Le dernier rapport de l’OCDE sur le continent Afrique met en perspective l’accélération de la métropolisation avec 472 millions d’urbains en 2015, soit deux fois plus qu’en 1995. Les projections les plus réalistes annoncent 800 millions d’Africains dans les écosystèmes urbains pour… 2035!
Les littoraux maritimes et fluviaux sont les plus concernés, avec des métropoles portuaires qui deviennent des mégalopoles comme à Lagos, Abidjan, Kinshasa ou encore au Caire. La gestion des relations entre l’entité portuaire et sa métropole constitue un enjeu majeur d’avenir puisque doivent s’anticiper croissance annoncée des activités portuaires et hyperconcentration de population dans des territoires métropolitains tentaculaires.
Que ce soit Dakar avec le projet du port du futur, Abidjan avec l’arrivée programmée de TC2, Téma avec plus d’un milliard d’euros d’investissement portuaire, tous ces projets ont comme point commun de devoir planifier à long terme leur future intégration logistique dans les systèmes métropolitains auxquels ils s’adossent.
Un planning territorial et stratégique
Même s’ils sont moins géographiquement enchâssés dans le cœur des métropoles que les terminaux historiques, force est de constater que ces « nouveaux ports » ne se déconnectent pas de l’hyper-densité métropolitaine. De manière concomitante, l’anticipation de centaines de milliers de nouveaux logements (zones pavillonnaires, hautes tours d’habitations collectives, nouveaux quartiers ex nihilo, etc.) se réalise au cœur et en périphérie des centres métropolitains historiques. Cela suppose de concevoir un planning territorial et stratégique qui doit impérieusement combiner les échelles d’espace (local, régional et national) et de temps. Comment concevoir les futurs territoires métropolitains côtiers sans prendre en compte un doublement, voire un triplement des trafics portuaires, d’ici 10 à 20 ans?
Anticiper les besoins
Conjuguer une projection prospective de ces systèmes métropolito-portuaires suppose d’anticiper les futurs besoins (énergie, transports, services, loisirs, etc.) tout en devançant d’évidentes externalités négatives, notamment en matière d’écologie, d’environnement, de santé publique ou encore de sécurité. Les métropoles du futur sont projetées, de même que les infrastructures portuaires de demain. En revanche, les métropoles portuaires du futur sont très rarement dessinées si l’on prend en compte la somme inévitable des interactions positives et négatives qui résultera, à court, moyen et long termes, des croissances portuaires et des croissances urbaines. Il est donc impératif d’anticiper les modalités managériales de demain afin d’optimiser les synergies entre la métropole et son port, entre le port et sa métropole.
Chaque entité, que l’on parle de la ville-métropole ou de l’espace régalien portuaire, dispose d’organes propres de gouvernance. Ils ont la responsabilité, entre autres, d’orchestrer la planification et l’organisation des territoires relevant de leurs compétences respectives. Le problème managérial majeur qui émerge avec l’accélération des croissances, c’est l’absence de gouvernance des relations – et leurs conséquences – entre la métropole et son port.
Cette gouvernance des relations exige de l’innovation, de l’audace et de l’ambition pour oser bouleverser les pratiques en cours et planifier l’avenir. Tout un corpus théorique et pratique doit être mobilisé et testé par les décideurs, qu’ils soient publics ou privés, pour assumer une prospective territoriale stratégique, réaliste et ambitieuse. Pour ce faire, de nouveaux référentiels, de nouvelles compétences, de nouveaux métiers doivent investir les organes de gouvernance pour porter de nouvelles manières de faire et de concevoir le port métropolitain africain du futur. Il y va de la compétitivité et de l’attractivité de ces écosystèmes pas tout à fait comme les autres.