Sur les grandes routes maritimes Est-Ouest, en 2015, le taux d’utilisation moyen des porte-conteneurs a été de 87 % contre 93 % en 2014. Bien sûr, on note des variations selon le segment maritime concerné et la période de l’année. Entre l’Asie et les côtes Ouest ou Est de l’Amérique du Nord, il était de l’ordre de 93 %. Durant l’année 2015, les armateurs ont su assez bien gérer l’évolution demande/offre puisque le taux d’utilisation est resté entre 83 % en février et novembre (périodes creuses) et 93 % en août (forte demande).
Pour parvenir à ce résultat, outre le désormais bien enraciné slow steaming, on trouve également les annulations de départs (les navires continuent à tourner pour rester en horaire mais ne font aucune escale commerciale, explique Drewry), les suspensions ou les fusions de service, le transfert de navires vers d’autres dessertes afin de laisser de la place à des unités neuves et plus importantes et, en dernier ressort, la mise à la chaîne. Cette avant-dernière solution (avant le ferraillage) a explosé depuis novembre, passant de 3 % de la capacité mondiale de porte-conteneurs en septembre à 4,5 % en novembre pour arriver à plus de 5,3 % en février.
Depuis l’Asie vers le Nord Europe, environ 230 départs ont été annulés sur l’année 2015, ce qui correspond à une baisse de 910 000 EVP de la capacité disponible, soit 8 %. Sans ces voyages à blanc, dans le sens Asie-Nord Europe, le taux de remplissage des navires aurait été de sept points de pourcentage inférieur aux 88 % constatés en 2015. Mesurée par le taux d’utilisation du navire, l’efficacité des voyages à vide varie selon les mois. Elle a été maximale en août en permettant d’augmenter le taux d’utilisation de 11 points (85 % sans, 96 % avec) dans le sens Westbound.
Les services conjoints Ocean Three (CMA CGM, CSCL et UASC) et G6 (APL, Hapag-Lloyd, Hyundai, MOL, NYK et OOCL) ont été les plus enclins à recourir aux voyages à vide en 2015, entre l’Asie et le Nord Europe, en figeant respectivement l’équivalent de 290 000 EVP et 270 000 EVP. Les VSA 2M (Mærsk, MSC) et CKYCHE ont moins utilisé cette technique, en ne retirant que 160 000 EVP pour le premier et 190 000 EVP pour le second.
Drewry souligne que ces retraits de capacité illustrent l’importance des difficultés auxquelles les transporteurs doivent faire face. Tous cependant n’y sont pas confrontés avec la même intensité. Ceux qui exploitent les plus grands porte-conteneurs, permettant théoriquement de bénéficier du plus bas coût au slot, devraient mieux résister que les autres. D’où la course pour obtenir ces navires, ce qui augmente la surcapacité existante. Course d’autant plus effrénée que les chantiers chinois et coréens sont en manque de commandes et donc prêts à faire beaucoup de concessions.
Les taux chutent malgré les efforts
Ces efforts pour limiter la capacité disponible n’ont pas été couronnés de succès. En effet, le taux de fret spot moyen sur l’ensemble des routes Est-Ouest a baissé de 26 %, et de 42 % en sortie d’Asie vers l’Europe. Mais le pire est à venir, rappelle Drewry. « Les transporteurs vont être obligés d’aller plus profond en 2016. » Avec la faible croissance de la demande prévue, « ils vont devoir être encore plus créatifs pour cacher 1,3 MEVP de capacités supplémentaires qui arriveront cette année, principalement sur les dessertes Est-Ouest ». Près de 540 porte-conteneurs de 10 000 EVP à 15 000 EVP, et plus de 280 unités de plus de 15 000 EVP doivent être livrées, estime Drewry.
Des navires anciens seront ferraillés, d’autres partiront sur les trafics Nord-Sud dont les capacités d’absorption sont moindres (et au risque de déstabiliser les marchés, NDLR). Le taux de remplissage des 3 x 18 000 EVP que CMA CGM a décidé de mettre en ligne entre l’Extrême-Orient et la côte Ouest des États-Unis sera à suivre de près.