Parmi les dispositions en faveur de la compétitivité des exploitations maritimes et des ports de commerce, les débats concernant le titre Ier (articles 1 à 12), et en particulier le chapitre ii sur « la rénovation de la gouvernance des ports », ont été particulièrement vifs. Ainsi, si le groupe socialiste et républicain du Sénat se réjouit dans un communiqué de l’adoption de la proposition de loi pour l’économie bleue, les sénateurs socialistes regrettent toutefois que « la droite sénatoriale ait introduit, sans en mesurer l’impact, des dispositions contestables sur la gouvernance des Grands ports maritimes ».
Le gouvernement ayant engagé une procédure accélérée sur ce texte, une commission mixte paritaire se réunira le 6 avril.
Commission des investissements et « avis conforme »
L’adoption contre l’avis du gouvernement de deux amendements à l’article 3, présentés par Charles Revet et Michel Vaspart (Les Républicains), ont entraîné des réactions contrastées. Il s’agit tout d’abord de l’amendement n° 91 rectifié bis, qui vise la constitution au sein du conseil de développement d’une commission des investissements, composée d’un collège des investisseurs publics et d’un collège des investisseurs privés égaux en voix. Cette commission est présentée par Michel Vaspart comme un « cadre assurant la coordination entre investissements publics et privés pour améliorer la compétitivité des ports français ». Le collège des investisseurs publics est « composé des membres du directoire du Grand port maritime et de représentants des investisseurs publics, membres du conseil du développement, dont le nombre est proportionnel à leur niveau d’investissement avec un minimum d’un siège par membre éligible à ce collège, ainsi que d’un représentant de l’État ». Les investisseurs privés sont quant à eux « choisis parmi les membres du conseil de développement représentant des entreprises ayant investi, de manière significative, sur le domaine du Grand port maritime ».
Le second amendement (amendement n° 92 rectifié) vise à « renforcer le poids de la commission des investissements en précisant qu’elle rend des avis conformes ». Il est ainsi libellé: « Sont soumis à l’avis conforme de la commission des investissements: le projet stratégique du Grand port maritime, avant sa transmission pour examen au conseil de surveillance, et les projets d’investissements publics d’infrastructures d’intérêt général à réaliser sur le domaine portuaire et à inclure dans le projet stratégique. » L’amendement, mis aux voix est adopté à 186 voix contre 154.
Crainte de blocage
Bernard Mazuel, délégué général de l’Union des ports de France (UPF), nous a confié que l’UPF ne pensait pas que « des intérêts privés aient à émettre un avis conforme sur des projets engagés au nom de l’intérêt général ». Il a rappelé que « la réforme portuaire de 2008 visait à mettre fin aux conflits d’intérêts existants ». L’adoption de l’article 3 modifié lui fait ainsi craindre le retour de ces conflits d’intérêts entraînant des « blocages de la gouvernance des ports ».
Xavier Galbrun, délégué général de l’Union nationale des industries de la manutention (Unim) dans les ports français, est au contraire très favorable à la création de la commission des investissements. Il nous a expliqué qu’il y voyait une volonté de clarification de la réforme de 2008 qui a été, selon lui, « travestie à l’usage ». Il rappelle que « les missions à caractère commercial relèvent du privé, et que si le secteur public investit en infrastructures, le secteur privé, lui, investit en superstructures dans les services portuaires marchands ». « L’avis conforme » risque de ne pas être maintenu en commission mixte paritaire, mais l’Unim se satisferait du maintien de « l’avis obligatoire avec inscription au recueil des actes du département ».