Les défis de STX France

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« Nationaliser STX France? Pourquoi donc? L’entreprise va bien. » Cette réponse du gouvernement – déjà actionnaire à 33 % – aux syndicats, toujours la même, n’aura sans doute jamais paru aussi paradoxale qu’en cette fin d’année. Le dernier grand chantier naval français, entouré de dangers, pour certains indépendants de lui, doit mener une bataille économique sur tous les fronts.

Si STX France va bien, c’est avant tout qu’elle n’est « ni déficitaire, ni endettée ». Arnaud Montebourg, le ministre du Redressement productif, l’explique volontiers. Mais elle subit les incertitudes de son groupe, le Coréen STX, surendetté. Du coup, la KDB, banque d’État coréenne, en a pris la direction et évoque sans cesse l’urgence qu’il cède ses actifs hors de Corée. « Mais c’est surtout l’hémorragie chinoise du chantier de Dalian, les centaines de milliers d’euros de pertes par an qui sont visées », assure Laurent Castaing, le directeur général de STX France.

Si, en comparaison, l’entreprise dont il a la charge va bien, c’est aussi que depuis un an des commandes sont arrivées. Une, essentiellement: le troisième paquebot géant Oasis pour l’Américain RCCL. Plus de 360 m de long, 66 m de large, 6 360 passagers, 8 400 personnes à bord. C’est un monstre comme jamais, qui compte même une « mini-forêt » en son milieu… Le contrat avoisine 1 Md€ et crée 10 millions d’heures de travail jusqu’en 2016. STX France a fait revenir son personnel en chômage partiel ou prêté alentour à Saint-Nazaire, à Airbus, à DCNS. Il a embauché 100 personnes en 2013, essentiellement des ingénieurs, et reconstitué la capacité de son bureau d’études d’il y a trois ans, avant le dernier plan de départs volontaires. Des ouvriers, il n’y en aura pas plus. Les aléas de charge seront comblés par les CDD et l’intérim. Au final, l’effectif de 2 200 personnes devrait se maintenir dans les années à venir.

D’autres paquebots, des ferries

Mais STX a des obstacles à surmonter. D’abord la concurrence, toujours plus forte. Les chantiers asiatiques montent en puissance. « Il n’y a plus de fidélité chez les clients et chez les concurrents, plus de respect des clients entre eux, comme MSC chez nous! », clame encore Laurent Castaing. L’Oasis, STX l’a d’ailleurs chipé à STX Finland et à son chantier de Rauma. À prix coûtant. Les vrais bénéfices arriveront si le quatrième Oasis lui est commandé en mars prochain. Le hic, ce sont toujours les financements, celui de l’armateur et celui du chantier. Les banques vont mieux et la BCE vient d’abaisser encore leurs coûts. Voilà qui pourrait faciliter d’autres prises de commandes. STX est en lice pour décrocher « au moins deux autres paquebots de 2 000 cabines, peut-être quatre », explique Laurent Castaing. Le chantier est placé sur le marché des ferries, pas seulement ceux de la SNCM. Heureusement, celle-ci s’est vue renouveler sa délégation de service public. Restent les financements et l’appel d’offres international. STX concourt encore pour deux autres ferries ailleurs.

Diversification

Mais la construction de paquebots étant trop aléatoire, STX France se diversifie. Dans l’off­shore, elle a remporté un premier marché, un module électrique climatisé pour un champ de forage Total en Guinée. Dans les énergies marines, la sous-station électrique d’un champ d’éoliennes à l’ouest de l’Angleterre marque, là aussi, ses débuts. STX veut réaliser 25 % de son chiffre d’affaires en 2020 dans les énergies marines renouvelables et doit décider, d’ici à la fin de l’année, de construire deux ateliers spécialisés dans ce domaine à Saint-Nazaire.

Mais c’est sur sa compétitivité que l’entreprise vient de lancer une grosse bataille. Le 24 octobre, elle a remis en cause les 35 heures et d’autres avantages dans l’entreprise. Elle veut une diminution de son coût du travail de 5 % à 10 %. « Sur ce sujet, les concurrents bougent », a insisté tout le printemps Laurent Cas­taing pour obtenir un accord de compétitivité. En vain. Les syndicats sont hostiles à toute « régression sociale ». Centrées sur cette question, les élections professionnelles viennent de renforcer ceux qui sont opposés, ne serait-ce qu’à en discuter: la CGT confortée à la première place, et Force Ouvrière, majoritaires à elles deux. Une bataille sociale de quinze mois – délai légal – s’ouvre sur le statut social des salariés du chantier. Avec tous les risques de grèves dans la construction de l’Oasis. Une épreuve de vérité de plus.

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