Près de 4,3 Mt: tel est le tonnage représenté par les trafics pétroliers sur le port de Bordeaux. Soit environ la moitié du trafic total. Autant dire qu’une moindre variation se traduit par des impacts importants pour le port de Bordeaux. Jusqu’à présent, la baisse structurelle des imports pétroliers au niveau national a globalement épargné les imports bordelais stabilisés autour de 4 Mt. Sur ces 4 Mt provenant des raffineries de Donges, mais également de Scandinavie et de Russie, le gasoil représente 3 Mt. Cependant, les deux premiers mois de 2013 accusent une baisse de ces entrées de 13,2 % (− 85 000 t) pouvant annoncer un déclin plus prononcé. Mais au port de Bordeaux, l’inquiétude n’est pas de mise. « Nous sommes bien évidemment confrontés à un marché qui baisse d’environ 2 % par an. Pour autant, grâce aux investissements réalisés tant par le port que les opérateurs, nous restons confiants sur la stabilité des trafics », indique Thibaut Guillon, chargé du trafic pétrolier au port de Bordeaux.
L’établissement portuaire, à la fin des années 1990, a investi massivement pour la rénovation du poste 512 d’Ambès, améliorant la sécurité de cet appontement et l’accueil de navires à plus fort tirant d’eau. Un chantier similaire (7,3 M€) sur le poste 511 d’Ambès, suivi d’aménagements réalisés par l’un des opérateurs pétroliers EPG, vient juste de s’achever. En parallèle, les trois opérateurs pétroliers de la place bordelaise n’ont cessé de peaufiner leur logistique. Docks des pétroles d’Ambès, DPA, plus gros client du port réceptionnant de deux à sept navires par semaine (2,5 Mt de trafic maritime annuel), maillon logistique entre les raffineries et les réseaux de distribution de carburants situés dans le grand Sud-Ouest (Total, Esso, BP…), a déboursé de 2009 à 2013 plusieurs millions d’euros pour moderniser ses postes de chargement et améliorer la rapidité de flux de ses 200 à 300 camions-citernes accueillis chaque jour sur leur site. Pouvant stocker jusqu’à 270 000 m3 de gazole, essence et fioul domestique, (sites de Bassens, Bayon et SPBA à Ambès reliés par pipeline à Bassens), DPA a de même fait en sorte d’optimiser l’utilisation de ses bacs. L’autre opérateur pétrolier d’Ambès, EPG, Entrepôts pétroliers de la Gironde (1,5 Mt de trafic maritime annuel), va disposer quant à lui d’un nouveau bras à travers la modernisation du poste 511 et a investi pour de nouvelles cuves à l’horizon 2014. De même, la CCMP, Compagnie commerciale manutention pétrolière, qui fait figure essentiellement de dépôt stratégique de l’État avec 600 000 t importés par an, poursuit sa politique de rénovation de ses cuves et d’augmentation de ses capacités de stockage.
Élargir l’hinterland
Tous ces sites, interconnectés par pipelines, ont joué la carte de la mutualisation logistique pour mieux gérer les capacités de stockage de chacun et réaliser ainsi des économies. « L’un des axes du projet stratégique du port de Bordeaux serait d’optimiser cette interconnection, notamment en utilisant davantage le site de Pauillac, relié par pipelines à Ambès. Offrant de meilleures capacités nautiques, ce terminal, situé en outre plus près de l’entrée de l’estuaire, permettrait des gains de temps de navigation et l’accueil de plus gros porteurs », précise Étienne Naudé, directeur du développement et de la stratégie au port de Bordeaux. Pour contrer la baisse du marché, l’objectif serait également d’arriver à élargir l’hinterland. « Notamment du côté de la région toulousaine qui se fournit actuellement à Marseille. L’écotaxe sur le transport routier pourrait être une occasion de desservir de nouvelles destinations », ajoute Thibaut Guillon.
Morosité sur les biocarburants
Au niveau des exports, le port de Bordeaux réalise un tonnage annuel d’environ 300 000 t à 400 000 t. Plus de la moitié provient des sorties de pétrole brut de l’entreprise Vermillion qui, dernièrement, suite à des incidents de cuves, a lancé une nouvelle logistique. Depuis 2006, Diester Industries, unité de production de biodiesel alimentant les cuves de DPA, EPG et de la CCMP, exporte, lui, par voie maritime son reliquat de production à hauteur de 75 000 t à 125 000 t par an vers La Rochelle. Mais les tonnages escomptés ne sont pas au rendez-vous, l’entreprise tournant en sous-production par rapport à ses capacités, conséquence de la baisse des aides étatiques comme des incertitudes de Bruxelles sur ce produit, et notamment le pourcentage d’incorporation du biodiesel dans la Gasole. Ce produit indissociable de la filière graines-huiles et tourteaux, qui au total représente plus de 600 000 t de trafic maritime à Bordeaux, pourrait cependant connaître un regain avec la nouvelle unité de décorticage de graines de tournesol de Saipol (filiale Sofiprotéol, exploitant Diester Industries). Cette dernière, basée à Bassens, sera désormais en capacité de traiter plus d’1 Mt de graines au lieu de 650 000 t. Avec cette nouvelle installation, elle peut également désormais se positionner sur le marché des tourteaux de tournesol high pro. Autant d’espoir pour booster les trafics maritimes de la filière.