Barcelone: un hub multitrafics

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Le port de Barcelone mène une dure bataille contre la crise. En 2009, le trafic a décroché de manière brutale (− 17 %) pour se situer à 41,8 Mt, un niveau qui est resté pratiquement inchangé depuis cette date (41,5 Mt en 2012, 3e port espagnol). Cette stabilité est cependant déjà une victoire et ne doit pas masquer les efforts menés par l’Autorité portuaire de Barcelone (APB) pour développer les trafics.

Le port de Barcelone a souffert du contrecoup de la récession en Catalogne qui représente 80 % de son hinterland. Les déchargements de marchandises ont baissé de 7 % en 2012. La crise a eu une autre conséquence négative: les compagnies maritimes ont privilégié d’autres ports pour leurs opérations de transbordement, qui ont baissé de 27 % en 2012 et de 60 % depuis 2008 à 0,4 MEVP. Le dynamisme bien réel des exportations (+ 13 % en 2012) n’a pas été suffisant pour compenser ces facteurs négatifs. En 2012, le trafic de conteneurs a reculé de 14 % à 1,75 MEVP, un niveau inférieur de 33 % par rapport au pic de 2007 (2,6 MEVP).

Les Catalans ont la réputation d’être combatifs et à l’APB, on ne baisse pas les bras. « Le transbordement ne sera jamais un moteur du trafic: nous sommes traditionnellement un port d’import-export. Notre capacité de manutention, qui a doublé avec l’extension du port, et l’existence d’un hinterland puissant sont deux atouts essentiels. Nous pensons que les compagnies maritimes privilégieront les escales qui permettent de couvrir un hinterland important. La croissance du transbordement ira de pair avec celle du trafic import-export », explique Sixte Cambra, président de l’APB. Les responsables du port caressent l’espoir de capter davantage de trafics asiatiques vers l’Europe en pariant sur l’économie de coût que représente un moindre transit time par rapport aux ports d’Europe du Nord et de faire de Barcelone la porte d’entrée de ce trafic.

Cette volonté n’a pas surgi de la crise. Le port travaille depuis dix ans au renforcement de son hinterland en Espagne mais aussi en France via la participation dans des ports secs et le développement des connexions ferroviaires. « Le fait de pouvoir offrir un hinterland élargi au sud et au centre de la France représente un avantage comparatif évident du port », précise Sixte Cambra.

Fait nouveau: l’implication d’acteurs privés

En Espagne, l’APB dispose de participations minoritaires dans les deux ports secs de Madrid (Azuqueca de Henares et Coslada) et Saragosse. Le fait nouveau est l’implication des acteurs privés: Tercat, l’un des deux opérateurs de conteneurs, a investi dans un terminal à Noain en Navarre. En France, le port dispose d’un port sec à Toulouse et détient une participation de 5 % dans le Saint Charles Container Terminal de Perpignan. Le voisin du Nord reste un marché prioritaire. « Nous allons continuer notre effort de prospection commerciale en France », souligne le président du port.

Ce concept de « port en réseau » est renforcé par le développement des connexions ferroviaires. Les nouveaux accès routiers et ferroviaires (UIC) du port ont fait l’objet d’un cofinancement entre le ministère de l’Équipement et l’APB. Sur une enveloppe totale de 290 M€, 100 M€ seront destinés aux accès ferroviaires (dont la moitié sera prise en charge par l’APB). Barcelone offre des liaisons avec Lyon, Toulouse et Bordeaux en empruntant un écartement UIC jusqu’à la frontière française. La part du ferroviaire dans le trafic de conteneurs est passée de 2,6 % en 2007 à 11,2 % en 2012 (149 000 EVP). « Notre objectif à moyen terme est d’atteindre 20 % », indique Sixte Cambra.

Mais Barcelone ne se résume pas au conteneur. En matière de trafic de voitures neuves, les deux opérateurs, Setram et Autoterminal, disposent d’installations remarquables et surtout d’un savoir-faire reconnu désormais au niveau international. En 2012, le trafic a progressé de 5,5 % (665 000 véhicules). Barcelone se positionne comme hub de trafic: le transbordement a fait un bond en avant de 53 % (112 000 véhicules, soit 16 % du total). La hausse de la part du ferroviaire (34 % actuellement) est un autre motif de satisfaction.

La vocation de hub se retrouve aussi dans un autre trafic qualifié de « stratégique » par l’APB: les vracs liquides. L’APB et les investisseurs privés (Tepsa, Enagas, Meroil, etc.) ont investi massivement sur le quai de l’Énergie, particulièrement bien situé à l’entrée du port. Barcelone parie surtout sur les produits pétroliers et le GNL. En 2012, le trafic a atteint 10,4 Mt (6e rang national).

En dépit des investissements réalisés, les responsables de l’APB sont conscients du chemin qui reste à parcourir. D’autant que les objectifs sont ambitieux: le port souhaiterait ramener à terme la part de la Catalogne dans son hinterland à 50 %. La stratégie de développement sur le marché français se heurte à la concurrence des ports hexagonaux et surtout à un contexte économique peu favorable. Mais le port de Barcelone a de réels atouts en mains et a su se positionner comme un acteur stratégique en Méditerranée occidentale.

Tarragone: un investissement important dans le ferroviaire

À l’ombre du port de Barcelone, celui de Tarragone a effectué une percée inattendue, en valorisant ses atouts. Le port de Tarragone tire d’abord sa force de la présence de l’importante raffinerie de Repsol et du pole chimique de Tarragone qui concentre un quart de la production espagnole du secteur. Les vracs liquides représentent plus de la moitié du trafic (19,1 Mt en 2012, soit 57 % de 33,1 Mt).

La position du port dans les vracs liquides devrait être renforcée avec la mise en service prochaine de l’extension du quai de la Chimie, actuellement en travaux: le projet prévoit la création de 18 ha supplémentaires et d’une nouvelle ligne de quai de près de 1 200 m. L’Autorité portuaire de Tarragone (APT) estime que cet investissement devrait permettre de gagner 4 Mt et de porter le trafic de produits chimiques à 6 Mt.

Mais Tarragone a également une position solide dans l’agroalimentaire. C’est le premier port espagnol importateur de céréales avec un trafic de 3 à 4 Mt par an. En juillet 2012, Tarragone a démarré l’exportation d’animaux vivants. L’année dernière, plus de 18 500 têtes de bétail (veaux et moutons) ont été exportées vers la Libye et le Liban. Tarragone est mieux positionné géographiquement pour les éleveurs de Catalogne et d’Aragon que les ports de Carthagène (Murcie) ou de Sète en France. Le port espère développer de nouveaux courants vers l’Algérie, la Turquie et l’Égypte.

La position du port devrait être renforcée grâce à l’amélioration des infrastructures. Les entreprises du pôle chimique demandent avec insistance une connexion UIC avec l’Europe. Le 1er février, la société suisse Bertschi a inauguré une nouvelle gare intermodale destinée à offrir un service de transport ferroviaire aux entreprises du pôle chimique mais aussi à celles d’autres secteurs. D’autres projets similaires sont envisagés. L’APT construit une gare intermodale près du terminal de conteneurs de DP World qui permettra de constituer des trains de 750 m et aura une capacité de 400 000 EVP. Les différents tronçons du troisième rail entre le port et Castellbisbal, qui se trouve sur la liaison UIC Barcelone-frontière française, ont été adjugés.

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