Le 8 juin, Calais s’est transformé en chapelle ardente. Ce fut d’abord l’annonce du décès de Didier Capelle. Lourdement critiqué ces dernières semaines par les personnels de la Scop SeaFrance, il a été l’initiateur de la première Scop maritime française en créant, avec les anciens salariés de SeaFrance, une structure pour exploiter les trois navires. Il a succombé dans la nuit du 7 au 8 juin des suites d’une crise cardiaque, quelques heures après que Jacques Gounon lui a annoncé la cession de deux navires sur les trois appartenant à Eurotunnel. Ce fut la seconde annonce du jour. Le 8 juin, Jac– ques Gounon, président d’Eurotunnel, a annoncé la cession de deux des trois navires au groupe danois DFDS. Les Berlioz et Rodin vont donc passer sous la propriété de l’armement danois. « La position de la CMA (Competition Market Authority, autorité britannique de la concurrence) ne laissait aucune place à Eurotunnel pour s’investir et se développer dans ce secteur. Nous avons donc décidé de vendre deux navires à l’offre qui nous est apparue la moins mauvaise, celle de DFDS. » Pour le président d’Eurotunnel, cette décision est attristante mais « nous pouvons être fiers du travail accompli ». Les salariés de la Scop SeaFrance seront partiellement repris par l’entreprise DFDS. Contacté sur le choix du pavillon de ces deux navires cédés, DFDS n’a pas répondu à l’heure où nous mettons sous presse. DFDS a annoncé que cette vente sera effective le 3 juillet, ce qui évitera toute interruption de service.
Eurotunnel conserve le Nord-Pas-de-Calais
Le troisième navire, le Nord-Pas-de-Calais, un pur fréteur, reste entre les mains d’Eurotunnel. « Nous souhaitons bâtir une offre maritime complémentaire des navettes fret d’Eurotunnel. Les contestations auprès de la CMA se font surtout sur l’activité passagers. Avec un navire, nous représenterons 4 % du marché fret du détroit », a continué Jacques Gounon.
Ainsi, une partie du personnel de la Scop SeaFrance sera repris avec le Nord-Pas-de-Calais. Quant à la structure qui gérera cette activité maritime, Jacques Gounon s’est dit intéressé par l’idée d’imaginer une solution avec Jean-Michel Giguet et Raphaël Doutrebente, les anciens dirigeants de la Scop SeaFrance.
Dans ce contexte, la Scop SeaFrance risque bien de vivre ses dernières heures. La structure en charge de l’exploitation des trois navires, MyFerryLink SAS, conservera un rôle pour l’affrètement du navire d’Eurotunnel à la division en charge de l’exploitation commerciale de ce navire chez Eurotunnel.
Après l’annonce de la vente des navires à DFDS par Eurotunnel, l’expectative règne sur les quais calaisiens. À la Chambre de commerce, on veut croire à une « bonne issue », mais on regrette l’absence de communication de DFDS. Chez les salariés de la Scop SeaFrance, la crainte est évidente. « Cela va laisser 300 personnes sur le carreau! » Quand le p.-d.g. d’Eurotunnel, Jacques Gounon, a annoncé que le contrat avec la Scop ne serait pas reconduit, une réaction de colère a été immédiate. Ce jour-là, les trois navires sont restés à quai. Mais le syndicat a demandé que l’on reprenne la mer. Pour lui, « il n’est pas l’heure de déclencher la guerre ». Cela fait dire au député européen Jacky Hénin que « rien n’est véritablement joué ».
En ce début de semaine, la disparition du président du conseil de surveillance de la Scop, Didier Cappelle, par-delà les désaccords et les polémiques, ajoute à la morosité ambiante.