La machine se grippe à Rotterdam dans le transport conteneurisé. Les derniers chiffres publiés par la place portuaire néerlandaise témoignent de ces signes d’essoufflement. La mauvaise surprise vient de la baisse de 0,2 % des volumes déchargés à Rotterdam, entre janvier et septembre. Cette dégradation de la situation est due à plusieurs vents contraires qui se sont conjugués ces derniers mois. Au global, faisant pâle figure par rapport à 2014 (+ 5,8 % de volumes conteneurisés transbordés à 12,3 MEVP, pour + 5,2 % en poids à 127,6 Mt), l’activité des neuf premiers mois de l’exercice en cours n’a connu qu’une modeste croissance de 1 % en volume, à 9,3 MEVP, et de seulement 0,2 % en poids à 96 Mt de marchandises.
De fait, le port de Rotterdam est loin des objectifs de croissance affichés jusqu’à présent dans la branche conteneurisée. « L’activité est actuellement en dessous du niveau de croissance prévue de 3 % à 4 % par an », concède la société d’exploitation du port.
Mise en route difficile des deux nouveaux terminaux
Il y a deux raisons principales à cette contre-performance: le ralentissement de l’économie chinoise qui s’est greffé sur la mise en exploitation laborieuse, depuis l’été dernier, des deux nouveaux terminaux conteneurisés d’ECT et d’APM dans la zone portuaire Maasvlakte 2.
« Ces deux terminaux seront en rodage jusqu’en 2016 », prévoit le port de Rotterdam. « Ils tournent actuellement à la moitié de la capacité prévue. La prise en charge d’un navire est donc deux fois plus longue. De plus, les installations de l’ancienne zone portuaire fonctionnent déjà à plein régime. À l’heure actuelle, les possibilités de croissance dans le secteur conteneurisé restent limitées », explique un porte-parole de la société d’exploitation.
Cette saturation s’est traduite par un effet de vases communicants au profit d’Anvers. Le port belge voisin a en effet enregistré une hausse de 8 % de ses transbordements conteneurisés entre janvier et septembre.
Concurrence chinoise et climat social
Mais la plus grosse menace provient surtout de la Chine. De fait, près d’un quart du fret déchargé à Rotterdam est d’origine chinoise: machines et équipements (23 %), produits chimiques (15 %), textile (14,1 %), métaux (11, 1 %), meubles (9,1 %), denrées alimentaires (7,1 %). L’année dernière, l’embellie du commerce avec l’empire du Milieu a même permis au premier port européen de voir le nombre de conteneurs provenant des quais chinois augmenter de 9 %, pour atteindre un volume de 12,2 Mt.
En regard, et pour l’heure, les perspectives de reprise de l’activité en provenance de Chine dans les prochains mois restent en point d’interrogation. « Les développements à venir sur le marché chinois s’avèrent difficiles à prévoir », reconnaît la société d’exploitation du port.
Pour assombrir le tableau, un autre facteur risque de gripper un peu plus la machine de Rotterdam: le climat social. Selon les prévisions, l’automatisation grandissante des terminaux va faire disparaître quelque 700 emplois à l’horizon 2017.
S’annonçant tendues, les négociations sur les prochaines conditions de travail, qui viennent de s’ouvrir entre les partenaires sociaux, ont l’allure d’un conflit social en puissance. Une anecdote à ce sujet permet de s’en convaincre: dans les documents remis récemment aux entreprises portuaires, les syndicats ont fait part de leur exigence concernant une garantie des emplois « jusqu’en 2024 ». Incrédules, les patrons ont d’abord pensé que le texte comportait une erreur de frappe… C’est dire combien les positions des partenaires sociaux sont éloignées.
Trois exploitants de terminaux dominent le port
APM possède deux terminaux dédiés aux transbordements de conteneurs. Ses installations de Maasvlakte 1 s’étendent sur 100 ha pour une longueur de quai de 1 600 m. La capacité annuelle de transbordements porte sur 3,3 MEVP. Le nouveau terminal d’APM (Maasvlakte 2) dispose d’un quai de 2 800 m pour les navires de haute mer (1 000 m exploitables durant la première phase d’exploitation). Pour le trafic fluvial, un quai de 500 m de long et un terminal ferroviaire assurent les acheminements de marchandises vers l’hinterland.
ECT exploite deux terminaux à Rotterdam. Le plus important, ECT DeltaTerminal, est implanté sur Maasvlakte 1. Il a une superficie de 265 ha pour une longueur de quai de 3,6 km. La profondeur maximum des eaux atteint 17,5 m. À ces installations s’adosse un terminal dédié au transport fluvial: ECT Delta Barge Feeder Terminal (7,5 ha de superficie, 800 m de quai, 10,5 m de profondeur des eaux). L’Euromax Terminal Rotterdam (Maasvlakte 2) s’étend sur 84 ha (phase 1) pour une longueur de quai de 1,5 km. Les grues travaillent sur une rangée de 23 conteneurs.
Le terminal RWG (Rotterdam World Gate), dans la zone Maasvlakte 2, dispose d’une capacité de transbordement de 2,35 MEVP par an. Outre les transbordements maritimes bénéficiant de 20 m de profondeur des eaux, les installations sont conçues pour permettre d’acheminer en aval, par voie fluviale ou ferroviaire, 65 % des marchandises débarquées.