Six janvier, 15 heures, la troisième tentative pour le Stena-Carrier de rentrer dans le port de Marseille s’est une nouvelle fois soldée par un échec, contraignant le roulier affrété par Corsica Linea à faire des ronds dans l’eau au nord de la ville.
Dans la nuit du 5 au 6 janvier, les marins CGT de MCM ont tendu une aussière paralysant tout trafic maritime via la passe Nord. Le navire ne battra pas en retraite, quitte à ce que les clémentines pourrissent. C’est une question d’honneur… corse. « Nous attendrons le temps qu’il faudra », explique Daniel Berrebi, p.-d.g. de Baja Ferries, qui a rejoint le camp de Corsica Linea. Candidat au rachat de la SNCM, il s’était associé au début de l’été avec Francis Lemor (Stef, Méridionale) et vient de prendre des parts au capital de Corsica Linea. Rencontré le 6 janvier, l’armateur explique la stratégie du consortium. « Nous proposons un autre modèle économique en opérant des purs rouliers sans délégation de service public sur Bastia et Ajaccio. La DSP pourrait suffire sur les ports secondaires. Nous avons fait l’acquisition de l’Antares, qui sera rebaptisé Corsica-Linea-Uno. Il entrera en service le 15 février et remplacera le Stena-Carrier à la fin de son affrètement. Ce navire sera armé sous pavillon français ou européen, avec à bord 100 % de marins corses », précise Daniel Berrebi en réponse aux critiques de la CGT marins.
Le STC refuse la logique d’affrontement entre Corses
Résumer le blocage du Stena-Carrier à l’opposition entre Patrick Rocca et François Padrona serait une erreur. La victoire des nationalistes aux dernières élections régionales a rebattu les cartes, et l’actuelle délégation de service public, qui perdure jusqu’en octobre, pourrait bien être la dernière sous cette forme. C’est en tout cas la démonstration que tente de faire Corsica Linea en exploitant la ligne Marseille-Bastia sans subvention. Le STC marins dénonce une situation qui ne cesse de se dégrader dans les transports maritimes. « Nous continuerons à nous concentrer sur le fait que pour nous, la Corse doit parler d’une seule et même voix. Nous refusons la logique d’affrontement entre Corses, et nous allons continuer à rapprocher les points de vue, notamment entre Monsieur Patrick Rocca et le consortium, Corsica Maritima. Ceux-ci doivent, à notre sens, plutôt que de s’opposer, contribuer ensemble à l’édifice d’un réel outil de continuité territoriale garant d’un développement économique et social juste, et bien sûr encadré par la tutelle de la collectivité territoriale, animée comme nous l’avons vu plus haut par une volonté de faire aboutir ce projet commun. »
Double attaque en justice
Plusieurs constats d’huissiers ayant été effectués, Corsica Linea a décidé d’attaquer en justice l’État devant le tribunal administratif afin de dénoncer son « inaction » dans la gestion de cette crise, et attaque en parallèle la CGT devant le tribunal de grande instance pour entrave à la libre circulation dans le port.
Après les quatre jours de tension fin décembre au sud de la Corse, les insulaires ne cachent pas leur exaspération, envisageant même de venir à Marseille régler eux-mêmes la question, selon plusieurs sources.