« Cela ne peut plus durer. Nous perdons de l’argent et nous sommes professionnellement de moins en moins crédibles sur le marché portuaire », clame Pasquale Legora de Feo. Le constat brossé par le directeur général de Co.Na.Te. Co, le premier opérateur napolitain, est particulièrement amer. Depuis deux ans, le volume de trafic de conteneurs est ponctuellement revu à la baisse. Un scénario inquiétant qui s’explique par deux raisons malheureusement étroitement liées. Depuis plusieurs années, les opérateurs réclament le dragage des fonds portuaires, une opération régulièrement repoussée mais indispensable pour élargir les quais et faciliter le passage des navires de nouvelle génération. Ce nettoyage en profondeur permettrait aussi de poser la première pierre du nouveau terminal déjà baptisé Terminal du Levant. Or pour draguer les fonds et construire le terminal, il faudrait d’abord bâtir un bassin pour entasser le sable et les déchets. Mais pour construire le bassin, il faudrait une gouvernance stable à la tête de l’autorité portuaire et non pas des commissaires nommés de six mois en six mois, et par conséquent incapables de prendre des décisions. Un véritable casse-tête chinois.
Selon la feuille de route peaufinée il y a une dizaine d’années, les travaux auraient dû démarrer en 2007. « Il faut bouger si nous voulons survivre, nos structures sont obsolètes, nous ne sommes pas en mesure d’accueillir les porte-conteneurs de nouvelle génération qui sont trop grands pour passer dans le port, et puis il n’y a pas assez de place pour leur faire jeter l’ancre. Dans ce contexte, il est évident que les armateurs préfèrent aller à La Spezia, Port Saïd ou Gênes », regrette Pasquale Legora de Feo.
Plan d’économies
Durant le premier trimestre, le volume de trafic a légèrement augmenté. Mais ce résultat (+ 3,88 % par rapport aux trois premiers mois de 2014) ne compense pas les pertes enregistrées durant les deux dernières années. À titre d’exemple, Co.Na.Te.Co a perdu l’équivalent de 100 000 conteneurs depuis 2013. Pour éviter le pire, Co. Na.Te.Co a lancé un plan d’économies notamment au niveau des frais de roulement et des services d’outsourcing qui ont été rapatriés dans les locaux du manutentionnaire. Pour réduire les coûts d’exploitation salariale, une partie du personnel a été placée au chômage technique quatre jours par mois durant toute l’année 2014. Afin d’optimiser le rendement, Co.Na.Te.Co a réorganisé l’organigramme du service technique. Dans l’immédiat, le manutentionnaire n’envisage pas l’adoption de mesures draconiennes, c’est-à-dire une vague de licenciements. « Mais si le volume de trafic continue de chuter, nous allons bien être obligés de réduire la masse salariale », constate Pasquale Legora De Feo. En avril, le manutentionnaire a vu passer 16 000 conteneurs. Trop peu pour lui. En rebond, les syndicats estiment que l’avenir sur le court terme des 363 salariés de Co. Na.Te.Co et des 27 de Soteco (l’autre manutentionnaire napolitain) ne ressemble plus du tout à un long fleuve tranquille. Avec la baisse de 12 % du volume de trafic de conteneurs enregistrée sur les deux dernières années et les décrets d’injonction de paiement de 4,5 M€ expédiés par l’autorité portuaire aux deux manutentionnaires qui font la sourde oreille pour leur réclamer le paiement des concessions du domaine maritime public, des licenciements pourraient être en effet rapidement envisagés.