Il faut mettre un terme à une approche par silo

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La taille des navires allant grandissant, le nombre de mouvements par escale accompagne le mouvement. « Il y a cinq ans, nous avions des navires de 10 000 EVP. Aujourd’hui, on entend parler de navires de 20 000 EVP. À chaque escale, nous réalisons jusqu’à 10 000 mouvements. Comment gérer ce flux de conteneurs vers l’hinterland sans créer des embouteillages monstres? » a commencé par s’interroger le président de la Feport, Gunther Bonz. Il est ressorti des différentes interventions lors de cette assemblée générale que le shipowner bashing ne sert à rien et que c’est par une meilleure approche de chaque partie de la chaîne logistique que se résoudront les problèmes. Et Lieselot Marinus, directrice à l’Ecsa (European Community of Shipowner Association), a rappelé que le monde maritime d’aujourd’hui ne se limite pas aux seuls grands navires. « Les mégas navires sont issus d’une réalité du marché et apportent une activité considérable pour l’économie. De plus, a ajouté Lieselot Marinus, il est réducteur de considérer notre industrie à l’aune de ces seuls navires. Nous disposons d’une flotte hétérogène. » Pour l’organisation européenne des armateurs, les navires d’aujourd’hui représentent des économies d’échelle dont toute la chaîne logistique profite. « Nous acquiesçons pour un dialogue entre les parties, mais il doit se faire à un niveau local plutôt qu’à Bruxelles. » Une opinion que le directeur général de MSC Belgique, Marc Beerlandt, a réaffirmée. « À Genève, les dirigeants de MSC décident de construire des navires plus importants parce qu’il y a une demande. Il ne faut pas le voir comme un mal. Les mégas navires sont les moteurs de notre industrie. » Et dans le contexte des taux de fret actuels, avec un conteneur à 200 $ entre Shanghaï et Rotterdam, « nous avons un réel besoin de ces navires ». Lamia Kerdjoudj-Belkaid, secrétaire générale de la Feport, a nuancé ces propos. Elle en a appelé à une approche plus réaliste. Si la croissance n’est pas au rendez-vous comme attendu, « nous devons alors tous nous mettre autour de la table pour imaginer une chaîne logistique qui demeurera efficace ».

Le marché ne croît pas aussi vite que la taille des navires

Dans une étude réalisée au mois de mars pour l’OCDE, Olaf Merk, responsable port et shipping de l’assemblée, a rappelé que les économies d’échelle des navires actuels sont six fois moins importantes que celles réalisées lors de l’agrandissement de la flotte précédente. « Il faut aussi prendre en compte que le marché ne croît pas aussi vite que la taille des navires. » Alors, selon Olaf Merck, la résorption des pics d’activités dans les terminaux se fera par une capacité de stockage accrue ou un retrait plus rapide des conteneurs. Mais, pour stocker plus de conteneurs, cela signifie des investissements plus importants dans les équipements portuaires, une augmentation de la taille des terminaux et une plus grande flexibilité du travail. « Le défi à relever est d’avoir une interdépendance de tous les acteurs de la chaîne logistique. » Il reste que ces mégas navires « ont compliqué le jeu ». Une difficulté qui s’est accrue par le manque d’information. La mise en ligne de navires plus grands se fait par les armateurs sans qu’il y ait un véritable dialogue avec les autres opérateurs de la chaîne logistique. Boris Wenzel, président de Noatum, manutentionnaire espagnol, s’est inquiété de cette situation. « Nous demeurons dans l’incertitude la plus totale. Nous nous préparons à des navires encore plus grands sans savoir si cela sera une réalité et à quelle échéance. »

Arrêter de faire du « megaship bashing »

Michiel Nijdam, directeur de la stratégie du port de Rotterdam, a souligné pour sa part que le monde a besoin de navires plus grand compte tenu de la demande actuelle. « Il faut arrêter de faire du “megaship bashing” et se concentrer sur le dialogue entre tous. » Et Isabelle Ryckbost, secrétaire générale de l’Espo (European Seaports Organisation), a continué dans cette veine en rappelant que l’augmentation de la taille n’affecte pas uniquement le maritime mais aussi le ferroviaire, le fluvial et la route. « Nous avons besoin de plus qu’un accès maritime et d’un quai. Nous avons besoin d’un réseau terrestre pour répondre à la demande maritime. » Une position que le directeur de la DG Move, Fotis Karamitsos, est venu appuyer. « Nous avons mis le dossier des TEN-T sur le haut de la pile. Il faut une approche globale de ce dossier pour résoudre les vides entre les liens terrestres. » Il est revenu sur la politique portuaire dont l’objectif est de « faciliter le transport. Il ne s’agit pas uniquement des services portuaires mais de l’approche portuaire globale ».

Lamia Kerdjoudj-Belkaid, secrétaire générale de la Feport, a insisté sur la nécessité d’un dialogue entre toutes les parties de la chaîne logistique. « Nous ne pouvons pas discuter à deux ou trois en laissant de côté un des opérateurs. Il est essentiel aujourd’hui que nous fassions nôtre cette idée d’un dialogue ouvert et que nous la déclinions au niveau local. »

Elle est aussi revenue sur la position des manutentionnaires en Europe. « Nous investissons des sommes considérables dans les ports », a rappelé la secrétaire générale de la Feport. Un point de vue que le délégué général de l’Unim, Xavier Galbrun, nous a confirmé. « Un port ne se résume pas à l’autorité portuaire. Les manutentionnaires sont les premiers investisseurs, et pour continuer dans ce mouvement, nous avons besoin d’une sécurité domaniale. » Lamia Kerdjoudj-Belkaid a enfoncé le clou. « Quand nous investissons tous les deux ou trois ans dans un terminal dont nous avons une concession sur 25 ou 30 ans, nous ne pouvons pas avoir un retour sur investissement. » Un point qu’elle demande que l’on aborde à tous les niveaux. Autre élément important pour les manutentionnaires, l’organisation du travail doit s’adapter à toute la chaîne. Des pointes d’activité lors des escales des navires aux temps plus calmes, il faut que les manutentionnaires organisent le terminal selon les impératifs de toute la chaîne. S’est alors posée la question de l’automatisation dans les terminaux portuaires. Torben Seebold, vice-président de l’ETF, représentant les syndicats des dockers, a commencé par rappeler que l’automatisation « ne signifie pas un terminal sans aucun personnel, il est donc nécessaire d’entamer un dialogue avec les opérateurs ». Tout en reconnaissant que le mouvement vers l’automatisation est inévitable, le vice-président de l’ETF a aussi souligné que les cadences enregistrées dans des terminaux automatisés, comme celui d’APMT à Rotterdam, sont parfois plus faibles. « Nous avons vu des conflits s’ouvrir avec cette automatisation. Nous pourrons les résoudre entre nous, pas avec les banquiers ni les fonds de pension. »

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