Le port de Saint-Laurent-du-Maroni a été le grand port de la Guyane dès le xixe siècle. Lieu d’entrée des bagnards et centre de commerce de la Guyane, il s’est développé pour alimenter le commerce local. Port d’estuaire dont le chenal d’accès permet de remonter sur 15 km le fleuve avant d’atteindre le quai, il ne dispose d’un tirant d’eau que de 4 m avec la marée.
Pendant plusieurs décennies, le port a été la propriété de l’État. En 1969, il a été transféré au Conseil général qui l’a concédé à la CCI. En 2002, avec la loi de décentralisation, le port est revenu dans le giron de l’État. La gestion en a été confiée à une société d’État mixte (SEM) composée de la CCOG (Communautés des communes de l’Ouest guyanais), en actionnaire principal, et des utilisateurs. En 2009, le port est devenu la propriété de la CCOG qui a conservé la SEM jusqu’en 2014, date de la fin de la concession. Avec la fin de cette concession en avril 2014, la CCOG a décidé de placer la gestion du port dans une régie directe. Ainsi, la régie gère le port de commerce, le port piroguier et l’appontement du bac qui relie Saint-Laurent-du-Maroni à Albina, au Suriname.
Le port de Saint Laurent a connu des heures fastes jusque dans les années 2000. En 2002, il enregistre un trafic de 28 000 t, profitant des exportations de riz et de bois. « Mais, indique Christophe Dachary, directeur technique du port, une lente descente aux enfers a commencé à ce moment avec la fin du riz et des exportations de bois. Jusqu’en 2009, notre trafic n’a pas cessé de perdre de son volume. » Cette année-là, le port a traité 4 000 t de trafic environ. Depuis lors, l’arrivée d’un trafic de bio méthanol a permis au port de redresser la barre. En 2014, le port a réalisé un trafic de 14 000 t environ et il prévoit une croissance de 28 % en 2015 à 18 000 t.
Jusqu’en 2014, le port de Saint-Laurent-du-Maroni ne disposait que d’une ligne assurée par Soreidom pour l’aliment du bétail et les vracs. En 2014, Soreidom a ouvert une escale à Saint-Laurent sur son service depuis La Rochelle. Elle dessert le port de l’ouest guyanais et Paracaibo, dans la ville de Kourou. « Elle amène des engins divers, des vracs et du conventionnel et aussi des conteneurs », continue Christophe Dachary. Si le port gère le terminal, l’outillage présent est la propriété de la Soreidom. « Nous n’avons pas d’outillage en propre. Notre quai accepte une résistance de 1,5 t/m2, ce que nous devons renforcer », ajoute Jean Gontrand, élu à la CCOG en charge des infrastructures portuaires.
Problème de tirant d’eau
Le principal handicap du port du Maroni s’avère être le tirant d’eau du chenal d’accès. Il est aujourd’hui de 1,5 m mais peut accepter des navires d’un tirant d’eau de 4 m avec le système des marées. Le Maroni s’étend sur deux kilomètres de large. Le chenal dans le fleuve dispose d’une largeur de 150 m avec des fonds sableux. « Contrairement à Dégrad des Cannes, il suffit juste de draguer pour approfondir le chenal. » Et pour Christophe Dachary, trois points prioritaires ont été recensés: sur le site de Bacs aux Français, sur celui de Criquebœuf et devant l’office de tourisme.
Pour l’autorité portuaire de Saint-Laurent-du-Maroni, le développement est nécessaire. « La population guyanaise qui va s’accroître se situe actuellement dans l’Ouest guyanais. Demain, il faudra trouver des emplois et des biens de consommation pour cette population. Notre rôle dans le département va alors grandir », explique Jean Gontrand. De deux choses l’une, soit le port se développe en partenariat avec celui de Dégrad des Cannes, soit il développe son activité en propre. « Il faut que nous trouvions un accord avec le GPMG pour éviter que les camions empruntent la route entre les deux sites. » Le trajet de 250 km qui relie les deux villes se fait par une route à double sens. Pour les opérateurs de Saint-Laurent-du-Maroni, l’accord avec le GPMG serait de favoriser le report modal vers le maritime. Il reste que le port se situe aussi à 160 km de Paramaribo, port du Suriname, sur lequel il pourrait s’appuyer pour se développer.
L’enceinte portuaire comprend un quai de 100 m pouvant accueillir des navires de 120 m au maximum, et d’un terre-plein de 3 500 m2 dont un hangar de 1 000 m2.
Démographie en hausse
La pression démographique n’est pas un vain mot en Guyane. Des 10 000 habitants recensés dans les années 1980, elle a vu sa population passer à 80 000 habitants en 2015 et les prévisions tablent sur 430 000 en 2030, dont 230 000 auront élu domicile dans la partie ouest, aux environs de Saint-Laurent-du-Maroni. « Le maire veut développer la commune pour vendre Saint-Laurent-du-Maroni afin de faire face à la pression démographique, explique Jean Gontrand. Pour apporter du travail aux populations locales, il contacte régulièrement des groupes industriels pour les inviter à s’implanter dans la commune. Le port doit être au service du développement économique de la CCOG. » Pour développer l’économie, il souhaite s’appuyer sur l’infrastructure portuaire et l’agrandir. D’abord, pour le dragage, le port a entamé avec le GPMG une réflexion pour la mutualisation de la drague afin de maintenir le chenal à des niveaux supérieurs aux niveaux actuels. Ensuite, sur l’enceinte, des terrains sont libres entre la zone du bac, qui relie le Suriname à Saint-Laurent, et le port Ouest. « Nous étudions les programmes des travaux mais nous avons aussi mis en place une conférence portuaire avec les utilisateurs: armateurs, chargeurs, transitaires », explique Christophe Dachary. Une seconde réunion de cette conférence s’est déroulée le 27 novembre pour y constituer des groupes de travail. « Nous allons remonter la chaîne logistique en étudiant tous les points avec tous les partenaires pour recenser les besoins et les moyens. Nous voulons que les commerçants s’approprient le port », insiste Jean Gontrand. Et l’élu de la CCOG continue son argumentation en rappelant la nécessaire volonté politique locale et départementale. « La zone de Saint-Laurent va obligatoirement croître, ne serait-ce que naturellement par la croissance démographique. Il faut que le port retrouve sa place dans l’économie locale. » Le projet de mettre un nouveau bac entre le Suriname et Saint-Laurent sera un atout pour le port. L’actuel ne peut prendre qu’un camion à la fois. Le futur bac pourra accepter quatre camions à chaque rotation. Ensuite, en draguant d’un mètre le chenal d’accès, la flotte capable de rejoindre Saint-Laurent sera multipliée par vingt. Et pour les quinze à vingt prochaines années, la direction du port envisage de créer une véritable zone industrialo-portuaire avec, en arrière-plan, un « port » fluvial à Apatou, ville dont la population grandit chaque année.