Une offre armatoriale diversifiée

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L’offre maritime des trois départements français des Amériques s’est étoffée au fur et à mesure des années. À peine quelques décennies plus tôt, les Antilles françaises accueillaient des navires de la CGM, devenue CMA CGM, et de Marfret. Ils expédiaient depuis l’Europe des biens de consommation et repartaient les cales chargées de bananes. Avec l’arrivée de la conteneurisation ces navires se sont spécialisés, et aujourd’hui l’offre maritime est largement diversifiée. La conteneurisation conserve encore sa première place. CMA CGM reste le premier opérateur en import depuis l’Europe. Le troisième armement mondial offre des lignes au départ d’Europe du Nord et de la Méditerranée. Deux services sont assurés depuis l’Europe. L’un part du Nord avec la desserte de Dunkerque, Anvers, Le Havre et Nantes Saint-Nazaire vers Pointe-à-Pitre et Fort-de France. L’autre part des ports méditerranéens de Marseille, Gênes, Livourne, Tanger Med, Algésiras, Valence et Barcelone pour rejoindre Pointe-à-Pitre, Fort-de-France, les ports d’Amérique centrale et repasse par Pointe-à-Pitre pour l’exportation des bananes. Enfin, au départ d’Europe du Nord, CMA CGM dessert aussi la Guyane dans le service avec le nord du Brésil au départ d’Anvers, Dunkerque, Le Havre et Nantes Saint-Nazaire. Ces services sont assurés jusqu’à présent par les navires de la catégorie des « Fort », d’une capacité de 2 200 EVP. Pour améliorer les services avec les Antilles, le groupe marseillais a décidé de mettre sur cette ligne de nouveaux navires plus importants. Il s’agit de la série des « Pointe », qui peuvent prendre jusqu’à 2 800 EVP. Sur ces différents services, Mærsk Line affrète des espaces. Depuis le départ de la desserte en directe par le premier groupe mondial conteneurisé, il continue à desservir les Antilles françaises mais en coopération avec CMA CGM.

Difficultés opérationnelles

Ces différents services de CMA CGM sont assurés en VSA (Vessel Sharing Agreement) avec le groupe français Marfret. L’armement travaille principalement sur les importations. Il ne prend pas les conteneurs de bananes en sortie des Antilles. « Ces différentes dessertes des pays européens sont stables depuis quelques années, à l’exception des escales qui sont réalisées désormais sur le terminal de Marseille plutôt que celui de Fos », explique un responsable de la ligne. Avec les événements sociaux en Guyane au mois de mars et en Espagne aujourd’hui, l’armement est confronté à des difficultés opérationnelles. Sur la Guyane, Marfret a décidé de stocker ses conteneurs dans les ports voisins des Antilles ou de la côte ferme d’Amérique du Sud. Plusieurs boîtes ont été déposées à Fort-de-France, Pointe-à-Pitre, mais aussi à Trinidad et Tobago ou encore au Surinam. « Il faut maintenant que nous les rapatrions vers la Guyane, mais un certain nombre de ces conteneurs ont vu leurs marchandises se périmer pendant leur stockage. » L’autre phénomène logistique récent se pose en Espagne. « Nous avons choisi de continuer à desservir les ports espagnols, et ce malgré les événements sociaux », explique le responsable de la ligne. Quant à utiliser les ports français des Antilles comme des plates-formes de transbordement, cela paraît difficile aujourd’hui. Pour la direction de Marfret, ces deux ports sont beaucoup plus chers que ceux de la région. « À deux jours de mer se situe Kingston, Carthagène ou encore Port of Spain qui proposent des tarifs moins élevés. Pour les ports antillais, capter des flux des majors de la conteneurisation reste compliqué tant que les tarifs ne seront pas alignés. »

Face à ces grands de la conteneurisation, d’autres armements prennent une place. Ainsi, Seatrade a réussi à s’imposer. Le groupe néerlandais réalise principalement des imports sur les ports des Antilles françaises. Avec un départ par semaine depuis Tilbury, Rotterdam et le terminal de Radicatel à Rouen, Seatrade dessert Pointe-à-Pitre, Fort-de-France et Saint-Martin dans les Antilles. Ensuite, les navires touchent le Costa Rica, le Guatemala, le Honduras et repassent par Pointe-à-Pitre pour charger des conteneurs vides à retourner en Europe. En mars 2016, Seatrade a amélioré le temps de transport entre l’Europe et les Antilles. Désormais, il offre un départ de Radicatel.

Marché européen

Une grande partie des conteneurs chargés en Amérique centrale est destinée au marché européen. Ils sont surtout déchargés dans le port de Rotterdam. « Peu de marchandises sont déchargées sur le terminal de Radicatel, mais nous travaillons pour développer cette escale », nous a indiqué un responsable de l’armement en France. Pour la compagnie néerlandaise, il s’agit de ramener sur Rouen des conteneurs de café et de fruits d’Amérique centrale. Parallèlement à ces services, Geest Line assure une liaison depuis l’Europe du Nord vers les Antilles françaises. L’armement touche les deux îles des Antilles françaises. « Ce sont principalement des importations depuis l’Europe. Nous reprenons uniquement les conteneurs vides sur les deux îles », explique le groupe. En France, Geest Line part du Havre le mercredi pour une arrivée aux Antilles le jeudi suivant. La liaison hebdomadaire est assurée par quatre navires. Récemment, Geest Line a ouvert une représentation en propre à la Guadeloupe. « Nous assurons des escales régulières sur cette île, mais sans avoir de bureau localement. Nous avons opté pour une agence à Pointe-à-Pitre pour pouvoir assurer toutes les opérations locales. »

Face aux lignes régulières conteneurisées, des armements ont fait le choix de la desserte des îles par des navires rouliers. Höegh Autoliner assure un service régulier sur les trois départements français des Amériques. Les navires sont consignés par SCT, filiale du groupe Aubéry. Ces derniers mois, l’armement a vu ses volumes augmenter grâce au renouvellement du parc automobile local. De plus, Höegh Autoliner a décidé d’utiliser le port de la Guadeloupe comme une plate-forme de transbordement pour les autres îles antillaises et la Guyane. Depuis l’Asie, les trois armements japonais, Mitsui, NYK et K Line assurent des escales dans les ports de la Guadeloupe et de la Martinique. Des rotations qui desservent les ports antillais sur une fréquence mensuelle. Si K Line et NYK sont consignés par Transcaraïbes, du groupe Naxco, Mitsui a choisi la SGCM, filiale du groupe Aubéry, pour ses navires. En marge de ces armements de lignes, deux opérateurs ont choisi de desservir les ports locaux avec des navires plus spécialisés. Il s’agit de Spliethoff et de Caribbean Lines. Le premier armement est spécialisé dans le projet industriel. Alors que cet armement, consigné par la société SCT, a enregistré de nombreux voyages en 2009 et 2010, il voit ses trafics s’étaler dans le temps, explique Xavier Aubéry. Au début de la décennie, Spliethoff est intervenu pour le chantier de la centrale industrielle d’EDF. La fin du chantier en 2013 a réduit le nombre de touchées locales. « Nous travaillons sur les projets d’importation de matériel pour des éoliennes sur les îles », continue le dirigeant de la SGCM. Spliethoff reste malgré tout présent sur les îles en assurant des trafics de déchets de ferrailles vers l’Europe à raison de deux à trois escales par an.

Un large éventail de dessertes

Enfin, dans cet éventail large de dessertes, Caribbean Line et Soreidom assurent deux services au départ d’Europe vers les Antilles. Le premier part d’Anvers, d’Ipswich et de Setùbal vers les ports de l’arc antillais, dont Le-Robert en Martinique, Basse-Terre en Guadeloupe et Saint-Laurent-du-Maroni en Guyane. Il est commercialisé sous le nom de Caribbean Line. Le second service, appelé la ligne Europe-Caraïbes de Soreidom, part de La Rochelle vers Basse-Terre, Pointe-à-Pitre, Fort-de-France. Avec une dizaine de bureaux entre l’Europe, les États-Unis, les Antilles et le nord de l’Amérique du Sud, Caribbean Line et Soreidom centrent leur activité sur le développement des échanges caribéens. « Nous avons commencé en réalisant des transports entre les États-Unis et les îles des Antilles. Après la crise de 2008, nous avons suspendu cette rotation pour nous concentrer sur le développement de nos services et lignes les plus forts. » Pour Xavier de Moussac, les Caraïbes ont un avenir sur leur marché intérieur. « Aujourd’hui, les relations commerciales entre les différentes îles ne sont pas aussi développées qu’elles pourraient l’être: nous anticipons les évolutions pour nous adapter rapidement à ce marché. » Pour le dirigeant du groupe, il existe des productions qui sont propres à chaque île et qui pourraient facilement se négocier dans le marché régional. « Il faut pour cela disposer de liaisons inter-îles efficaces, ce qui n’est pas toujours le cas actuellement. » De plus, dans les Antilles françaises, il existe une valeur ajoutée que d’autres îles n’ont pas. Autant d’atouts à prendre en compte pour un développement futur du trafic intrarégional. Le groupe continue à se spécialiser sur ses trafics de niche. En s’implantant industriellement dans le nord du Brésil, à Macapà, il offre des liaisons en plein essor sur cette région. « Certes, la situation est compliquée sur ce port, parfois les temps d’attente sont encore un peu longs, mais nous y réalisons de plus en plus d’escales », confie Xavier de Moussac. Présent en Martinique avec un site propre au Robert, Caribbean Line est aussi devenu l’un des principaux acteurs sur le port de Saint-Laurent-du-Maroni. Ce port a un faible tirant d’eau, ses infrastructures et sols sont peu résistants mais il dispose malgré tout d’un large potentiel en raison de la croissance démographique locale. Les quais de Saint-Laurent-du-Maroni sont limités à 1,5 t/m2. Dès que les trafics croissent, le port arrive rapidement à saturation. « Le trafic du port gagnerait considérablement à être organisé différemment pour favoriser l’activité », continue Xavier de Moussac. Pour le groupe, des développements existent dans la région. Sur le Surinam et le Guyana, l’expansion de l’activité pétrolière relance l’industrie portuaire. D’autres destinations, Trinidad et Tobago ou encore la Dominique, recouvrent un fort potentiel à explorer.

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