Le 4 mai, l’Agence internationale de l’énergie (AIE) en partenariat avec le ministère de l’Écologie, du Dévelop pement durable et de l’Énergie (Medde) a dévoilé son rapport annuel consacré aux « Perspectives des technologies de l’énergie ». Chaque année, ce rapport de l’AIE présente une étude analytique et prospective mondiale de l’énergie pour les quarantes années suivantes, en lien avec l’innovation et les nouvelles techniques de l’énergie. L’édition 2015 de ce rapport est intitulée « Mobiliser l’innovation pour accélérer la lutte contre le changement climatique ». Ce titre marque la volonté de l’AIE de participer à la réflexion en cours au niveau mondial, dans le cadre de la préparation de la conférence des parties (COP21) de la convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC), programmée à Paris au cours de la première quinzaine de décembre 2015 (voir encadré). Une volonté à laquelle s’est associée le Medde par une « contribution volontaire » à la réalisation du rapport. Dans le résumé du rapport, l’AIE relève que l’année 2015 doit marquer un tournant dans l’action mondiale contre le changement climatique avec des dirigeants s’efforçant de parvenir à un accord intégrant des décisions volontaristes lors des négociations de la CCNUCC. Il est encore précisé dans le rapport: « Les responsables politiques devraient prendre en compte les multiples avantages que la transformation du système énergétique peut apporter à la société. Nous disposons en effet des instruments et des mécanismes nécessaires pour introduire des changements et des innovations profondes conduisant à un futur énergétique abordable, sûr et durable. Les tendances récentes mettent toutefois en évidence la nécessité d’accélérer l’innovation en matière de technologies énergétiques, ce qui exigera notamment un soutien politique et une nouvelle organisation des marchés ». Dans ce cadre, l’AIE détaille plusieurs recommandations notamment à l’intention des gouvernements des pays engagés dans une transition énergétique, « comme celle de fixer des stratégies et des objectifs de long terme, ce que la France s’efforce de mettre en place grâce à la loi sur la transition énergétique pour la croissance verte ». L’AIE invite à un triplement, au niveau mondial, des investissements publics en faveur de la recherche et du développement dans le secteur de l’énergie. Actuellement, ces investissements s’élèvent à 17 Md$ par an, dont environ 1, 1 Md$ pour la France. Selon l’AIE, seul un effort concerté pour l’innovation en direction des énergies dites « propres » permettra au monde d’atteindre ses objectifs climatiques et de limiter la hausse globale des températures à 2oc d’ici 2050.
Un accord juridiquement contraignant
Les gouvernements ont un rôle clé à jouer dans la création des opportunités de marché initiales, afin d’envoyer un signal fort pour stimuler l’investissement. Toutefois, l’implication des entreprises et industries du secteur est indispensable pour maintenir le réchauffement climatique mondial en deçà de 2oC et pour réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES) ou de CO2, poursuit l’AIE. « Les engagements annoncés par les États parties sont très loin des objectifs de 2oC. Aussi, il faut encourager les partenaires privés, les industriels à participer aux engagements pour accélérer le processus vers cet objectif. Les États et les gouvernements ne pourront pas tout faire seuls, ils ont besoin des acteurs économiques du secteur privé », a souligné Didier Houssin, directeur des politiques et des technologies de l’énergie durable à l’AIE. « Mobiliser le secteur privé doit être une priorité pour préparer l’après COP21 », a ajouté Maria Vander Hoeven, directrice exécutive de l’AIE. Elle est consciente que « cela ne sera pas facile mais c’est un défi majeur pour l’avenir et la réalisation des objectifs de la CCNUCC ». Un avis partagé par Paul Watkinson, chef de négociation climat au Medde, équipe interministérielle COP21: « Notre volonté est d’obtenir une mobilisation au-delà des États parties impliqués dans la réunion COP21 à Paris ». Selon Paul Watkinson, le travail actuel de l’équipe négociation climat au Medde est d’obtenir que les « États parties apportent dès que possible leur contribution, en précisant ce qu’ils prévoient comme mesures pour relever le défi de l’objectif de seulement 2oC d’ici 2050. Toutes les contributions constitueront un point de départ pour la négociation d’un accord lors de la COP 21 à Paris ». Paul Watkinson a donné quelques indications sur les ambitions des négociateurs français lors de cette réunion. La France souhaiterait parvenir à « un accord qui soit un instrument juridiquement contraignant internationalement avec une révision tous les 5 ans ». L’échéance de l’accord pourrait être 2050 ou 2060, avec un rendez-vous en 2030. Il comporterait un système de vérification des progrès réalisés par chaque État partie en fonction de critères ou de références encore à définir au plus tard la première quinzaine de décembre.
Un changement climatique d’origine humaine
La convention-cadre des Nations Unies sur les Changements Climatiques, dite « CCNUCC » (« UNFCCC » en anglais), a été adoptée au cours du Sommet de la Terre, de Rio de Janeiro, en 1992. Elle est entrée en vigueur le 21 mars 1994 et a été ratifiée par 196 « États parties ». Cette convention-cadre est un « texte universel de principe ». Il reconnaît l’existence d’un changement climatique d’origine humaine et donne aux pays industrialisés le primat de la responsabilité pour lutter contre ce phénomène. La conférence des parties (COP), composée de tous les États parties signataires, constitue l’organe suprême de la convention. Elle se réunit chaque année lors de réunions mondiales au cours desquelles sont prises des décisions pour respecter les objectifs de lutte contre les changements climatiques. Parmi ces objectifs figure l’ambition de maintenir le réchauffement climatique mondial en deçà de 2oC d’ici 2050, de réduire les émissions de gaz à effet de serre et de CO2. Les décisions ne peuvent être prises qu’à l’unanimité des parties ou par consensus. La COP qui se tiendra à Paris entre le 30 novembre et le 11 décembre 2015 sera la 21ème réunion de ce type, d’où le nom de « COP21 ».