Vers une conduite automatique du navire

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Le 23 juillet, Hyundai Heavy Industries (HHI), le « plus important chantier du monde », a annoncé le lancement de son Hyundai Intelligent Collision Avoidance Support System (Hicass), destiné à assurer une navigation optimale et sûre des navires. Ce système détecte les meilleures routes et évite les collisions en détectant automatiquement les obstacles mobiles ou non dans un rayon de 50 km. En plus, sa grande précision permet aux « navires » (comprendre, sans doute, officier de quart) d’identifier les dangers qui peuvent se représenter selon le type de navire et les conditions de mer et de vent. Ce système expert est doté d’une fonction d’alerte en cas de risque de collision à trois niveaux: attention, urgent, danger. Le Hicass s’interface avec l’Arpa (Automatic Radar Plotting Aid), l’AIS et la carte électronique. Il peut ainsi analyser la situation sur zone selon les règles du Ripam.

HHI a testé son système sur un porte-conteneurs de 13 800 EVP ainsi que sur un méthanier de 162 000 m3 en mai et juin. Il devrait être commercialisé en 2016 après des essais en mer destinés à s’assurer de ses performances et de sa stabilité sur de longues navigations.

Il est encore temps de diffuser des avurnav (avis urgents aux navigateurs) tout au long des routes qui seront suivies.

HHI reste très avare de détails sur son dispositif, et notamment sur les effets, bons ou mauvais, qu’il risque d’avoir sur le personnel de passerelle: confiance excessive, relâchement de la surveillance, etc. Par ailleurs, quel sera le niveau de qualification requis pour paramétrer correctement le système expert? Une expertise par des spécialistes du facteur humain serait judicieuse. Tant qu’il y a encore de l’humain à bord.

Un drone maritime à l’horizon

En effet, le 7e programme-cadre européen de recherche a eu la bonne idée de confier à huit instituts de recherche européens un projet d’un montant de 3,8 M€ clairement intitulé Maritime Unmanned Navigation Through Intelligence in Networks. Ce projet a démarré en septembre 2012 pour trois ans. Son objectif est sans ambiguïté: « développer et valider le concept d’un navire sans équipage et autonome ».

Le navire serait en pilotage autonome uniquement en haute mer, la haute mer étant « définie » lorsque le pilote portuaire n’est pas à bord. Pour les approches portuaires, outre le pilote (voir encadré ci-contre) embarquerait un équipage « humain ». En cas de problème en haute mer, la conduite du navire serait reprise manuellement par des navigants à terre. La présentation du projet ne mentionne en aucune façon la possibilité de black-out électrique plus ou moins total, la lutte anti-incendie, ou l’assistance à un autre navire. L’assistance portée à l’équipage du MSC-Flaminia après explosion ne semble pas être un sujet d’étude.

Par contre, la réduction des coûts est clairement au cœur de la recherche. En associant la réduction de la vitesse et celle du nombre de marins embarqués, l’économie serait optimale. D’autant que, toujours selon la présentation du programme, il y a de moins en moins de candidats au métier de navigant. L’éloignement du cadre familial et la monotonie de la vie en mer expliquent la baisse des vocations. Cette désaffection pour le métier tombe bien car il est rappelé qu’environ 75 % des accidents maritimes ont pour cause l’erreur humaine et qu’une importante proportion de ces accidents est due à la fatigue ou au manque d’attention. En prenant la main à terre, ces navigants trouveront un cadre de vie normal.

La plupart des technologies nécessaires sont déjà à bord ou existent à terre, affirme-t-on. Quelques systèmes de capteurs ont cependant besoin d’être « marinisés » comme ceux basés sur l’infrarouge. Les premiers travaux du programme Munin sont téléchargeables sur le site www.unmanned-ship.org

Que les dirigeants volent en automatique

Dans les années 1980, l’industrie maritime japonaise s’était déjà penchée sur le sujet avec les moyens « à la japonaise » et avait finalement abandonné. En effet, pour obtenir le niveau de sécurité requis, il fallait installer tellement d’équipements redondants que le coût d’exploitation devenait comparable à celui généré par un équipage humain. La recherche s’était arrêtée là. Les « bonnes » idées étant dotées d’une certaine résilience, elles reviennent trente ans plus tard.

Pour tenter de calmer le jeu, osons proposer une solution « gagnante-gagnante »: dès lors que des cadres dirigeants de l’OMI, de grands chantiers navals (dont Hyundai HI et Rolls Royce), de grandes compagnies maritimes, sans oublier ceux des sociétés de classification membres de l’AICS et des compagnies d’assurance accepteront de voyager dans un avion sans équipage, aucun État côtier ne pourra s’opposer au passage de drones marins chargés de pétrole ou de produits chimiques le long de ses côtes.

Munin: un programme nord-européen

Dans la mythologie nordique, Munin (la mémoire) est un des deux corbeaux qui informent chaque soir le dieu du ciel, Odin, de ce qu’ils ont vu durant leur vol autour du monde. Le projet Munin, Maritime Unmanned Navigation through Intelligence in Networks, a d’autres ambitions. D’un montant de 3,8 M€, il associe des centres de recherche allemand, islandais, irlandais, norvégien et suédois. À savoir Fraunhofer CML, Marintek, Chalmers University, Hocheschule Wismar, Aptomar, Marine Soft, Marorka et l’University College de Cork. Il devrait se terminer en septembre 2015.

L’autre face des drones aériens

L’hebdomadaire Courrier International du 24/30 juillet consacre son dossier spécial aux malheurs des drones aériens civils et militaires américains en publiant de larges extraits de l’enquête du Washington Post: plus de 400 drones militaires de grande taille se sont écrasés dans le monde depuis 2001. L’Irak et l’Afghanistan fournissent un large espace d’expérimentation de ces engins de surveillance et d’attaque. Les drones militaires ne se contentent pas de tomber au sol, sur des maisons, des autoroutes ou des pistes d’atterrissage. L’un d’eux, d’une masse de 200 kg, est entré en collision avec un C-130 Hercules de l’armée. Erreur du pilote déporté. Un autre est entré, à l’atterrissage, dans des conteneurs vides. Le pilote n’a pas eu conscience de l’environnement du drone. Jusqu’à présent, il n’y a eu aucun mort par accident.

Avant septembre 2015, le Federal Aviation Administration doit publier la réglementation qui accompagnera l’intégration de plus en plus forte des drones civils dans l’espace aérien américain: la police, le monde agricole, le cinéma devraient devenir de gros utilisateurs de ces engins. En 2015 devrait être livré aux États-Unis le premier chasseur de sous-marin totalement automatique: un engin de près de 40 m de long qui sera le démonstrateur du programme Actuv, Anti-Submarine Warfare Continuous Trail Unmanned Vessel. Chaud devant. Les États-Unis devraient donc s’asseoir sur la règle 5 du Règlement international pour la prévention des abordages en mer. La veille « permanente, visuelle et auditive appropriée » est tout juste bonne pour les vieilles technologies.

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