Annoncée à la fin de l’année dernière, l’intention de céder les filiales européennes du groupe sud-coréen STX en difficulté devient concrète avec la révélation de l’existence d’un document à destination des investisseurs. La direction du site français a prévenu le comité d’entreprise le 19 mai qu’une plaquette, réalisée par la banque Crédit Suisse, avait été réalisée pour démarcher les investisseurs. Principal créancier de STX en Corée du Sud, KDB en est devenu propriétaire l’an passé, le groupe ne parvenant plus à lui payer ses dettes. Cependant, la banque a rapidement fait savoir qu’elle envisageait de se séparer des sites qui trouveraient preneurs. Les chantiers STX de Saint-Nazaire ont vu leur carnet de commandes se remplir spectaculairement en quelques mois, au point de promettre une pleine charge de travail pendant cinq ans à ses quelque 2 000 salariés.
Rachat hypothétique
Un rachat apparaît néanmoins hypothétique, aucun investisseur n’ayant ces dernières années manifesté d’intérêt pour cette activité. En outre, les syndicats font valoir que l’État français, actionnaire à 33,3 % de STX France, dispose d’un droit de veto qui limite les risques d’un raid destiné à s’approprier les technologies de pointe du chantier, également présent dans le domaine militaire.
Les syndicats de STX espèrent des énergéticiens
Il est « un peu las d’être vendu en permanence », Johan Jardin, le délégué CFDT de STX France. Quant à la CGT, première organisation sur le site de Saint-Nazaire, elle grogne aussi: « Les salariés seront comme d’habitude les derniers informés, comme en 2007 à STX, en 2006 à Aker Yards. » Et Joël Cadoret, le délégué syndical, de réclamer « une vraie politique industrielle derrière cette reprise, plutôt que d’être le jouet des financiers comme aujourd’hui. » Le 28 mai, sa lecture de Presse-Océan l’a rassuré un peu. Le journal local a rapporté les propos de la veille à l’Assemblée nationale selon lesquels l’État, actionnaire à 33 % de STX France et à ce titre « associé au processus de discussion sur la nature, les conditions, les modalités et l’identité d’un futur repreneur », était « en situation de pouvoir discuter avec l’actuel propriétaire de STX et tout éventuel repreneur ». Les syndicats ont encore plus été satisfaits d’entendre que le gouvernement « avait décidé de faire une analyse des perspectives stratégiques à partir desquelles nous pourrons imaginer des solutions ». Car tous les syndicats espèrent que les diversifications récentes du chantier de Saint-Nazaire dans les énergies marines renouvelables (pour le moment éoliennes et sous-stations électriques) suscitent l’intérêt des grands énergéticiens, perçus comme plus sûrs à long terme, plutôt que d’autres chantiers navals constructeurs de paquebots, européens certes, mais pas plus argentés. « Ce n’est pas que nous ayons besoin d’énormes investissements. Ce qu’il faut, c’est simplement maintenir notre outil de production. Mais notre handicap, même si nous présentons un bon carnet de commande actuellement, c’est de ne pas dégager de bénéfices extraordinaires, tout en restant bénéficiaires », analyse Johan Jardin, de la CFDT. Dans les ateliers, sur les quais, tout le monde rêve de voir surgir dans le paysage les Areva, Alstom, EDF et autres General Electric plutôt que les Meyer Werft ou Fincantieri. Ou qu’un fonds d’investissement. Force Ouvrière continue même de réclamer au passage que, pour assurer le devenir de la filière en France, l’État profite de la mise en vente pour prendre la majorité du capital. Une chose est sûre, personne ne regrettera le Coréen STX puisqu’il n’a pas dépensé d’argent à Saint-Nazaire. Pendant son « règne », STX France n’a investi que sur ses propres deniers. Il a seulement imposé que le nouveau portique dont le chantier s’est doté vienne de ses ateliers de Corée. Ce qui a occasionné bien des retards et des problèmes techniques.