Les années passent, les problèmes restent

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Le 5 et 6 mai, le grand amphithéâtre Lavoisier de la Maison de la Chimie était plein, pour les premières conférences. Assureurs, courtiers en assurance, commissaires d’avaries, avocats ont confirmé le succès de la 7e édition du Rendez-vous de l’Assurance Transports organisé par le Cesam (Comité d’Études et de Services des Assureurs Maritimes et Transports ) et la Fédération française des sociétés d’assurances.

Pour commencer la première journée, Patrick de la Morinerie, actuel Directeur-général d’Axa Corporate Solutions, a rappelé les grandes tendances de la demande mondiale d’assurance: le commerce mondial continuera, selon Swiss RE Economics Research & Consuting, à croître plus vite que le PIB mondial, les 10 prochaines années. Cette bonne nouvelle a été tempérée par le fait que les primes stagnent depuis 2012, en ce qui concerne les facultés et l’assurance corps. Les raisons n’en ont pas été clairement explicitées. Un surplus mondial de fonds qui cherche à s’employer, peut-être.

En 2014, la sinistralité a été marquée par une baisse de 40 % des pertes totales en deux ans et une hausse de 10 % du nombre d’accidents. Le rapport d’Allianz Global Corporate & Specialty est plus détaillé (voir JMM du 24 avril; p. 18). L’erreur humaine et les négligences sont les causes principales des accidents de navires. En ce qui concerne les marchandises, les sinistres les plus importants de ces cinq dernières années sont le fait de catastrophes naturelles et de cas de « misappropriation ». « Mais la massification des flux maritimes entraîne des concentrations de valeurs jamais atteintes ». Déjà largement évoqué en avril 2009, lors du 1er rendez-vous, ce problème ne semble pas trouver de solution. A priori, il ne fait même pas partie des « principaux travaux en cours » de la Commission Transports de la FFSA, tels que son président, Patrick de la Morinerie, a résumés ces travaux. Ils portent sur le projet de clause piraterie, les risques « cyber », le stockage et la « misappropriation » ainsi que sur les énergies marines renouvelables et les éventuelles sanctions en cas de non respect de la norme prudentielle Sova bilité 2. Une norme qui rencontre encore beaucoup de résistance de la part des assureurs français.

Au terme de sa prestation(1), Elie Cohen, directeur de recherche au CNRS-Sciences Po, a rappelé que l’heureuse époque où le taux de croissance des échanges de marchandises équivalait au double de celui du PIB mondial est terminée depuis la crise de 2007-2008. Autre fin annoncée; celle du modèle chinois des années 2000. La Chine est de moins en moins l’atelier mondial de l’assemblage. Elle conçoit, fabrique et assemble de plus en plus de sous-ensembles entrant dans la constitution de produits finis complexes ou non (électronique, par exemple). En d’autres termes, les échanges intra-asiatiques de produits semi-finis devraient baisser. La Chine ne sera plus à l’origine du sourcing mondial, souligne Elie Cohen, d’autant qu’elle a un marché national de plus d’un milliard d’habitants à servir.

Grâce au retour de leurs avantages compétitifs (énergie fossile bon marché, $ fort et coût du travail maîtrisé), les États-Unis ont retrouvé les moyens de mettre en œuvre, avec de bonnes chances de succès, leur volonté de se réindustrialiser. Bien sûr, plutôt dans le haut de gamme, comme le fait déjà Apple. Il faut cependant recréer des coopérations industrielles volontaires, ajoute Elie Cohen car la mode du « core business a fait disparaître les transferts technologiques entre les grands groupes et les PME, puis, finalement, éliminé les PME.

La régionalisation des chaînes de valeurs (de production) apparaît également en Roumanie et en Espagne.

Quelles retombées économiques des NTCI?

Se reconnaissant facilement comme un observateur de la vieille économie, Elie Cohen reprend l’argument de l’économiste américain Robert Gordon selon lequel la 3e révolution industrielle, celle du numérique, produit infiniment moins d’effets positifs sur l’économie que les deux premières. Les pays développés se sont désindustrialisés au profit des services dont les gains de productivité sont faibles, surtout si l’on examine les services à la personne. Il y a eu un gain de productivité de courte durée dans le secteur des NTCI mais il est terminé depuis le début des années 2000.

Depuis, toute dépense de Recherche et Développement dans la santé et dans les NTIC est devenu plus coûteuse. Elie Cohen reconnait qu’il est possible que l’on ne sache pas encore mesurer les retombées économiques des nouvelles technologies de la santé, de celles des nanotechnologies ou du numérique mais pour l’instant, cela produit peu d’effets concrets sur le PIB. « L’effervescence » technologique c’est bien, un effet positif sur l’économie serait encore mieux. À quoi servent donc les réseaux sociaux dans une négociation salariale collective Plus concrètement, la croissance économique des pays développés devrait continuer à rester modeste et celle des pays émergents, devrait rattraper le niveau de développement des premiers. Elie Cohen et Philippe Chalmin, directeur du master Affaires Internationales de Paris-Dauphine, ont souligné « l’aveuglement » des marchés vis-à-vis de la croissance du Brésil, essentiellement basée sur les matières premières. Plusieurs années de décisions politiques contestables amènent le Brésil à la récession économique, prévue en 2015.

Le « glas d’une mondialisation heureuse » est en train de sonner, estime Philippe Chalmin, en référence à la prochaine sortie du rapport 2015 de CyclOpe sur l’évolution des matières premières dans le monde en 2014 et les perspectives en 2015. Y sont posées les questions du « glas de la croissance », du « glas des guerres et des conflits? », et de celui de la « gouvernance internationale? » À ne lire qu’avec modération.

les interventions à ce 7e Rendez-vous de l’Assurance Transports sont disponibles en captation sur: http://lc.cx/Z32F

Accumulation de valeurs: il faudra bien s’y intéresser

« Le secteur doit se préparer à des pertes supérieures à un milliard de dollars à l’avenir dans le cas de porte-conteneurs » rappelle le rapport d’Allianz Global Corporate & Specialty (JMM du 25 avril, p. 18). Il doit également se préparer à appliquer la directive 2009 / 138 sur l’importance des fonds propres dont doivent disposer les assureurs par rapport aux risques assurés. Sa mise en oeuvre complète a été décalée au 1er janvier 2016. Il serait donc grand temps de savoir déterminer les différents risques pris notamment en matière d’assurance transport. Revient alors en mémoire la vieille idée de constituer une sorte de base de données mondiale devant recenser la situation de chaque conteneur assuré. Qu’ils le veuillent ou non, les assureurs sur facultés vont devoir « adresser » le problème comme l’on dit maintenant dans les cercles d’érudits.

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