Le volume total de produits sous température dirigée dans le monde, tous transports confondus, est en hausse en 2012. Selon les données compilées par le consultant néerlandais Dynamar, le trafic de produits frais transportés dans le monde (tous modes de transport confondus) a atteint 131,2 Mt. Ces données sont des estimations puisque les organisations qui diffusent des chiffres sur ces flux ont un retard d’un à deux ans sur les statistiques. En 2012, les flux de produits frais accusent un léger repli de 4,4 %, principalement sur les légumes et les produits laitiers. Sur les cinq dernières années, de 2008 à 2012, les flux de produits frais enregistrent une hausse globale de 10,4 %. Ils ont atteint un pic en 2011 avec 137,3 Mt transportées en raison d’une demande plus accrue.
La banane loin devant
Ces produits transportés sont principalement des fruits, et cela depuis de nombreuses années. Ils représentent 42 % avec 55,1 Mt. Parmi ces fruits, les bananes représentent la grande majorité avec 17,3 Mt transportées en 2012. Le fruit oblong enregistre une progression constante sur les dernières années mais a ralenti en 2012 avec une hausse de son volume de 1,8 %. Les fruits sont principalement exportés depuis l’Amérique du Sud et les Caraïbes. Un volume qui progresse lentement. Ils inondent deux marchés principaux, l’Europe et l’Amérique du Nord.
Viennent ensuite les légumes avec 28,6 Mt. Les légumes transportés sont en grande majorité des oignons et des poireaux (7,1 Mt), des pommes de terre (4,7 Mt) et des tomates (4 Mt). Ces produits sont principalement exportés depuis l’Amérique du Nord, l’Extrême-Orient et l’Europe pour les marchés américains, européens et asiatiques. Les flux entre ces trois principaux marchés sont relativement équilibrés puisqu’ils importent presqu’autant de légumes qu’ils en exportent. Enfin, la viande entre pour 25,8 Mt. Trois types de viande emportent 83 % du trafic total de ces produits: la volaille (11 Mt), la viande bovine (5,6 Mt) et les produits porcins (5 Mt). Dans son rapport annuel sur le reefer, Dynamar constate une présence plus marquée de l’Inde dans les exportations de viande bovine, qui sont traditionnellement réservées aux pays européens, à l’Amérique du Nord et du Sud. Les deux dernières catégories de produits sous température dirigée sont les produits de la mer qui représentent 18,8 Mt et les produits laitiers qui totalisent 2,9 Mt, notamment avec le beurre et le fromage. Principalement réalisées par l’Australie et la Nouvelle-Zélande, les exportations de ces produits le sont aussi par des pays européens. L’Allemagne et les Pays-Bas sont les premiers exportateurs européens.
Parmi les principaux exportateurs de produits sous température dirigée se retrouvent l’Amérique du Nord, l’Union européenne, la Russie, la Chine et le Japon. L’Union européenne a importé environ 17,6 Mt de produits sous température dirigée en 2012. Il s’agit surtout de fruits, depuis l’Amérique centrale, les Caraïbes, l’Amérique du Sud et l’Afrique. Ils entrent pour 11,1 Mt importées. Les poissons forment la seconde composante de ces flux avec des produits en provenance d’Europe (poissons pêchés dans les eaux européennes et déchargés sur le sol européen) et d’Extrême-Orient. Enfin, les légumes sont les troisièmes de ce pilier d’importations européennes avec 2,1 Mt en provenance d’Afrique et du Moyen-Orient. À l’export, les fruits, la viande et les légumes composent la plus grande partie des produits partant d’Europe. Les exportations de fruits, qui représentent globalement 4,2 Mt, sont à destination d’autres pays européens à hauteur de 3,2 Mt. Ce trafic intra-européen de fruits est analysé à part dans l’étude de Dynamar. Le quarté de tête des pays européens dans ces flux de produits sous température dirigée est dominé par l’Allemagne qui entre pour 19,1 Mt de produits frais transportés expédiés et reçus. Les Pays-Bas suivent avec 16,6 Mt, puis l’Espagne avec 14,1 Mt (surtout par des exportations de fruits et notamment des bananes depuis les Canaries) et la France qui totalise un trafic de 13,2 Mt de produits frais exportés et importés en intracommunautaire. Des données qui ne portent que sur les trafics maritimes, les autres modes de transport intra-européens devenant plus difficile à évaluer.
Le reefer reste une niche dans le transport maritime
Le trafic maritime de ces produits sous température dirigée est estimé à 92,4 Mt. Un chiffre en hausse de 1,7 % selon le consultant Drewry, explique Dynamar dans son étude sur le reefer. Une progression du trafic reefer constante depuis le début du siècle à raison de 3 % par an ou 47,5 % depuis 2000. La croissance de ce volume ne doit pas oublier que ce marché reste une niche dans le transport maritime. Les 92,4 Mt transportées dans le monde représentent environ 2,5 % des trafics conteneurisés secs, soit environ 14 800 navires conventionnels de 500 000 pieds cubes ou 3,1 MEQP. La tendance qui se dessine depuis plusieurs années en faveur de la conteneurisation se confirme. Selon les prévisions de commandes de navires auprès des chantiers et l’âge actuel de la flotte, Dynamar estime que la capacité des navires conventionnels sera divisée par deux d’ici à 2023, soit au cours de la prochaine décennie. Dans le même temps, les volumes devraient continuer leurs progressions. La logique de voir les négociants de ces produits se tourner de plus en plus vers le conteneur se confirme. Malgré tout, dans certaines régions du monde, les navires conventionnels conservent leur intérêt. Les principaux pays d’exportation de fruits, à l’image de l’Amérique latine, de l’Afrique de l’Ouest et de la Nouvelle-Zélande enregistrent encore de nombreuses escales de navires conventionnels reefers. La seule inconnue dans ces données, explique Dynamar, est de savoir si les navires chargent des produits sous température dirigée ou des marchandises sèches traditionnelles. En effet, ces navires disposant de cales réfrigérées peuvent aussi charger des produits secs. L’exemple a été donné il y a quelques années lorsqu’Agrexco a chargé des fruits et légumes depuis Israël vers la France en export et a assuré le fret retour en chargeant des voitures dans ses cales. Des pays comme le Costa Rica, l’Équateur et le Ghana affichent plus de 350 escales de navires conventionnels frigorifiques dans leurs ports par an en 2012. Et sur la première moitié de 2013, ce nombre se stabilise.
Chiquita se tourne vers la conteneurisation
La tendance à voir l’utilisation plus soutenue de navires conteneurs se confirme avec l’annonce de Chiquita. Le producteur américain de bananes et aussi propriétaire de la flotte des navires spécialisés Great White Fleet a entrepris au cours de l’année 2012 un redéploiement de sa logistique depuis les navires conventionnels vers la conteneurisation. Au final, en un an, l’armateur a annoncé avoir économisé 12 M$ et divisé sa flotte de navires conventionnels par deux.
L’autre nouveauté en 2013 est venue de Stena Ro Ro et Reefer Intel. Lors de la conférence Cool Logistics à Rotterdam en 2013, Per Westling, directeur général de Stena Ro Ro et Lindberg Skov, directeur général de Reefer Intel, ont présenté un nouveau concept de navires frigorifiques. « Si nous ne faisons rien, a expliqué Lindberg Skov, le reefer va disparaître. Nous devons prévoir un nouveau type de navire pour permettre aux exportateurs de bananes de rester dans la course. » Le concept de nouveaux navires reefers est calqué sur celui des rouliers. Avec une rampe sur son arrière, ces navires peuvent embarquer des conteneurs ou des palettes directement dans les ponts intérieurs. Les deux ponts (intérieur et extérieur) peuvent charger indépendamment l’un ou l’autre. Les ponts intérieurs sont divisés en dix sections séparées qui peuvent être sous température dirigée indépendamment les unes des autres.
Ce type de navire peut embarquer 11 500 palette high cube ou 621 000 boîtes de bananes, les deux tiers seront chargées dans les ponts inférieurs et le dernier tiers sur le pont supérieur. Le principal atout de ce navire, selon les initiateurs de ce concept, vise à un temps réduit dans les ports. Un navire conventionnel traditionnel passe en moyenne 48 heures dans un port pour les opérations de manutention. Avec ce nouveau navire, les temps de manutention devraient être réduits à 12 heures. La réduction de temps dans les ports permet de réduire la vitesse des navires et donc d’entrer dans les nouvelles règles d’émission de CO2. Pour les initiateurs de ce concept, la disparition lente des navires conventionnels pour le transport de produits sous température contrôlée est imminente. « Il y a 300 navires conventionnels utilisés pour le transport de bananes et seulement une dizaine de construits au cours de la dernière décennie. Si nous n’entamons pas la construction de ces navires, ce sera un désastre pour l’industrie de la banane qui a besoin de capacités maritimes 365 jours par an », continue Lindberg Skov. L’industrie bananière semble se contenter de la conteneurisation des trafics.
Le rapport du consultant néerlandais Dynamar sur le reefer (Dynamar Reefer Analysis: market structure) est disponible sur le site