En France, en Belgique, en Allemagne, aux Pays-Bas, il existe un assez grand nombre de plates-formes intérieures multimodales. Elles sont installés aux bords des voies d’eau comme le Rhin, la Deûle, l’Escaut, la Seine, le Rhône, la Saône, la Moselle, la Meuse ou des canaux comme celui du Centre ou Albert ou Anvers-Bruxelles-Charleroi. Elles sont souvent reliées à des ports maritimes par voie fluviale de manière régulière. Elles sont embranchées au mode ferroviaire, disposent de voies de triage pour composer et recomposer des trains. Elles -ou des opérateurs– ont mis en place des connexions ferroviaires régulières depuis ou vers différentes destinations situées plus ou moins loin dans leur hinterland.
Dans les plates-formes intérieures multimodales, les solutions de report modal les plus courantes sont celles associant le train ou le fluvial au transport routier de marchandises. Pour ce dossier spécial consacré aux pré et post-acheminements, nous avons voulu aller au-delà de ces solutions fluviales ou ferroviaires existantes associées à la route. Nous avons cherché à savoir s’il existe des systèmes directs d’échange de marchandises entre les deux modes massifiés que sont le fluvial et le ferroviaire dans les plates-formes intérieures multimodales. C’est-à-dire: des marchandises -conteneurs, vracs ou marchandises diverses– arrivent-elles par le fleuve et passent-elles sur le ferroviaire et/ou inversement?
Éclaircir la problématique des relations entre les flux utilisant le fluvial et ceux utilisant le ferroviaire dans les plates-formes intérieures multimodales apparaît important compte tenu que les ports intérieurs sont les seuls endroits où ces deux modes dits alternatifs convergent. Il s’agit donc d’un enjeu de première importance pour ces sites et leur développement futur dans un contexte de développement durable en lien notamment avec les volontés politiques de lutter contre le réchauffement climatique à l’échelle mondiale.
Les échanges avec différents acteurs ont permis de découvrir que sur certaines des plates-formes, des flux alliant les deux modes massifiés que sont le fluvial et le ferroviaire ont existé ou existent actuellement de manière pérenne ou ponctuelle ou pourraient se développer dans les années à venir.
Les raisons pour lesquelles certains de ces flux ont disparu sont économiques ou liés à l’implantation des ports intérieurs au plus près des centres-ville. Concernant plus particulièrement la France, les difficultés de l’activité du wagon isolé ont été mentionnées. La SCNF n’a jamais pu ou su adapter son offre aux demandes du marché sans doute pour des contraintes économiques et de gestion. La mise en place d’un report modal fer-fleuve suppose une fiabilité du transport ferroviaire de marchandises, une disponibilité de sillons, une qualité du réseau capillaire.
Parmi les freins à la mise en place de solutions de report modal associant le fluvial et le ferroviaire, figure aussi la compétitivité actuelle du transport routier de marchandises dans un contexte de modération des prix des carburants, consécutive à une chute importante des cours du pétrole depuis juin 2015. Toutefois, certains chargeurs ont conscience que cette situation peut se retourner à tout moment et anticipent des évolutions à moyen terme de leur logistique vers des solutions alternative à la route.
Comme autre frein à ce report modal, les coûts supplémentaires de manutention en raison de la rupture de charge entre le fluvial et le ferroviaire ont été mis en avant. Toutefois les positions apparaissent nuancées sur cette question. Ces coûts existent mais ne sont peut-être pas aussi pénalisants compte tenu de la longue distance que permettent les transports fluvial et ferroviaire.
Au final, pour une mise en place plus large de solutions de report modal fer-fleuve: la massification est indispensable. Il faut trouver un volume critique de marchandises, une régularité du trafic, une volonté de la puissance publique pour favoriser cette alternative logistique.