Le 13 novembre 2002, le pétrolier Prestige, battant pavillon des Bahamas, subit une avarie machine au large de la Galice. Remorqué en haute mer depuis la région espagnole autonome, il finit cassé en deux le matin du 19 novembre à force d’être soumis au mauvais temps. Le fioul lourd atteindra les côtes espagnoles, portugaises et françaises.
À la fin 2002, le Journal de la Marine Marchande (JMM) se penche sur les causes de l’échouement du navire, par 3 000 m de fond, survenu trois ans après celui de l’Erika au large des côtes bretonnes. Les questions sont nombreuses, en particulier sur les 42 820 t de fioul encore contenues dans les cuves lorsque Le Prestige a sombré. « Le fioul lourd, très visqueux, risque d’être libéré à des profondeurs variables. Tôt ou tard, au fil des années, il arrivera sur les côtes, par plaques. » À la fin novembre, une partie s’est déjà retrouvée sur les côtes espagnoles, entraînant l’interdiction de la pêche et de la conchyliculture, activités essentielles en Galice. Le JMM revient sur les polémiques autour du naufrage, notamment sur le flou concernant les ports de refuge en Europe. L’origine du chargement reste à cette époque incertaine: selon les sources, il venait de Riga, de Ventspil ou encore de Saint-Petersbourg. Le Prestige, construit en 1976, est alors autorisé à charger dans les deux ports de la Baltique. La question de la circulation de « pétroliers-poubelles » dans l’espace européen revient fréquemment dans les semaines qui suivent l’accident. Le JMM s’interroge d’ailleurs sur la destination du navire: le Prestige allait à Singapour alors qu’il existe de nombreuses raffineries bien plus proches de la ville-État. Cela pouvait être en fait le dernier voyage du navire, ses deux sister ships ayant d’ailleurs été découpés en 2000 et 2002. Des questions sont à nouveau posées sur les normes de sécurité applicables, pourtant mises à jour à peine trois ans plus tôt par les institutions européennes et les États-membres, en conséquence du naufrage de l’Erika. « Le problème des navires en transit dans les eaux territoriales des États-membres de l’Union européenne reste inchangé », estime le JMM qui cite le Bureau d’enquêtes et analyses (BEA) au sujet de l’Erika: « Ce sont les hydrocarbures les plus polluants, donc ceux dont la valeur ajoutée est la plus faible, qui sont chargés sur les navires les moins chers, donc les plus âgés et les plus risqués. »
Le 3 décembre, la Commission européenne publie une « liste noire » de 66 navires qui devraient être interdits dans les eaux européennes.