Il reste une seconde affaire: celle des aides versées en 2007 et 2013 à la seule SNCM au titre du service « complémentaire » d’un montant similaire: environ 220 M€. L’État a déjà été condamné à se faire rembourser, ce qu’il n’a pas fait ou plus exactement ce que la Collectivité territoriale de Corse n’a pas fait car c’est elle qui est l’autorité délégante. Il lui appartient donc de se faire rembourser. L’État a fait appel mais cet appel n’est pas suspensif, a rappelé la Commission européenne en novembre 2013. Il y a de nombreuses raisons de penser que l’appel sera, lui aussi, rejeté. La Commission européenne a introduit un recours en manquement contre la France. En novembre 2013, elle a signalé que six mois après la décision, la France (ou la Collectivité territoriale de Corse) n’avait toujours pas mis en place les outils nécessaires au remboursement. Le recours devrait donc, selon toutes probabilités, aboutir à des pénalités journalières de plusieurs milliers d’euros. De « bonnes » sources évoquent même un maximum de 150 M€.
Cerise sur le gâteau, ces pénalités pèsent sur l’État et non pas sur la SNCM. En d’autres termes, même si la SNCM venait à être mise en redressement judiciaire pour être ainsi placée dans l’impossibilité de rembourser deux fois 220 M€, le contribuable resterait redevable d’un maximum de 150 M€. De quoi justifier une estimation par la Cour des comptes du coût de l’action ou de l’inaction de l’État dans ce dossier.
Redressement judiciaire, seule solution
L’option du redressement judiciaire est explicitement exprimée dans le relevé de conclusions signé le 9 juillet entre les syndicats de salariés, l’actionnaire majoritaire Transdev (50 % Veolia et 50 % la Caisse des dépôts et consignations, donc l’État) et l’État (25 %) au terme de 16 jours de grève: l’État considère « qu’il ne fait plus de doute aujourd’hui que seul un plan de redressement pour construire une nouvelle SNCM peut permettre de mettre fin aux contentieux européens. Ce plan passera probablement par un redressement judiciaire ». Le relevé de conclusions précise que jusqu’au 31 octobre, la SNCM s’engage à ne pas entamer de procédure judiciaire « sauf situation de cessation de paiement. Sous le contrôle du président du tribunal (…), la trésorerie est assurée par l’intégration de l’indemnité d’assurance du Napoléon-Bonaparte dans les comptes de l’entreprise ». Soit 60 M€ environ. Les actionnaires se sont en outre engagés à ne pas demander le remboursement des comptes courants (117 M€). Fin octobre au plus tard devront être présentés les résultats de l’étude exhaustive permettant de « parvenir à un projet industriel d’avenir ». Le 10 juillet, Transdev a souligné une nouvelle fois que les solutions d’avenir passaient par une « solution de discontinuité dans le cadre d’un redressement judiciaire contrôlé ».
La question qui se pose dans l’immédiat est donc bien celle de la trésorerie immédiatement disponible. En outre, le bal des prétendants semble se poursuivre avec des légitimités diverses et variées. Et le p.-d.g de Veolia ne cesse de réclamer la mise en redressement judiciaire de la SNCM (voir JMM de la semaine dernière).