escale à Algésiras et Tanger. « À cette occasion, a indiqué Bernard Arkas, vice-président du groupe, et compte tenu de l’importance que prend l’Europe du Nord dans notre stratégie, nous avons ouvert une agence à Hambourg ».
Des racines aux vertus polyvalentes
L’armateur turc continue son chemin. Il a commandé huit navires auprès de chantiers chinois. « Ces navires ont l’avantage d’être polyvalents. Ils peuvent entrer dans n’importe quel port ». En juin 2017, Arkas Line a reçu le quatrième navire de cette série de 2 600 EVP chacun. Les autres de 3 100 EVP sont attendus dans les prochains mois.
Arkas est avant tout un opérateur terrestre. « Sur le terrestre nous travaillons avec des opérateurs locaux. La seule exception est en Ukraine où nous disposons de nos propres moyens de transport », continue Lucien Arkas. Des opérations logistiques regroupées sous Arkas Logistic, une filiale qui dispose de ses propres camions, dépôts sous douane et opérations de transit. Le groupe turc a su nouer des partenariats stratégiques avec des grands groupes spécialisés dans la logistique. Ainsi, depuis 1983, il travaille en étroite collaboration avec Schenker. La société allemande assure du transport routier sur la Turquie depuis des dépôts européens, assure une partie du fret aérien, des opérations de transit ou encore du ferroviaire entre l’Europe et la Turquie. En Turquie, Arkas a directement investi dans une société ferroviaire. Elle dispose de 700 wagons. « Nous devrions avoir nos propres locomotives dans quelques temps », confie le président d’Arkas Holding. Pour le moment, la traction est assurée par le tractionnaire national. Opérateur logistique, le groupe Arkas est aussi présent dans le portuaire. Il gère, au travers la société Marport en coopération avec TIL(MSC), les deux terminaux de Marport dans le port d’Istanbul.
Une activité qui va grandir puisqu’en 2018, Arkas devrait prendre la concession du Terminal del Golfo dans le port de La Spezia. « Nous grandissons dans ce secteur en fonction de nos besoins et de la demande de nos clients ».
Fort de ces atouts, Lucien Arkas reste les pieds ancrés à terre. « Nous sommes partis des activités terrestres pour nous étendre vers le maritime. C’est une philosophie qui est à l’inverse des grands armements conteneurisés actuels mais nous avons pu la développer parce que la Turquie représente un grand marché. Il ne faut jamais oublier que la performance se fait à terre. » Cela n’empêche pas le groupe de regarder ce qu’il se passe ailleurs. Dépasser le canal de Suez? Le président d’Arkas Holding reste prudent mais attend de voir que les taux de fret remontent avant de se lancer dans une aventure plus lointaine, tout en précisant, « rien est impossible ». Selon lui, être un petit armateur dans ce monde en pleine consolidation reste possible. « Dès lors que les grands groupes armatoriaux voient leurs résultats s’inscrire en positif, ils nous laissent opérer nos lignes. Le challenge que la conteneurisation doit relever est de revenir à des résultats financiers bénéficiaires afin que chacun, petit ou grand, puisse réaliser ses opérations ».