De Bandar Abbas au Rhin, nouvel itinéraire ou aventure?

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Les chemins de fer iraniens acheminent environ 3 Mt en transit, principalement depuis le port de Bandar Abbas. Avec plus de 2,3 MEVP transbordés en 2012, celui-ci confirme sa position de 2e port de la région du Golfe après Dubaï. Le port de Bandar Abbas occupe une position géostratégique sur le détroit d’Ormuz. Il bénéficie de bonnes liaisons ferroviaires avec le nord du pays et la mer Caspienne, ce qui en fait une porte d’entrée de l’Iran mais aussi de l’Asie centrale et de la Turquie asiatique. En provenance de l’Asie du Sud-Est, il bénéficie à ce jour d’escales régulières d’Irisl et un peu moins régulières des compagnies CSAV, Evergreen, Misc, MOL, OOCL, PIL et Yang Ming.

Itinéraire et infrastructures ferroviaires

Cet itinéraire, de par la continuité territoriale à l’écartement standard de 1 435 mm et une charge admissible de 22,5 t à l’essieu, est plus qu’un simple corridor terrestre orienté vers l’Asie centrale. C’est donc peut-être en Iran que pourrait résider, pour l’Europe, le principal enjeu stratégique d’un pont mixte terrestre et maritime entre l’Europe et l’Asie. La différence d’écartement de la voie russe avec le réseau européen réduit son potentiel de croissance. Les trafics pourraient donc trouver avantage à passer par Bandar Abbas. Cet itinéraire bénéficie d’un écartement de voie standard depuis le golfe Persique jusqu’au cœur de l’Europe, et de l’économie d’un transit par le canal de Suez. Néanmoins, ce choix semble largement soumis à une « realpolitik » avec l’Iran. L’exploitation de l’isthme turco-iranien remonte à septembre 1971 lorsque les deux réseaux ferroviaires ont été reliés l’un à l’autre. Mais cet axe pourrait bénéficier d’un nouvel avantage, dans les prochaines années, avec la récente ouverture du tunnel sous le Bosphore.

Nous sommes cependant encore loin de cet idéal. À l’heure actuelle, la circulation moyenne des trains en Iran est toujours de 30 km/h. Une augmentation de la vitesse suppose une amélioration des voies existantes. Un allongement des trains permettrait de réduire les rotations mais nécessite une mise en service de locomotives plus puissantes, idéalement diesel-électriques, permettant de circuler sur tous types de voies et possédant un système de freinage adapté aux trains de 1 500 m au moins. Enfin, le transport ferroviaire en Iran et en Turquie reste à ce jour relativement cher, et le transit time n’est pas fiable du fait de l’utilisation de ferries pour traverser le lac de Van (situé à l’extrémité Est de la Turquie, à 1 640 km d’altitude, ce lac fait 120 km × 80 km). Il n’y a que deux ferries en service et l’un d’eux est presque toujours en réparation. Par exemple, le coût du transport d’un 40’dry de Bandar Abbas à Budapest ou Vienne, incluant les frais de transit et les frais de terminal à Bandar Abbas, ressort à près de 4 000 $(*). Mais il faut bien sûr y ajouter le coût du segment maritime depuis l’Asie du Sud-Est (environ 1 150 $).

Forces et faiblesses dans le contexte actuel

Compte tenu du niveau extrêmement bas des taux de fret actuels de l’Asie vers l’Europe, (SCFI Nord Europe 1 641 $, et Méditerranée 1 670 $ au 17 janvier 2014), le transit par Bandar Abbas ne peut représenter aujourd’hui une alternative fiable et compétitive à l’itinéraire maritime via le canal de Suez. La surcapacité de la flotte, l’entrée progressive en service des 18 000/19 000 EVP de Mærsk, MSC, UASC et CSCL réunis nécessitent de baisser au plus vite les coûts ferroviaires en s’appuyant sur la massification (trains longs), à défaut de possibilité de double empilage. En fait, l’atout premier de cet itinéraire réside dans la desserte directe des terminaux intérieurs des principaux opérateurs ferroviaires européens, presque tous situés le long du Rhin (Bâle, Ludwigshafen, Mannheim, Duisburg, etc.), représentant une économie de coûts de transbordement portuaire et de post-acheminement, ainsi qu’une amélioration notable du transit time. En effet, sous réserve d’une amélioration de l’infrastructure, du matériel roulant et de la croissance des trafics, non seulement avec l’Asie du Sud-Est mais aussi avec la péninsule indienne (potentiel de 5 MEVP à 6 MEVP en 2015-2016), cet itinéraire pourrait donc autoriser un transit time de 8 à 9 jours depuis Bandar Abbas et devenir ainsi une réelle alternative au transit via Suez, particulièrement pour le cœur de l’Europe centrale centré sur Budapest.

Jean-Claude Sevin, conseil en transports logistique, et François Mermod, directeur du terminal à conteneurs de Lausanne-Chavornay

L’ensemble de ces informations a été recueilli auprès de transitaires iraniens et en particulier la firme Iran Tarabar à Téhéran.

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