« Nous pensons utile d’analyser toutes les données dépendant de la taille des navires. Et en particulier, les coûts d’infrastructures portuaires qui pourraient évoluer de façon diamétralement opposée à la tendance des coûts unitaires du navire. » Un porte-conteneurs de 24 000 EVP nécessitera des portiques d’une portée plus longue, des quais renforcés, des bassins d’évitage plus larges, des hauteurs d’eau plus grandes et de lourds investissements pour améliorer les dessertes routières et ferroviaires. Le représentant de l’une des plus importantes sociétés de classification, également conceptrice de navires, estime qu’un tel navire ferait 430 m de long contre 400 m pour un 19 000 EVP et 64 m de large contre 59 m pour son cadet.
La congestion portuaire qui est apparue cette année en Europe et en Extrême-Orient pourrait bien être un signe avant-coureur de la saturation des infrastructures portuaires.
Si les armateurs « insistent » pour avoir des 24 000 EVP, cela sera probablement techniquement réalisable du point de vue de l’architecte naval. Mais des navires plus longs nécessiteront des tôles plus épaisses en partie supérieure, jusqu’à 10 ou 11 cm, pour garantir la bonne tenue de la poutre navire. Cela posera quelques « défis » à relever aussi bien pour les chantiers que pour les sidérurgistes. La pontée comptera une couche de plus de conteneurs, qui seront donc empilés sur 12 hauteurs. Cela imposera des restrictions de poids car les normes actuelles exigent que les conteneurs chargés à leur poids maximal puissent être empilés sur 11 hauteurs.
Vœux pieux ou nouveau de logiciel?
Y a-t-il eu dans l’histoire récente de la construction navale internationale un seul exemple laissant penser qu’un armateur ait renoncé à faire construire un navire plus grand pour une raison de coût global de la chaîne de transport?
« C’est aux ports et autres fournisseurs de s’adapter aux navires, pas l’inverse », aurait déclaré, selon le directeur juridique de Mærsk Line North America, feu Mærsk Mc-Kinney Møller à son directeur technique qui s’interrogeait sur la sécurité des Triple-E (voir JMM du 4 avril, p. 14). Cette période serait-elle révolue depuis que tous les grands transporteurs conteneurisés contrôlent des filiales spécialisées dans la gestion de terminaux portuaires? Cela serait sans compter sur la concurrence à laquelle se livrent les grands ports voisins, soutenus plus ou moins officiellement par leurs autorités de tutelle, au nom du maintient de la compétitivité de leur économie nationale respective.
Le seul inversement de tendance connu concerne les quatre VLCC de 550 000 tpl (414 m par 63 m) que les Chantiers de l’Atlantique ont livrés entre 1976 et 1979, juste avant le 2e choc pétrolier. Tous les transporteurs de brut suivants ont eu un port en lourd bien inférieur.