À la croiséedes chemins

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L’année 2015 n’est pas encore terminée, mais à Hambourg, les jeux sont déjà faits: l’exercice 2015 est l’un des plus mauvais de l’histoire du port. Avec 4,5 MEVP au premier trimestre, il accuse une chute de 7 % de ses flux conteneurisés. Une contre-performance qui lui vaut d’être rétrogradé à la troisième place européenne, derrière son rival Anvers.

En cause: le recul des trafics avec la Chine qui cèdent 11 %, plombés par un yuan fort. Un scénario catastrophe pour Hambourg qui a tout misé sur la République populaire: sur ses terminaux, un conteneur sur trois provient ou est à destination de la Chine.

Autre point noir: la Russie. Conséquence des sanctions économiques imposées à Moscou, l’activité s’est littéralement effondrée: – 36 %. De quoi saper l’autre pilier de Hambourg qui a notamment bâti son succès sur les trafics de feedering en direction de l’Est.

Pour ne rien arranger, avec la baisse des prix du carburant, Hambourg a aussi perdu de son attractivité. En faisant escale à Hambourg, les navires peuvent rejoindre directement la mer Baltique via le canal de Kiel, sans avoir à contourner le Danemark. Ce raccourci de 250 milles nautiques permet aux armateurs d’économiser 70 000 € en moyenne. Le port allemand en a d’ailleurs fait l’un de ses grands arguments marketing. Ainsi, il y a trois ans, un tiers des conteneurs débarqués sur les quais du port poursuivaient leur chemin via le canal de Kiel. Une route qui perd de son intérêt alors que les prix du mazout repartent à la baisse. Beaucoup d’armateurs opèrent désormais, à moindre coût, des liaisons directes entre l’Asie et la mer Baltique.

Un problème structurel

Sur les bords de l’Elbe, certains relativisent, évoquant une crise passagère, qui s’arrêtera dès que le commerce avec la Chine et la Russie reprendra des couleurs.

Certains observateurs sont beaucoup moins optimistes. Ils estiment que d’importants problèmes structurels pénalisent aujourd’hui le port et menacent son développement. Selon eux, Hambourg aurait un train de retard sur l’évolution du trafic conteneurisé et la course au gigantisme des navires porte-conteneurs. De fait, le site doit composer avec une position géographique particulière. Ses quais, situés à l’intérieur des terres, sont reliés à la façade maritime par un chenal d’une centaine de kilomètres: l’Elbe. Problème, cette voie est trop peu profonde pour accueillir la nouvelle génération de porte-conteneurs. Actuellement, seuls les navires chargeant 10 000 EVP peuvent circuler. Faute de pouvoir accueillir les nouveaux géants des mers (qui peuvent transporter jusqu’à 19 000 EVP), Hambourg risque de se faire distancer par ses concurrents, comme Rotterdam, voire par le port en eaux profondes de Wilhelmshaven.

Pour continuer à exister, une seule solution: creuser l’Elbe pour gagner un mètre de tirant d’eau. Un immense chantier que la ville hanséatique tente de lancer depuis de nombreuses années. En vain: le projet est bloqué par des associations de défense de l’environnement. Le dossier est désormais entre les mains de la justice, embourbé dans une interminable bataille de procédure: aucune décision n’est attendue avant au mieux l’année prochaine. Cette incertitude pèse de plus en plus sur le port, avec in fine le risque de se retrouver à jouer les seconds rôles. Signe des temps, les experts du Sénat viennent de revoir sensiblement à la baisse les prévisions de croissance du site: d’après eux, Hambourg devrait atteindre 11,7 MEVP d’ici à 2017. Il y a cinq ans, ils tablaient sur 17,4 MEVP, soit un tiers de plus.

HHLA se taille la part du lion

Avec 7,2 MEVP manutentionnés l’an dernier, HHLA est de loin l’opérateur portuaire le plus important à Hambourg. À elle seule, la société historique, fondée en 1882, contrôle trois des quatre terminaux dédiés aux trafics conteneurisés. Elle ne laisse qu’une petite part du gâteau à Eurogate: un seul terminal et 23 % de parts de marché.

Incontournable à Hambourg, mais à l’international, en revanche, HHLA fait figure de « nain ». Le groupe est présent uniquement à Odessa où il enregistre des résultats modestes: autour de 300 000 EVP par an. Ces dernières années, le groupe s’est néanmoins développé dans le transport ferroviaire, multipliant les lignes dans l’hinterland, en particulier vers l’Europe orientale: une façon de renforcer la position stratégique du port qui se présente comme un trait d’union entre l’Est et l’Ouest. Ce développement lui permet aussi d’amortir la chute des flux sur ses terminaux portuaires. HHLA a ainsi réussi à faire progresser ses bénéfices au premier semestre, malgré la baisse d’activité sur ses quais.

À l’inverse, Eurogate, né en 1999 de la fusion des sociétés allemandes Eurokai et BLG Logistics Group, est le plus grand opérateur de manutention portuaire de conteneurs en Europe. Il est présent dans onze ports différents et cinq pays. Cette couverture lui permet d’encaisser le recul de l’activité à Hambourg. Eurogate a lancé un grand chantier pour augmenter de moitié ses capacités dans le port et atteindre 6 MEVP d’ici 2019.

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