La Chine devient un acteur majeur sur le marché céréalier

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Dans son rapport du 30 juillet, l’ICG (International Grain Council) estime la production mondiale de céréales sur la campagne 2014/2015 aux environs de 2,01 Mdt, soit une hausse de 0,3 %. Un chiffre qui se place à un niveau record. Dans le même temps, 322 Mt de céréales se sont échangées dans le monde, soit une hausse de 3,8 %. En termes de production, l’Union européenne conserve sa seconde place derrière les États-Unis avec 323,6 Mt parmi les principaux exportateurs. En Amérique du Nord, les États-Unis ont réalisé une production record avec 432,6 Mt. Ajoutant la Chine parmi les principaux producteurs, malgré le fait que l’empire du Milieu soit peu présent sur la scène internationale, sur la dernière campagne, l’ICG estime les exportations chinoises aux alentours de 900 000 t).

Des sorts divers

L’analyse par type de céréales démontre des sorts divers. Ainsi, du côté du blé, les deux récoltes consécutives à des niveaux très élevés pèsent sur le prix. La production mondiale de blé a progressé de 1,1 % à 721,4 Mt. La campagne 2014 a commencé avec des stocks élevés, et au cours des douze mois, si les différentes utilisations ont été en progression, la diminution des exportations a fait grossir les stocks de 5,8 % en fin de campagne à 199,6 Mt. Une situation qui s’est manifestée dans les mêmes conditions pour le maïs et le soja. Parmi les grands pays exportateurs de céréales, les États-Unis, le Canada, l’Australie, l’Afrique du Nord et le Proche-Orient ont subi des baisses de production. Une diminution largement compensée par la bonne activité céréalière remarquée en Europe. Au Canada, cette baisse est toute relative, explique FranceAgriMer dans son analyse du mois de juillet. Avec une récolte de 37,5 Mt en 2013, le Canada a affiché un record par rapport aux récoltes sur le quinquennat précédent. Avec 29 Mt en 2014, il revient à des niveaux plus conformes à ses moyennes tout en restant sur le haut de la fourchette. Aux États-Unis, la baisse de rendement n’a pas permis de réitérer le record de 2013. En Australie, la sécheresse des mois d’octobre et de novembre a pesé sur les rendements à l’hectare. En Afrique du Nord et au Proche-Orient, les baisses sont liées aux aléas climatiques. Le Maroc et l’Algérie ont vu leurs récoltes s’amoindrir, quand la Tunisie a récupéré après la catastrophe de 2013. Dans les pays du Proche-Orient, le conflit en Syrie a divisé par deux la production quand les pays producteurs traditionnels comme la Turquie et l’Iran ont souffert de conditions météorologiques désastreuses pour le blé.

L’Union européenne, premier producteur de blé

L’Union européenne a confirmé sa première place de producteur mondial de blé grâce au meilleur rendement et à l’augmentation du nombre de surfaces. À l’est de l’Europe, Russie et Ukraine ont enregistré une bonne tenue de leur production et cela malgré la baisse du nombre de surfaces en Ukraine et du conflit local. En revanche, le Kazakhstan ayant perdu des surfaces et du rendement voit sa récolte s’éroder. Enfin, en Argentine, après deux années difficiles, la météo et des rendements meilleurs permettent au pays de revenir à des niveaux conformes à ses moyennes précédentes. Quant à la Chine et l’Inde, si ces deux pays ne sont pas des acteurs majeurs à l’exportation, l’amélioration de leur production est toujours signe d’une demande moindre en importation. Ainsi, en Inde, la production nationale de blé a progressé de 40 % en cinq ans à 69 Mt.

La Russie, premier fournisseur de l’Égypte

Forts de ces récoltes en progression, les échanges internationaux de blé se maintiennent malgré une légère baisse sur la campagne. À fin mai, 153 Mt de blé ont été échangées, soit une baisse de 1,9 %, mais tout en restant bien supérieure à la moyenne quinquennale de 140 Mt. Selon FranceAgriMer, cette baisse s’explique principalement par le recul de la Chine (– 73 %) sur le marché international voire à se cantonner à l’achat de blé dans les pays proches comme le Vietnam ou les Philippines. À l’inverse, l’Union européenne a été un acteur important à l’importation (+ 37 %) malgré sa récolte record pour compléter un manque dans les céréales de haute qualité. Cette tendance d’un volume élevé dans les échanges internationaux est aussi liée au prix du blé dont les cours mondiaux ont baissé. L’Égypte s’affiche toujours en première position des importateurs mondiaux avec 10,5 Mt. La politique nationale en faveur d’un pain produit à base de blé local devrait permettre au pays de réduire de 30 % ses importations. La Russie demeure le premier fournisseur de l’Égypte tous secteurs confondus. Les achats réalisés par l’organisme gouvernemental, le Gasc, ont privilégié les céréales européennes avec en première place la France.

La Pologne a fait office d’outsider

Dans le concert mondial des producteurs de blé, l’Union européenne prend la pole position sur la dernière campagne avec une hausse de 6 % de ses exportations. Elle passe devant les États-Unis dont le volume à l’export a perdu, en 2014/2015, 26 % à 23,2 Mt. Pour l’Union européenne, cette campagne fait office de record en matière d’exportation. Le rôle de l’euro a été prépondérant au cours de ces douze mois. La chute de la monnaie européenne a permis aux blés et autres céréales de devenir compétitifs sur les marchés mondiaux. En outre, en accueillant la Lituanie comme son 19e membre de la Zone euro, l’Union européenne pèse encore plus lourd sur les marchés mondiaux compte tenu de sa production. Outre l’effet monétaire, la chute vertigineuse des taux de fret a participé à renforcer les échanges mondiaux. Au mois de février, le Baltic Dry Index s’est situé à 509 points, soit un niveau au plus bas depuis cinq ans. Enfin, l’absence partielle de la Russie sur les marchés mondiaux en raison de la mise en place de février à mai d’une taxe à l’exportation a bénéficié aux pays de l’UE. Pour le blé, la France en première position suivie de l’Allemagne réalisent à elles deux 60 % du volume exporté depuis l’UE. Dans son analyse du mois de juillet, FranceAgriMer note que 10, Mt ont été exportées depuis les ports français en céréales. Mais avec 10 Mt pour du blé français, ce sont quelque 800 000 t de blé français réalisées par des opérateurs étrangers au départ des ports français. Les destinations de ces blés demeurent identiques d’une année sur l’autre avec néanmoins des fournisseurs qui changent. L’Algérie, premier pays de destination devant l’Égypte, a préféré s’approvisionner sur l’Allemagne et la Pologne plutôt que la France. D’ailleurs, cette année, la Pologne a fait office d’outsider en faisant une perçée. Elle se place à la quatrième position des exportateurs de blé avec 2,5 Mt expédiées vers les pays tiers. Sur l’orge, la France et l’Allemagne restent au coude-à-coude avec plus de 11 Mt produites par pays devant l’Espagne et le Royaume-Uni qui ont tous les deux vu leur production d’orge se réduire. Au global, la production d’orge a baissé dans l’UE mais les exportations ont atteint un niveau « remarquable », comme le souligne FranceAgriMer. « Il faut remonter à la campagne 1999/2000 pour trouver un volume supérieur », note l’organisme français. Selon l’organisme français, les exportations devraient avoisiner les 10,5 Mt sur cette campagne. Les deux principaux fournisseurs sont la France et la Roumanie avec en cumulé presque 40 % de ce volume. Une céréale qui est principalement destinée aux pays du Proche et Moyen-Orient avec en tête de liste l’Arabie Saoudite. Des produits qui viennent principalement d’Allemagne, non pas que la France ait vu ses capacités d’exportation se réduire, mais surtout parce que les opérateurs français se tournent vers la Chine. Quant au maïs, la production communautaire s’établit à 77,5 Mt, soit une hausse de 20 % et un record historique pour le Vieux Continent. Avec cette récolte record en Europe, les importations de maïs ont baissé sur la campagne de 36 % à 9,2 Mt. Dans la même veine, les exportations de maïs ont fortement progressé en atteignant 3,6 Mt, en hausse de 38 %.

France: l’intracommunautaire et la Chine dopent les exportations

La campagne céréalière en France a été particulière en 2014/2015. Les pluies du mois de juin, intervenant sur des céréales après une période de grande chaleur, ont altéré la qualité. Pour le maïs, les pluies estivales ont été bénéfiques. Au global, FranceAgriMer estime le volume global de céréales récoltées en France à 71,5 Mt, soit en progression de 8 %.

En regardant plus en détail, il apparaît que du côté des blés tendres la récolte a été en hausse de 2 % à 37,5 Mt, un niveau record depuis 2009. Même scénario du côté des orges qui voient leur production augmenter par la hausse du nombre de surfaces et le rendement. Pour le maïs, la baisse des surfaces n’a pas engendré de recul. La hausse de la production liée au meilleur rendement des sols français a fortement joué.

Les exportations françaises se sont surtout tournées vers l’intracommunautaire, même si les pays tiers représentent encore une part importante de ces flux. Pour les blés tendres, le volume exporté par la France devrait atteindre 18,8 Mt, soit 200 000 t de moins que la campagne précédente. Un repli de 1 % avec une hausse des expéditions en intracommunautaires que FranceAgriMer estime aux environs de 7,7 Mt, en hausse de 13 %, quand les expéditions vers les pays tiers devraient perdre 9,9 % à 11,1 Mt. Les six premiers mois de la campagne ont démarré avec peu d’embarquement pour s’accélérer au mois de février et de mars, tirés par la demande des chinois. Pour les pays tiers, si l’Algérie demeure en pole position des destinations, la France n’est plus le principal fournisseur sur cette campagne et notamment en raison de la qualité de ses blés. Quant aux pays d’Afrique subsaharienne, le volume exporté demeure à un niveau élevé avec 2,1 Mt de blés tendres exportés. Pour les orges, les ventes vers la Chine au cours de la campagne ont dopé les exportations. Cette campagne est devenue un record pour les orges. La France devrait exporter 6,6 Mt, dont 2,7 Mt vers la Chine. Un bon point sur la Chine mais le revers de la médaille a été sur l’Arabie Saoudite qui a réduit ses approvisionnements français de 88 % à 80 000 t. En offrant des capacités aux Chinois, les volumes vendus sur l’intracommunautaire ont baissé à 3 Mt, soit le plus faible niveau depuis 2013.

Sur le maïs, les exportations se sont élevées à 7 Mt, principalement sur l’UE. Avec les disponibilités liées à la récolte, dès le début de la campagne, le maïs a connu une forte progression en s’affichant à 53 % de hausse sur les dix mois de la campagne.

Enfin, sur le blé dur, la baisse des exportations est liée à la diminution des surfaces. FranceAgriMer prévoit 1,2 Mt exportées sur la campagne, soit le niveau le plus bas depuis 2003/2004. Une diminution qui se répercute tant vers les pays tiers comme ceux du Maghreb, de l’Égypte ou de la Côte d’Ivoire que les expéditions en intracommunautaire.

Campagne 2015/2016: des perspectives en léger repli

Selon les premières estimations réalisées par le CIC (Conseil international des céréales), la campagne commencée en juillet serait en retrait par rapport aux chiffres exposés lors de la précédente. Néanmoins, dans son exposé, FranceAgriMer reste prudent. Fin juin, les effets climatiques n’ont pas encore pu être totalement vérifiés dans l’hémisphère Nord. Les pluies en Amérique du Nord, la canicule en mai et juin en Europe et l’arrivée d’El Niño en Australie en fin d’année pourrait jouer un rôle considérable. Ainsi, le CIC estime à 715 Mt la production de blé en 2015. Une baisse qui pourrait s’accentuer parce qu’elle établit une hausse de la production aux États-Unis mais sans avoir pu qualifier toute la production. Les autres principaux exportateurs verraient leur production se réduire. En revanche, les effets climatiques devraient largement perturber la production de blé en Inde et obliger le sous-continent à revenir sur les marchés internationaux après les avoir délaissés pendant cinq ans.

La même hypothèse se dessine pour les orges avec une baisse de la production de 3 % à 136,9 Mt. Pour l’orge, les regards se tournent vers la Chine. Elle devrait réduire de 13 % ses importations d’orge faisant ainsi baisser le niveau mondial des exportations de 17 %. L’empire du Milieu a mis en place une nouvelle politique obligeant les exportateurs privés internationaux à d’abord acheter des céréales locales avant de pouvoir importer des produits en Chine. Même scénario sur le maïs qui doit se réduire de 4 % à 963 Mt. La stabilité des surfaces en Europe, les fortes pluies aux États-Unis et une production chinoise repartie à la hausse risquent de modifier sensiblement le paysage des échanges internationaux de maïs.

En Europe, les estimations prévoient une baisse de production. Les blés devraient perdre 5 % en raison d’une baisse des surfaces et du rendement. Une situation qui se cumule avec la canicule du printemps, « sans que cela ne suscite d’inquiétudes de la part des opérateurs », note le rapport d’analyse de FranceAgriMer. En Allemagne, le déficit hydrique est estimé à 20 %. Les orges vont suivre le mouvement avec une baisse de 4 % environ tout comme le maïs qui devraient perdre 11 %.

Enfin, en France, si la production est considérée comme meilleure pour les blés. Les cultures jugées bonnes à très bonnes représentent 85 % des surfaces contre 72 % un an plus tôt. Globalement, la production de céréales à paille a été plutôt bonne malgré des conditions météos parfois difficiles (canicule suivie de pluies diluviennes dans le sud-est du pays). Au global, la France enregistre un déficit de 20 % d’eau. L’orge d’hiver a vu la hausse des surfaces exploitées et permettra de rester présent face à la demande chinoise toujours active sur les quatre prochains mois. La diminution attendue devrait se répercuter sur les orges de printemps dont le volume semé est en baisse de 11 %.

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